"J'ai tout mis dedans comme si c'était le dernier" : Hatik se dévoile avec son deuxième album "Niyya"
Hatik est rappeur et acteur. Il aime multiplier les expériences et c'est d'ailleurs par le biais de son projet musical Chaise pliante, sorti en 2018, que le public l'a découvert. Son tube Angela a définitivement enfoncé le clou avec plus de 130 millions de vues sur YouTube. Et puis il y a eu, en 2020, la série Validé de Franck Gastambide dans laquelle il joue le rôle principal, celui de Clément dit Apash, qui scannait le milieu de l'industrie musicale et du rap. Il y a eu aussi des tournées jouées à guichet fermé avec une présence scénique indiscutable. Ce vendredi 12 mai 2023, Hatik sort un nouvel album, Niyya.
franceinfo : Niyya contient 17 chansons. C'est une immersion totale dans votre intimité. Vous vous racontez sans détour. Vous souhaitiez livrer un album sans filtre, sans concession ?
Hatik : L'idée, c'était d'aller au bout des choses. C'est pour ça que c'est un album qui a mis beaucoup de temps à voir le jour. J'ai tout mis dedans comme si c'était le dernier. Comme ça, au moins, si jamais je décidais d'arrêter après, je n'aurais pas de regrets.
Votre premier single parle d'amour. Est-ce qu'avec cet album, vous avez réussi à vous autoriser à le vivre, ce grand amour ?
Pour le coup, je suis arrivé à un stade de maturité où une fois que tu es tombé amoureux une, deux, trois fois, tu commences à comprendre un petit peu le circuit. Là, ça y est, j'ai tout ce qu'il me faut dans ma vie et je pense que je peux faire des très belles chansons d'amour. Et surtout, au-delà de faire des belles chansons d'amour, juste vivre la vraie vie amoureuse de tous les jours, c'est ça le plus important.
Ce qui est fou, je veux vous le dire comme je l'ai ressenti en écoutant cet album, c'est qu'on a le sentiment que vous chantez comme si c'était la dernière fois, comme si votre vie en dépendait.
J'étais persuadé que ‘Niyya’ serait mon dernier projet, que j'allais arrêter parce que je n'avais plus envie.
Hatikà franceinfo
J'en ai eu ras-le-bol de tout ça et j'avais besoin de faire autre chose, de vivre la vraie vie ou de juste en finir avec la vie. C'est triste d'en arriver là pour des problèmes qui ne sont pas les plus graves du monde, mais forcément, j'ai écrit cet album sans filtre et je voulais amener ce degré-là d'interprétation dans ma musique. C'est pour ça que j'ai été cherché très loin certaines choses, qui ne sont pas forcément évidentes à sortir. En tout cas, je suis content de les avoir sorties. C'est une thérapie, ça m'a fait du bien. Je suis soulagé et maintenant je suis même passé à autre chose. Je peux penser à continuer à faire encore de la musique sans me dire je vais arrêter.
Vous abordez un sujet aussi, souvent tabou dans le milieu du rap, avec le titre : Si seulement tu savais. La perception de la célébrité dans l'entourage, du quartier. Est-ce que c'est quelque chose qui vous a touché ?
Il faut se rendre compte d'un truc, c'est que quand on est un jeune rappeur et qu'on arrive, on est souvent issu d'un quartier. On a une bande de potes avec qui on a grandi. Pour le coup, ce sont des amis d'enfance ou d'adolescence. On a des rapports qui sont très sains parce que c'est un quartier, on est tous ensemble, on est des potes, c'est une bande de potes. Tout le monde dit qu'il veut pousser le truc et que "on est super content pour toi, etc."
Et puis le jour où vraiment, ça commence un petit peu à prendre, là ça commence à devenir un peu plus compliqué. Il y a des envies, des manigances pour arriver à ses fins, pour essayer de gratter un petit peu d'argent à droite à gauche et récupérer des contrats qui ne sont pas les leurs, etc. Donc quand on perd des amis, même si c'est un choix, ça reste quand même dommage parce que le but, le rêve au fond, c'était de tous monter ensemble et d'avoir ce truc très familial qui reste. Et moi j'ai toujours dit : nous, ce n'est pas comme chez les autres, on va rester ensemble. Il s'avère que c'est comme chez les autres, donc on ne va pas rester ensemble. Mais ce n'est pas grave !
Cet album passe donc de l'ombre à la lumière. Il tourne une page pour permettre d'écrire une nouvelle histoire. Comment l'imaginez-vous ? Elle est positive ?
Déjà, elle va être instinctive parce que là, j'ai réfléchi pendant deux ans et demi à un album, intellectualisé des douleurs internes et des trucs. À un moment donné, c'est bien, mais c'est dur, c'est douloureux, ça prend beaucoup d'énergie de penser un album qui est aussi dense. Oui, c'est le début d'autres choses, beaucoup plus instinctives et lumineuses dans le sens où je ne vais pas revenir sur ce que j'ai déjà évoqué dans cet album dans les prochains.
Un mot sur la scène puisqu'il va falloir que cet album naisse sur scène aussi !
Pour la scène, je suis dans un dilemme. Y aller ou pas ?
Hatikà franceinfo
Est-ce que je défends cet album sur scène et prends le risque de retomber dans les vieux travers que j'avais sur la tournée d'avant, à savoir interpréter des morceaux très tristes, les faire à fond tous les soirs et être dans un mauvais mood ? Ou ne pas partir en tournée pour me préserver, me reposer parce que ça fait cinq ans que je cours dans un tunnel et que je ne m'arrête pas et peut-être laisser un petit peu de temps et repartir plus tard ? Je pense qu'on va partir sur la seconde option parce que ça me paraît être le plus sage. J'ai un public qui demande beaucoup mais qui comprend aussi très bien. C'est aussi mon avantage, c'est-à-dire que si je leur explique, ils comprendront complètement. Pour ceux qui m'ont vu en concert l'an dernier, et il y a des soirs où ça a été dur et même les gens se disaient : "Pourquoi il est là ?" Quand tu n'arrives pas à finir un morceau parce que tu fonds en larmes et que tu quittes la scène, je pense que même quand on aime beaucoup l'artiste, on peut lui souhaiter quand même autre chose. Sur scène ou en off, ce n'était pas joyeux alors je pense que personne ne me souhaite ça.
Aujourd'hui, tout va bien ?
Tout va très bien. Tant que je peux aller au sport, c'est bon !
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