Cet article date de plus de deux ans.

"Je cherchais des mélodies et Laurent Voulzy a apporté une rythmique qui m'a ébloui", Alain Souchon évoque "J’ai dix ans"

Toute cette semaine, Alain Souchon est l’invité exceptionnel du monde d’Élodie. Un tête-à-tête en cinq chansons qui ont marqué sa vie professionnelle comme personnelle. Aujourd’hui, "J’ai dix ans".

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 125 min
Alain Souchon et Laurent Voulzy collaborent depuis les années 1970.  (LECOEUVRE PHOTOTHEQUE / COLLECTION CHRISTOPHEL VIA AFP)

Alain Souchon est l'une des figures majeures de la chanson française depuis les années 70. Sa carrière est notamment marquée par sa collaboration et sa très forte amitié avec Laurent Voulzy. Le monde d'Élodie revient cette semaine sur cinq de ses titres incontournables. Aujourd'hui, J'ai dix ans, sorti en 1974.

franceinfo : Rien dans votre enfance ne laissait présager que vous alliez avoir un tel parcours. Élève distrait, rêveur, vous aviez des résultats calamiteux, mais il y avait la poésie.

Alain Souchon : Mes parents étaient, même si j'ai eu une enfance chaotique, des gens cultivés, gentils, pour qui les stars n’étaient pas les footballeurs, mais George Sand, Colette, Jean Cocteau. Je voyais bien que c'était mon environnement et j'ai découvert la poésie.

Enfant, la poésie m'a grisé à cause du rythme des mots.

Alain Souchon

à franceinfo

Votre mère vous a envoyé dans un lycée français en Angleterre. Là-bas, vous allez travailler dans un pub et j'ai l'impression qu'il va y avoir comme un énorme déclic. On va vous appeler le French Man, vous allez acquérir le goût des chansons populaires !

Oui. Je suis allé là-bas. C'était la mode de Ray Charles et puis après, de l'arrivée des Beatles, des Rolling Stones. Il y avait une frivolité qui me faisait envie, que je trouvais sympa, mais j'étais quand même très attaché à la chanson française de tradition que j'aimais beaucoup, qui venait de la poésie, celle de Léo Ferré, Georges Brassens, Jacques Brel, Guy Béart, Barbara, tous ces gens qui m'ont fasciné quand j'avais 12, 13 ans.

Cela m'a donné l'impression qu'une chanson, de toute façon, était un truc qui racontait une histoire. Notre rencontre avec Laurent Voulzy a été plutôt agréable techniquement et professionnellement. Lui partait plutôt de la musique, était emporté par les gimmicks, les suites harmoniques, moi, c'était plus par les mots. Ce mec est assez formidable et sympa !

On comprend très facilement pourquoi cela a matché entre vous, c'était évident, vous êtes très complémentaires.

Oui, très. C'est très marrant comme situation parce que je lui dois tout et il dit la même chose de moi et on se dit souvent : "Au fond, c'est dingue cette rencontre !"

Laurent Voulzy et moi, on a besoin l'un de l'autre.

Alain Souchon

à franceinfo

Vous allez rentrer en France après l'Angleterre et vivre de petits boulots. C'est à ce moment-là que vous allez tenter votre chance dans des petites salles parisiennes. Étranglé par les difficultés financières, vous écrivez en 1973 la chanson L'amour 1830, destinée à Frédéric François. Et c'est Bob Socquet qui vous dit : "Il ne faut pas que tu lui donnes, il faut que tu la chantes toi".

Oui, c'est ça. J'ai été époustouflé parce qu'il m'a dit : "J'aime bien ta voix", alors que moi, j'étais plutôt complexé par ma voix et je me disais que je ne pourrais jamais être chanteur. "On va faire un 45 tours. Tu vas enregistrer avec un grand orchestre, avec des violons et tout ça et puis, on va aller faire la rose d'or d'Antibes. Et puis on va voir". Et alors, j'ai fait ça, j'étais porté par le truc. Bob Socquet était très intelligent, très drôle, très agréable, et on est allés faire ce concours de chansons et on a eu un prix. J'étais content. Je me disais : c'est marrant, je chante et puis ma voix passe. Peu de temps après, il nous a dit à Laurent et moi : " Les gars au boulot, faites un album".

L'album s'appelle J'ai dix ans et la chanson du même titre est un énorme succès. Vous allez devenir, réellement, la figure de proue de la presse de la chanson française. Comment avez-vous vécu cette notoriété immédiate ?

C'est assez grisant, assez drôle et en même temps, on n'y croit pas. Ce qui était incroyable, c'est par rapport à la rencontre avec Laurent, c'est-à-dire que moi, tout seul, je pataugeais avec mes chansonnettes, pas bien et tout ça, lui pareil de son côté. Et le fait qu'on fasse des trucs ensemble et qui soient des succès : J'ai dix ans, Bidon. Il y a de la rumba dans l'air puis Rockollection au niveau mondial, on se dit : "C'est dingue de s'être rencontrés !"

Que représente la chanson : J'ai dix ans ?

Le fait que moi, je cherchais des mélodies, des espèces de comptines et lui a apporté une rythmique qui m'a ébloui. Je me suis dit : oui, c'est ça qu'il faut ! Et puis, on ajuste les mots à cette rythmique qui est géniale, comme font les rappeurs maintenant, c'est-à-dire que les mots, c'est de la rythmique aussi. C'est ce que j'avais d'ailleurs aimé en lisant la poésie, c'est que c'est de la musique.

 (Nouvelle) collection d'Alain Souchon comprenant trois CD avec 57 titres. Il sera en tournée en 2022.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.