"Je ne suis pas là pour entrer dans des cases" : Claudia Tagbo se lance dans le hip-hop avec le film "Yo Mama"
Claudia Tagbo est actrice et humoriste ivoiro-française. Elle est née à Abidjan et a grandi à Chanac, en Lozère, où elle est arrivée à l'âge de 13 ans, puis à Alès dans le Gard. Ces années ont été pour elle un choc culturel et climatique ! Sa carrière de comédienne et de femme déterminée a débuté au collège, dans son premier rôle, celui de déléguée de classe. Cela lui a valu d'être encouragée par François Bayrou, qu'elle a rencontré lors d'un de ses déplacements : "Arrêtez l'école, vous serez une excellente comédienne".
Ce mercredi 5 juillet, Claudia Tagbo est à l'affiche du film : Yo Mama de Leïla Sy et Amadou Mariko, avec Jean-Pascal Zadi en guest-star, Zaho et Sophie-Marie Larrouy. Il existe une bande-originale du film pour prolonger le film.
franceinfo : Yo Mama est un gros plan sur le rôle des mères, sur la place qu'elles occupent. On vous sent très investie dans ce rôle qui est un bel hommage au métier le plus difficile du monde.
Claudia Tagbo : C'est joli ! Le rôle le plus difficile au monde, oui, celui d'être mère. Alors, souvent, quand on dit ça, j'ai l'impression qu'on exclut un peu les femmes qui n'ont pas d'enfant, mais vous êtes aussi des mères parce qu'une tatie est une maman, une grand-mère est une maman. Enfin bref, toutes les femmes... Un rôle difficile : femme !
Vous avez grandi à Abidjan, en Côte d'Ivoire et justement, vous avez été entourée par ces femmes qui vous ont vraiment portées depuis votre plus tendre enfance. Il y avait les épices des plats de votre mère, il y avait les séances de coiffure. Votre mère coiffait vos tantines, justement. On retrouve ça à l'intérieur de ce film. Votre mère, c'est votre pilier ?
Oui, c'est le pilier de tout enfant, le père et la mère. Ma mère, elle est là. Donc oui, ma mère est importante dans ma vie.
"Ma maman est très calme. Elle est très, très haute en lumière parce qu'elle ne parle pas beaucoup. Du coup, avec mes frères et sœurs, on la voit, on la sent en fait ! On se dit : ‘Maman arrive’."
Claudia Tagboà franceinfo
Vos parents étaient totalement différents.
Oui. complètement.
Mais en même temps, ils étaient d'accord sur une chose : vous encouragez à ce que vous fassiez votre passion et vous ont encouragé à suivre des cours dans un atelier théâtre. On sent justement que, en tant que sœur aînée de cette fratrie de sept enfants, vous avez réussi à trouver votre équilibre à travers ce métier-là...
Oui, c'est, à travers mon métier en tout cas, de me dire : écoute, personne ne t'attend là, qu'est-ce que tu risques ? Dis oui, et puis tu verras bien ce qui se passe. Mais oui, l'aînée de sept... Il y a un truc que je leur ai enlevé à tous, c'est le fait qu'ils ont envie d'être intermittents du spectacle, ‘No way’ ! Même mes neveux et nièces, je les vois encore en train d'arriver dans mon petit studio à regarder et à dire : "Mais tatie, c'est toi la grande sœur de maman", ben oui, "Il n'y a pas de télé chez toi et on va dormir où, nous, dans un canapé ?" Ils sont très contents pour moi, mais peut-être dans la nouvelle génération de bébés qui arrive, peut-être qu'eux, auront envie d'être comédiens, mais les autres, non.
À partir du moment où vous êtes montée sur scène avec le Jamel Comedy Club et que vous avez appris votre métier, la première chose qui vous tenait à cœur, c'était de monter sur scène et de faire un one-woman-show. On sentait que vous aviez besoin de reprendre votre vie en main et d'aller balayer d'un revers de main les complexes que vous aviez pu traîner derrière vous pendant des années...
Exactement. De dire à la petite fille : "Écoute, on t'a toujours dit : tu as de gros yeux, tu as des grosses fesses. Eh bien, regarde, tu es sur scène et les gens rient parce que toi-même, tu ris de ça. Ça veut dire que tu as accepté la chose". Et maintenant je vois toutes ces jeunes femmes et je me dis : ah ah les gars, on avance, mais ça a été long ! Je ne suis pas là pour entrer dans des cases, je suis là, en tout cas pour être sur mon chemin.
Ce qu'on découvre à l'intérieur de film aussi, c'est qu'une mère, c'est une cheffe d'équipe. Par moments, on peut être dépassée, mais les mères en général restent déterminées.
"Les mères sont déterminées. Et là, c'est ce qui se passe dans 'Yo Mama'. Elles viennent pour dire : 'On va communiquer avec nos enfants. Ah oui, on ne peut communiquer qu'avec le rap ? On va faire du rap’."
Claudia Tagboà franceinfo
Même si les intentions du début sont bonnes, elles se font dépasser par l'hyper communication que nous avons actuellement. Une simple vidéo double son nombre de vues par rapport à leurs enfants. Et du coup, elles se rendent compte que leur objectif de départ, ce n'était pas ça. Il faut donc revenir à l'essentiel, là où sont nos enfants. Voilà les mamans, ce sont elles qui tiennent. Là, on est en pleine promo et j'entends : oui, les quartiers... Non, c'est au-delà du quartier. Les mamans tiennent. Elles tiennent le foyer. C'est elle qui va te gainer, même si ce n'est pas ta mère biologique ! Je parle de toutes les belles-mamans, même si les enfants sont ingrats en leur disant : "Oui, mais de toute façon, tu n'es pas ma mère !" Ne lâchez pas, ils vous remercieront un jour comme moi, je remercie toutes mes belles-mères. Donc oui, les mamans, on est le socle.
Ce film, on sent qu'il est particulier, qu'il vous a apporté quelque chose de supplémentaire, une autre dimension.
Une autre dimension, une autre couleur. Et puis c'est surtout d'être dirigée par une femme. Donc, merci beaucoup à Leïla Sy de sa confiance et d'être venue me chercher !
Leïla Sy a d'ailleurs vécu des choses similaires dans votre parcours.
Oui. Quand je suis arrivée le premier jour sur son plateau, j'étais très heureuse. Je lui ai dit : merci beaucoup pour ta confiance. Et puis j'espère que ce film va toucher beaucoup de gens. Et j'insiste vraiment sur le côté : ce sont toutes les mamans, la sororité, les générations, la communication et qu'on soit dans le VIIème arrondissement de Paris ou à Chanac, on parle à tout le monde, donc il faut vraiment aller le voir.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.