"Jouer Shakespeare, c’est magique !" : Barbara Schulz sur scène dans la pièce "Comme il vous plaira"
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, la comédienne Barbara Schulz. Elle est actuellement sur la scène de la Pépinière Théâtre dans la pièce de William Shakespeare "Comme il vous plaira".
Barbara Schulz est actrice. Son rôle dans le film La dilettante de Pascal Thomas (1999) lui a valu une nomination aux César dans la catégorie meilleur espoir féminin en 2000, avec Catherine Frot à ses côtés. Depuis, elle a obtenu un Molière pour la pièce Joyeuses Pâques (2001) et une nomination pour Pygmalion, en 2006. Aujourd'hui, elle est sur scène dans Comme il vous plaira de William Shakespeare à la Pépinière Théâtre.
franceinfo : Comme il vous plaira est l'histoire de deux jeunes filles qui décident de s'enfuir parce qu'elles font partie d'une cour qui ne leur convient pas du tout. Elles s'enfuient dans la forêt, l'idée étant d'aller chercher une forme de liberté, de retrouver quelque chose qu'elles n'ont jamais eu.
Barbara Schulz : Deux jeunes filles opprimées dans un monde d'hommes, avec des robes trop serrées, qui n'ont pas le droit de parler, de respirer, le droit de rien faire, qui s'ennuient dans ces grands palais vides. Et un jour, le personnage que je joue, Rosalinde, est banni et ma cousine, qui est comme ma sœur, me dit : "Tu sais quoi ? Moi aussi, je vais partir". Elles vont rencontrer l'amour.
"'Comme il vous plaira' de William Shakespeare est un hymne à la vie, à la joie, à la nature, au retour à la nature."
Barbara Schulzà franceinfo
C'est vraiment l'écriture de William Shakespeare, mais il y a une vraie adaptation qui est faite. Est-ce qu'il a fallu dépoussiérer le propos alors qu'il reste le même et qu'il est toujours d'actualité ?
Moi, je découvre. Je n'avais jamais joué Shakespeare. C'est assez magique. J'ai l'impression d'être Alice au pays des merveilles, c'est-à-dire que c'est la chose la plus difficile que j'aie eu à répéter. Le texte dans ma bouche, la palette de jeu va de Racine à Jean Poiret. Une fois que tout ce travail très difficile est fait, on l'oublie et alors là, je m'envole. Shakespeare, pour un acteur, vraiment, je le recommande ! C'est un trip, quoi. Shakespeare, c'est comme Victor Hugo pour moi. Ce sont des gens qui mettent une loupe sur notre vie et qui nous la montrent autrement. Il y a plus d'étoiles, il y a plus de couleurs, c'est en mieux, c'est plus fort.
Je voudrais qu'on parle de vos débuts. Ça a commencé très tôt pour vous. Votre mère vous a communiqué une passion, celle du jeu, de la scène, du théâtre.
Elle en avait envie. Elle a grandi dans un milieu où personne ne faisait ça, en province. Donc elle n'a jamais pu et quand elle a senti chez moi cette petite flamme allumée, j'ai eu une oreille, j'ai eu une bienveillance, à condition que je mène des études sérieuses.
Ce que vous avez fait avec un bac scientifique, une licence de sciences-éco. Et, en parallèle, des cours d'art dramatique.
Oui, c'était vraiment surréaliste. Le matin, j'étais au cours de Jean-Laurent Cochet à Saint-Germain-en-Laye puis après à Tolbiac en TD de macroéconomie. J'avais mes partiels au ras des pâquerettes grâce à des copines très sympathiques qui me filaient les cours et me faisaient réviser. J'étais bonne en maths, j'ai toujours aimé les énigmes, les maths.
Est-ce que ça a été une évidence, ce métier ?
Ce que je ressens, là, quand je suis sur scène, dans ce Shakespeare, c'est tellement merveilleux. Je nous vois. On est une troupe, on est neuf, une merveilleuse troupe comme j'en ai rarement eu. Je me souviens qu'on était dans notre salle de répétition, au théâtre de la Pépinière, à rire, à répéter ce Shakespeare, cette langue qui a été écrite en 1600 et dans les bureaux d'en face, de l'autre côté de la rue, il y avait des gens penchés sur des ordinateurs et on s'est regardé et on s'est dit : "Mon Dieu, on a tellement de chance de faire ce qu'on fait".
Il y a toujours eu une flamme, parce qu'au début, vous avez tout fait : apparitions, pubs... Et puis, le premier rôle au cinéma dans Coup de jeune de Xavier Gélin, en 1993.
J'avais une phrase et j'étais complètement à côté de la plaque ! Je me souviens d'avoir dit à ma mère : ça y est maman, je fais du cinéma. Au final, je crois qu'on voit que mon cul... Bon avec Jean Carmet, c'est pas mal ! Je n'avais aucune idée de ce que c'était que ce métier. C'est avant tout du travail, c'est rien d'autre.
"Être acteur, c'est une vibration. C'est comme si on était investi d'une mission."
Barbara Schulzà franceinfo
Je ne suis pas mystique, mais le théâtre, c'est important. Par exemple, les gens qui me disent : "Je vous ai vue au théâtre", j'ai l'impression que je les connais, plus que les gens qui m'ont vue à la télé ou dans un film, on a partagé quelque chose à un moment donné.
C'est quoi la puissance du théâtre ?
C'est un hymne au présent, à ce qui se passe là, à cet instant-là. Après ces temps de Covid-19, où on a été isolés les uns des autres, il y a quelque chose de ce que l'humain peut faire de mieux, du domaine de l'imaginaire qu'on va chatouiller les gens au théâtre. On leur fait croire à des choses folles, alors qu'on sait qu'il n'y a que trois murs et que tout est faux, je trouve ça fantastique.
Ça vous apporte quoi les prix ?
Le jour où j'ai eu mon Molière, je me souviens. J'avais vraiment essayé de faire le lien avec l'enfant que j'avais été, qui regardait cela à la télé et qui voulait être actrice. Quand on dit : "On va aller voir l'enfant blessé", moi, j'étais allé voir l'enfant qui voulait faire ce métier et j'ai dit : tiens, regarde, ça y est.
C'est aussi un bel hommage que vous rendez à votre mère, à travers ce parcours ?
Oui, bien sûr. Elle est très fière, très heureuse pour moi. Elle m'a dit, c'était joli : "Quand tu réussis, c'est comme si ça m'arrivait aussi un peu". Je partage avec elle.
C'est quoi la suite ? Qu'est-ce qui vous tient à cœur ? Qu'est-ce qui vous donne envie ?
Je vais, j'espère, réaliser bientôt mon premier long métrage. J'ai déjà réalisé un court métrage avec Jackie Berroyer, il a gagné pas mal de prix dans des festivals. J'ai tellement aimé réaliser qu'en fait, j'ai l'impression de devenir femme, enfin, en devenant réalisatrice. C'était la première fois que j'étais en puissance, mais pas en puissance pour écraser les autres, juste totalement aux commandes de tout.
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