Mazarine Pingeot explore les fêlures de l’enfance et les angoisses de notre société dans son roman "Et la peur continue"
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, Mazarine Pingeot, romancière, philosophe, scénariste et administratrice de la Fondation François Mitterrand, son père.
Et la peur continue, le nouveau roman de Mazarine Pingeot, raconte l’histoire d’une quadragénaire, Lucie, happée par une peur intérieure inexpliquée. Un roman dans lequel la vie d’une mère de famille est bousculée quand la mémoire laisse remonter à la surface des évènements enfouis au plus profond d’elle-même : "Son rapport au réel commence à se dissoudre, c’est un peu l’histoire d’une dépression, qui va chercher effectivement dans l’enfance, dans cette matière-là qui nous construit ou nous déconstruit lorsqu’il y a eu du trauma", précise l’auteure.
C'est un livre sur les fêlures de l’enfance que l’on dissimule lorsque l’on devient adulte : "Oui, c’est à la fois, un livre sur la difficulté de parler (…) et ces blessures qui sont comme des cancers lorsqu’elles ne sont pas énoncées et qui finissent par vous rattraper (…) Et puis c’est aussi un livre sur l’imminence de la catastrophe". Mais l’écrivaine analyse aussi en parallèle notre époque : "Celle de la peur", où on se promène dans la rue et voit des militaires armés ou encore le flot d’informations anxiogènes délivré par les médias.
C’est une époque extrêmement anxiogène, c’est une époque de peur et c’est une époque aussi où économiquement, socialement, tout est en train de basculer. Ce personnage va à la fois replonger dans un passé qui ne passe pas et en même temps subir de plein fouet la violence très sourde qui est celle de notre époque.
Mazarine Pingeotà franceinfo
De l’ombre à la lumière
Fille longtemps cachée de l’ancien président de la République François Mitterrand, elle a 20 ans lorsque l’on découvre son existence et son visage. Un moment douloureux pour elle : "C’était assez terrifiant parce que je suis passée d’un monde à un autre d’un seul coup. Je ne savais pas comment il fallait faire, s’il fallait continuer à se cacher tout en étant montrée. Comment résoudre cette équation impossible ? Evidemment quand on a pris l’habitude de ne pas se montrer, on la garde. On n’en change pas du jour au lendemain, c’est plus qu'une habitude, c'est une seconde nature, donc ça a été un peu brutal mais c'est comme ça, chacun son karma".
Qu'a-t-elle gardé de la relation avec son père ? "Je pourrais toujours dire qu’il m’a transmis l’amour des livres mais en réalité je pense que c’est plus compliqué que ça. C’est difficile à transmettre l’amour des livres." D'ailleurs, confie-t-elle à Elodie Suigo, "mes enfants n’aiment pas lire du tout alors qu’il n’y a que ça à la maison."
Je pense que mon père m’a légué de vraies valeurs, une forme de curiosité, une absence de préjugés. J’ai grandi là-dedans, forcément ça imprègne.
Mazarine Pingeotà franceinfo
Mazarine Pingeot parle du temps qui passe, de "la discontinuité du temps". Elle avoue être plus heureuse aujourd’hui "que lorsque j’avais 20 ans justement. Je n’y vois que de la richesse, des apports. Le fait de se construire, d’engranger des expériences, ça n’est que positif. J’ai de la nostalgie pour mon enfance mais j’ai l’impression que la vie a plutôt été un combat pour aller bien."
Roman Et la peur continue, aux éditions Mialet-Barrault.
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