L'Indonésie transfère sa capitale de Jakarta vers la ville nouvelle de Nusantara
Le parlement indonésien a validé mardi 18 janvier le changement de sa capitale. Jakarta va céder sa place à Nusantara, une ville qui reste à construire.
Adieu Jakarta, bonjour Nusantara ! L'Indonésie a acté, via un vote de son Parlement mardi 18 janvier, le transfert de la capitale actuelle vers une ville nouvelle qui reste à construire. Ce projet de déménagement est un serpent de mer qui remonte à l'indépendance, en 1945, mais qui a été officiellement relancé il y a trois ans.
Après plusieurs reports c'est officiel, la nouvelle capitale doit être achevée pour 2045 (les premières pierres devaient être posées en 2020 mais la pandémie est venue bouleverser le calendrier). Bâtiments et infrastructures sont encore en cours de construction, le réaménagement se fera par étapes. À partir de 2024, 25 000 fonctionnaires iront s'y installer chaque année.
Voir cette publication sur Instagram
Pourquoi ne pas garder Jakarta comme capitale ? Parce que la chaotique mégalopole de plus de 30 millions d'habitants, la plus grande d'Asie du sud-est, devient invivable. Elle est paralysée par des embouteillages monstres (qui feraient perdre sept milliards de dollars chaque année au pays), étouffe sous la pollution, se retrouve régulièrement dévastée par les pluies torrentielles et les inondations - elle s'affaisse sous la mer de 18 centimètres par an.
Jakarta, située sur l'île de Java, restera la capitale économique. Mais l'objectif est aussi de déconcentrer, de mieux répartir le développement de l'archipel, car Java abrite à elle seule 60 % de la population.
Les inondations qui ont frappé la région de Jakarta, en Indonésie, ont fait au moins 23 morts, un bilan qui pourrait encore s'alourdir, a annoncé l'agence de gestion des catastrophe #AFP pic.twitter.com/JiTell6OGv
— Agence France-Presse (@afpfr) January 2, 2020
Nusantara, la nouvelle capitale créée de toute pièce, sera située sur l'île de Bornéo, à 1 500 kilomètres de Java, dans la province de Kalimantan Est. Il s'agit d'une zone plus vaste, plus centrale dans l'archipel, moins exposée aux catastrophes naturelles mais surtout riche d'une immense forêt tropicale, l'une des plus grandes au monde, partagée entre l'Indonésie, la Malaisie et Brunei.
Les premières maquettes montrent une ville futuriste (utopiste ?) au milieu des arbres. Des éoliennes, des passerelles piétonnes et un futur palais présidentiel en forme d’immense Garuda, aigle mythologique du blason national. Le président Joko Widodo promet un lieu de vie innovant où tout sera "accessible à vélo ou à pied". Cette "ville zéro émission" serait aussi un centre d'attraction pour les talents internationaux. Le budget estimé est de 33 milliards de dollars pour l'instant, financé à 19% par l’État. Le reste sera payé par des investissements privés venus du Japon ou des Émirats arabes unis.
Une opération séduction qui ne convainc pas
Pourquoi avoir choisi le nom de Nusantara ? Le mot signifie "archipel", en indonésien. Il a été retenu parmi 80 propositions parce qu'il a été jugé le plus facile à mémoriser. C'est par ailleurs un mot qui décrit déjà les spécificités indonésiennes. On parle par exemple d'"islam nusantara" pour désigner l'islam tolérant des Indonésiens, de "batik nusantara" ou de "route des épices nusantara".
Mais cette opération séduction ne suffit pas, loin de là, à emporter l'adhésion de la population. Les écologistes ont prévenu que ce déménagement risquait d'accélérer la pollution dans une zone jusqu'ici relativement protégée et de contribuer à la destruction des forêts tropicales qui abritent les orangs-outans en voie d’extinction et les singes à long nez. En prévision d'une expansion de la ville, l’État dispose en effet d’une réserve de terrain plus de 256 000 hectares d’espaces verts, autant de surfaces vierges qui risquent d'être victimes d'une urbanisation galopante dans les années qui viennent. Ils n'ont pas été entendus.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.