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Naples, "tiers-monde de l'Europe" ? Un article du "Figaro" allume le feu en Italie

Un article du "Figaro" paru début octobre met le feu aux poudres à Naples. Il qualifie la ville de "tiers-monde de l'Europe". Les intéressés le prennent mal.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Une rue de Naples (Italie) (FRÉDÉRIC SOLTAN / CORBIS NEWS via GETTYIMAGES)

Cet article du Figaro (réservé aux abonnés) a été publié le 1er octobre 2021, juste avant les municipales en Italie. Le quotidien français explique pourquoi les Napolitains vont élire dès le premier tour un certain Gaetano Manfredi, ingénieur sans expérience politique mais attendu comme le Messie pour remettre la ville sur les rails après des années de mauvaise gestion.

Car Naples est en piteux état : "Malgré ses quelques places rénovées (...) parmi les plus belles d’Europe, la ville reste le tiers-monde en Europe. Le tunnel Vittoria, qui est l'axe central de la ville, est fermé après s’être effondré faute d’entretien. La gigantesque friche industrielle de Bagnoli est abandonnée depuis trente ans. Les rues sont congestionnées, les immeubles délabrés, les jardins envahis. (...) Écoles, poubelles, logements sociaux, forces de police, pompiers, jardins publics… rien n’est plus entretenu".

Naples, le tiers-monde ?

Cette expression, "tiers-monde", coince comme un os de poulet alla cacciatora en travers de la gorge des Napolitains. Le reportage n'est absolument pas méprisant, juste réaliste. Il n'oublie pas non plus de dire que la ville possède une Académie d'Apple. Mais les Napolitains ont le sang chaud. Avec – certes un petit temps de retard – la grogne s'est propagée sur les réseaux sociaux.

Elle s'est invitée à la une des journaux, elle a gagné tout ce que la ville compte de notables et de célébrités. "On ne sent pas offensés... mais enfin quand même, merci d'éviter les clichés", s'énerve le patron de la puissante Confédération des commerçants. Le maire à peine élu dénonce quant à lui un article "injuste" et réducteur. "Je pense aux touristes, aux amis, aux personnes à l’étranger qui viennent ici, cela signifie que Naples c’est vraiment autre chose."

Dans La Repubblica
, le consul de France appelé à la rescousse y va lui aussi de son couplet : "Naples n'est pas le tiers-monde, pas même au sens métaphorique. C'est tellement évident que ça ne devrait même pas être dit." Laurent Burin des Roziers rappelle que l'on parle "de l'une des destinations touristiques préférées des Français" (plus de 800 000 Français ont visité Naples en 2018).

Mais le clou du spectacle c'était samedi 20 novembre, au Parc des Princes, lors d’un match de football entre le PSG et Nantes. En signe de solidarité les supporters parisiens ont déployé une grande banderole en italien : "Le Figaro, carta da cesso !" (traduction idiomatique : "aux chiottes Le Figaro")

Cette polémique a tout de même relancé un vrai débat sur la dette de la ville. Car Naples est ruinée. Avec quasiment trois milliards d’euros de dettes fin 2020, elle a le plus fort endettement par habitant de toute l’Italie. D'autant qu'elle n’est plus capable de prélever l’impôt : il y a près de deux milliards d’impayés d’amendes, taxes et redevances diverses.

Le Figaro rappelle d'ailleurs dans son article que le nouveau maire n’a accepté de candidater qu’après l'assurance qu’un plan national pour éponger la dette de la municipalité serait mis en place. Les éditorialistes sont unanimes sur ce point : on n'a pas attendu Le Figaro pour le savoir mais oui, c'est une dette de pays du tiers-monde.

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