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66 milliards d'euros : le vaste chantier d'EDF pour moderniser le parc nucléaire français

Donner une seconde jeunesse à notre parc nucléaire, c'est le grand programme de check-up et de rénovation, mis en place pour remettre à niveau les standards de sûreté des équipements des centrales de notre parc historique. Une opération appelée "le grand carénage" qui doit être bouclée en 2028.
Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Au cœur de la centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-Eaux, dans le Loir-et-Cher. (GREGOIRE LECALOT / FRANCEINFO)

66 milliards d'euros, c'est le coût du grand programme de rénovation de notre parc nucléaire historique. EDF l'a nommé grand carénage, terme habituellement appliqué à la rénovation de la coque des navires. Ce grand carénage du parc historique est le plus important chantier industriel d'EDF, depuis sa création. À ce jour, son coût est plus élevé que le coût prévisionnel du programme de construction de la prochaine génération de centrales à EPR 2, évalué à une cinquantaine de milliards d'euros.

Et encore tous les réacteurs du parc ne sont-ils pas concernés. Il s'agit principalement de donner une seconde jeunesse à ceux qui ont été construits dans les années 70-80, qui développent une puissance de 900 MW, et certains plus récents, de 1300 MW. Le programme a été lancé en 2015, et doit être bouclé en 2028. Pour les réacteurs suivants, EDF n'a pas encore dévoilé son plan d'action.

Et pourquoi plus particulièrement ces réacteurs-ci ?

Il s'agit surtout de ceux qui passent leurs grandes visites des 40 ans. Chaque réacteur doit en passer une, tous les 10 ans, pour obtenir de l'Autorité de sûreté nucléaire le droit de fonctionner une décennie de plus. Il s'agit d'un examen en profondeur, qui nécessite un arrêt long, habituellement d'environ 100 jours.

EDF doit tout particulièrement vérifier trois points : d'abord la validité de la cuve, l'énorme pièce qui se trouve pour ainsi dire au fond du réacteur. Ensuite, l'étanchéité de l'enceinte de confinement du bâtiment réacteur. Et enfin, réaliser une vérification de la solidité du circuit primaire, c'est-à-dire le circuit d'eau qui est en contact avec le combustible nucléaire, donc contaminé, et qui ne doit absolument pas fuir. Si ces trois points ne passent pas l'examen, le réacteur ne peut plus continuer.

Berg-sur-Moselle dans le département de la Moselle. Le parc nucléaire historique français va être soumis à une rénovation très importante et coûteuse jusqu'en 2028. (Illustration) (MERTEN SNIJDERS / THE IMAGE BANK RF / GETTY IMAGES)

Mais pourquoi la visite des 40 ans est-elle particulière ?

Parce que 40 ans, c'est la durée de vie minimale que les concepteurs du parc ont fixé pour les réacteurs. Pour aller jusqu'à 50 ans, il faut un examen encore plus approfondi, avec des travaux de remise à niveau technologique lourds, notamment en matière de sureté. EDF, par exemple va poser des récupérateurs sous les cuves. En cas d'accident grave avec fusion du cœur, ils pourraient recueillir le combustible fondu. EDF en profite aussi pour désosser les énormes turbines Arabelle, celles qui transforment la chaleur en électricité, et remplacer des pièces de structure.

C'est pourquoi les visites du grand carénage peuvent être cinq fois plus chères que les précédentes et bien plus longues. À la centrale de Saint-Laurent-des Eaux, sur les bords de Loire par exemple, pas moins de 17.000 opérations sont prévues. 

Est-ce que cela permettra de faire durer encore plus longtemps les réacteurs du parc actuel ?

C'est la demande faite par Emmanuel Macron l'an dernier, lors de son discours à Belfort. L'acte de renaissance du programme nucléaire. Il a rompu avec la politique de réduction de la part du nucléaire dans la production électrique lancée par François Hollande. Le rapport de la commission parlementaire sur l'indépendance énergétique de la France a sévèrement critiqué les choix faits à l'époque, après Fukushima. Et les députés ont également demandé que le passage des 50 ans soit mieux préparé.

Aller jusqu'à 60 ans de fonctionnement, et même au-delà, n'est plus un tabou, disent plusieurs responsables d'EDF, notant que d'autres pays, comme les Etats-Unis le font, mais comme le montre le programme de grand carénage, cette longévité aura un coût important.

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