Le rendez-vous du Particulier. Vous avez gratuitement travaillé pour votre ex et vous n'avez pas assez cotisé pour votre retraite. Que faire ?
Vous avez voulu rendre service à votre ex-compagne ou compagnon, en travaillant gratuitement pour elle ou lui, et vous le regrettez aujourd'hui car vous n'avez pas cotisé pour votre retraite.
Vous avez longtemps travaillé pour le compte de votre ex-compagne ou compagnon. Et vous avez travailler gratuitement pour lui rendre service. Vous n'avez perçu aucune rémunération et donc, vous n'avez pas cotisé pour votre retraite ou pour le chômage. Diane de Tugny a signé une enquête sur ce dossier dans le mensuel Le Particulier. Nous allons essayer d'y voir plus clair dans ce domaine.
franceinfo : D'abord, est-il encore possible d'obtenir réparation ?
Diane de Tugny : En principe oui, si vous avez assez d’éléments pour prouver que votre travail a dépassé une simple entraide familiale, par son importance. Vous pouvez envisager deux types d’actions :
- soit votre travail a toutes les caractéristiques d’un véritable contrat de travail et vous pouvez agir devant le Conseil de Prud’hommes, pour obtenir les sommes qui vous sont dues à ce titre,
- soit ce n’est pas le cas, et vous pouvez envisager de saisir le TGI/tribunal judiciaire, à compter de 2020, pour demander une indemnité pour "enrichissement injustifié".
Le mieux est de passer par un avocat qui examinera les preuves dont vous disposez et qui pourra vous conseiller la meilleure procédure à suivre. Il vous représentera ensuite devant les tribunaux.
Comment faut-il s'y prendre ?
Il faut d’abord envoyer une lettre recommandée à votre ex pour lui réclamer une indemnité. Bien détailler les faits, le travail fourni, les dates de travail, car cela sert ensuite de preuves. Donner également un délai pour répondre : 8 jours. L’idéal est de faire écrire cette lettre recommandée par un avocat pour donner plus de poids.
Peut-on saisir les Prud'hommes ?
Oui. À condition que le travail fourni ressemble à un véritable travail salarié :
Il faut un travail régulier (des horaires définis) et un lien de subordination (directives, contrôle des tâches effectuées, sanctions en cas d’inexécution). Exemple : épouse artisan, secrétariat à titre habituel pendant 13 ans : oui. Mais épouse qui assiste occasionnellement son mari dans son institut de chirurgie : non.
Si vous obtenez gain de cause, vous pourrez obtenir un rappel de salaires, une indemnité pour travail dissimulé, des indemnités de licenciement et de préavis.
Et si la procédure prudhommale n'aboutit pas, est-il possible de saisir un autre tribunal ?
Oui. Vous pouvez saisir le TGI/ tribunal judiciaire à compter de 2020. Vous pouvez le saisir, si votre action devant les prud’hommes n’a pas abouti, car les juges n’ont pas assimilé le travail fourni à un travail salarié.
Mais vous pouvez aussi le saisir directement, dans l’hypothèse où votre travail ne pouvait pas être assimilé à un contrat de travail, et du coup, justifier une action aux prud’hommes. Ce sera le cas, par exemple, s’il n’y avait pas de subordination. Le fondement de votre action ne sera pas le contrat de travail, mais "l’enrichissement injustifié" de votre ex. Il faudra prouver votre appauvrissement au profit de votre ex et démontrer que votre travail a dépassé votre contribution aux charges du ménage.
Les juges ont estimé, par exemple, qu’une femme qui avait géré un gîte appartenant à son compagnon pendant 18 ans avait droit à une indemnité : son activité était permanente, elle dépassait, par son importance, une simple participation aux charges du ménage, ou une simple contrepartie aux avantages qu’elle pouvait retirer de la vie commune.
Comment sera calculée l’indemnité ?
La loi prévoit que l’indemnité est au moins égale à la plus faible des deux valeurs de l'enrichissement et de l'appauvrissement. Et en cas de mauvaise foi de votre ex, les juges retiendront la plus forte de ces deux valeurs. Les sommes obtenues ne correspondront donc pas forcément aux sommes qui auraient dues être versées en tant que salaires.
Prenons l’exemple de la concubine qui avait exploité avec son concubin un gîte pendant 18 années : elle a obtenu 118 800 euros soit la moitié du SMIC sur 18 ans. Cette somme a pris en compte le fait que ses besoins courants avaient été couverts durant sa vie commune avec le propriétaire du gîte.
Vous retrouvez ce dossier dans le mensuel Le Particulier
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