Cours seulement le matin : Le vrai ou faux junior répond aux questions sur la pétition de Sensei des mots

L'ingénieur de 28 ans, très suivi sur TikTok, propose de concentrer les "matières principales" en matinée afin de consacrer les après-midi à des activités "ludiques" et "non obligatoires".
Article rédigé par franceinfo, Valentine Joubin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
La pétition du TikTokeur Sensei des mots propose de concentrer les matières principales des collégiens et lycéens le matin. (PHOTOALTO/ODILON DIMIER / BRAND X)

Plus de 300 000 signatures recueillies en un mois. La pétition du TikTokeur Sensei des mots qui appelle notamment à concentrer les cours des collégiens et lycéens entre 9 heures et 13 heures connaît un grand succès et relance le débat sur les rythmes scolaires.

Est-ce faisable ? Est-ce pratiqué ailleurs ? La ministre de l'Education a-t-elle réagi ? Les élèves des collèges du Sacré-Coeur à Marseille et Jules Ferry à Sainte-Geneviève-des-bois dans l'Essonne interrogent "Le vrai ou faux junior".

Une organisation déjà testée et pas approuvée

"Est-ce que ce choix risque d'impacter positivement ou négativement le niveau des élèves ?", se demande Timéo.

Si l'on se base sur la seule expérience menée et étudiée en France, la conclusion est que cela risque de ne pas avoir d'impact notable sur les résultats des élèves. Entre 2010 et 2012, près de 200 établissements, surtout des collèges, ont participé au dispositif "Cours le matin, sport l'après-midi". Environ 15 000 élèves ont testé cette organisation du temps scolaire. Conclusion : en termes de concentration, d'attention et de mémorisation, il n'y a pas eu de différence significative entre les élèves qui avaient cours seulement le matin et ceux qui avaient cours jusqu'en fin d'après-midi. Cela n'a pas non plus amélioré les notes. En revanche, l'attitude des élèves en a bénéficié : ils étaient plus sociables, plus respectueux des règles et plus autonomes.

L'Allemagne pratique déjà ce type de système

"Est-ce qu'il existe des pays qui pratiquent déjà ce système ?", interroge Enzo.

Oui, ce système est notamment pratiqué en Allemagne, comme le raconte Sébastien Baer, correspondant de franceinfo à Berlin : "Presque partout en Allemagne les cours commencent à 8 heures, durent 45 minutes, et se terminent à 13 heures. Les élèves rentrent ensuite chez eux pour déjeuner, il n'y a pas de cantine. Puis ils ont l'après-midi libre pour faire du sport ou des activités culturelles". Mais les collégiens et lycéens allemands ont des vacances d'été plus courtes que les élèves français : six semaines au lieu de huit. Par ailleurs, en Allemagne, le programme et les rythmes scolaires sont des compétences régionales, l'organisation varie donc beaucoup d'un territoire à l'autre.

On peut aussi citer les Etats-Unis où les élèves terminent rarement après 15 heures. Ce qui les oblige à commencer parfois très tôt. Par exemple, en Louisiane, les collégiens sont en cours à partir de 7h30.

Classes, cantine, transports à réorganiser et professeurs à recruter

"Est-il possible de réaliser ce changement pour tous les collégiens et lycéens en France ? ", se demande Maëllys.

Franceinfo a contacté plusieurs chercheurs en science de l'éducation et voici leurs remarques. Première contrainte : le calendrier scolaire. Les collégiens ont 28 heures de cours par semaine. Si on voulait les concentrer le matin, il faudrait six matinées de cours, du lundi au samedi. Ou alors il faudrait organiser l'année différemment : en allégeant le programme ou en réduisant les vacances. Deuxième contrainte : les moyens. Si l'on supprimait les cours l'après-midi, chaque professeur devrait faire quatre heures de cours tous les jours, il faudrait donc recruter plus d'enseignants. Mais aussi mettre plus de salles de classe à disposition, prévoir plus de cars scolaires le matin, et plus de places à la cantine. Troisième contrainte : organiser l'offre périscolaire. Il faudrait créer des lieux d'accueils pour les activités de l'après-midi et embaucher du personnel pour les encadrer. Cela risquerait de créer des inégalités entre les établissements et donc, in fine, entre les élèves.

Le seuil des 100 000 signatures

"Combien faut-il de signatures pour que cette pétition soit prise au sérieux ?" Cela dépend Lola de ce que tu entends par "prendre au sérieux".

Légalement, il n'y a pas de seuil de signatures qui obligerait le gouvernement à mettre en œuvre la mesure défendue dans une pétition. Mais il y a d'autres voies pour donner de la visibilité à une demande citoyenne. Toute personne majeure peut déposer une pétition sur la plateforme de l'Assemblée nationale ou du Sénat. Pour qu'elle soit mise en ligne et que les parlementaires l'étudient, il faut recueillir au moins 100 000 signatures.

On peut aussi, dès 16 ans, déposer une pétition sur la plateforme du conseil économique, social et environnemental (CESE). Si elle recueille plus de 150 000 signatures, le CESE doit alors rendre un avis sur le sujet dans un délai de six mois. C'est une sorte de rapport transmis au Premier ministre qui est libre ensuite d'en faire ce qu'il veut.

Et puis il y a aussi des pétitions, qui, sans l'aide des institutions, provoquent un débat dans la société. Ce fut le cas par exemple de l'Affaire du siècle pour appeler l'Etat français à agir davantage contre le réchauffement climatique. Elle avait dépassé les deux millions de signatures.

La ministre de l'Education a invité Sensei des mots... Avant de changer d'avis

"Est-il vrai que la ministre de l'Education a contacté le tiktokeur Sensei des mots ?"

Oui, c'est vrai. Mais elle a pris ses distances ces dernières heures. Mardi, dans une vidéo postée sur TikTok, Anne Gennetet annonçait que ses équipes avaient invité Sensei des mots à venir au ministère de l'Education nationale pour parler de la pétition. Et puis, jeudi matin, la ministre a publié un nouveau message, écrit cette fois, pour dire que finalement elle ne recevrait pas le TikTokeur. "J'ai découvert, dit Anne Genetet, des propos qui vont à l'encontre de mes valeurs et aux principes de la République". Anne Genetet ne précise pas la teneur de ces propos.

La ministre a proposé toutefois à toutes celles et ceux qui ont signé la pétition de "prendre la parole".

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