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Crise de l'hôpital : y a-t-il vraiment beaucoup de patients qui viennent aux urgences alors qu'ils n'en ont pas "vraiment besoin" ?

En plein crise de l'hôpital, le ministre de la Santé a annoncé un nouveau dispositif destiné à soulager les services d'urgence cet été : le "filtrage" des patients. L'objectif est d'accueillir aux urgences les patients qui en "ont vraiment besoin", a expliqué le ministre. Dans un rapport daté de 2017, des sénateurs dénonçaient pourtant "un faux problème" au sujet de ces passages aux urgences dits "inutiles".

Article rédigé par franceinfo, Joanna Yakin
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
L'entrée du service des urgences du CHU de Nantes (Loire-Atlantique), le 8 juin 2022. (MATHIEU THOMASSET / HANS LUCAS / AFP)

Le nouveau ministre de la Santé, François Braun, a donné des précisions sur le dispositif de "filtrage", prévu cet été dans les hôpitaux. Alors que les services d'ugences dénoncent le manque de personnel et de moyens, le ministre a expliqué que les patients seront triés "en téléphonant préalablement au Samu", pour les orienter vers "une prise en charge adaptée" et "quand ils vont se présenter aux urgences, ils vont être vus par un personnel paramédical qui va pouvoir les orienter".

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"Je pense que les Français comprendront que, quand on a une angine c'est mieux d'aller voir son médecin généraliste que d'aller dans un service d'urgence", a-t-il justifié. D'après François Braun, il s'agit "d'éviter la surcharge de nos services" et que "les personnes qui ont vraiment besoin de ce qu'on appelle le plateau technique, puissent y accéder beaucoup plus facilement et ne pas attendre".

Un "faux problème"

Dans un rapport d'information de la Commission des affaires sociales du Sénat publié en 2017, les élus expliquaient pourtant que la question des "passages inutiles aux urgences" était "un faux problème". Si les sénateurs ne nient pas l'existence de patients arrivant aux urgences "par confort", ils précisent que ce profil "demeure cependant loin d'être majoritaire".

Un rapport de la cour des Comptes avait estimé, en 2014, que ces patients pouvaient concerner environ 20% des passages aux urgences. Mais ce chiffre est à prendre avec des pincettes. Comme la Cour le précise elle-même, ce chiffre se base uniquement sur les cas recensés après une auscultation. "Une partie de ces patients était néanmoins susceptible de présenter des symptômes qui, avant la consultation par l’urgentiste, pouvaient laisser craindre une affection nécessitant des actes ou examens complémentaires", précisent-ils. En clair, ce chiffre ne permet pas de dire que la venue aux urgences était injustifiée pour 20% des personnes arrivées aux urgences. Ce qui fait dire aux sénateurs que "la notion de passage 'inutile' elle-même apparaît difficile à définir, sinon a posteriori".

Problème d'accès aux soins de ville

Le rapport des sénateurs pointe par ailleurs plusieurs problèmes en amont et citent une enquête de la Drees réalisée en 2014. Cette dernière met en évidence un problème d'accès aux soins de ville : 60 à 70% des patients venus aux urgences expliquent que leur médecin traitant n'était pas là ou qu'ils n'ont pas obtenu de place rapide pour un examen complémentaire. En clair, une majorité des patients arrivant aux urgences n'ont tout simplement pas d'autre choix. 

Le rapport évoque aussi "des services déstabilisés par l'urgence sociale". D'après l'un des médecins interrogés si l'urgence médicale n'est "pas systématique", la gravité sociale en revanche est "de plus en plus fréquente". Les élus rapportent toutefois "une évolution sociétale valorisant l'immédiateté de l'accès aux soins" avec l'existence de patients qui "souhaitent obtenir une réponse rapide à une question de santé". Ce phénomène apparaît toutefois "commun à l'ensemble des pays occidentaux, selon l'étude de l'OCDE", précisent les auteurs.

Ces tendances, ajoutées au vieillissement de la population, expliquent en grande partie l'explosion de la fréquentation des urgences. Les passages dans ces services ont quasiment doublé en 20 ans. Pour autant, le rapport d'information n'appelait pas à un "filtrage" des patients mais plutôt à "donner aux urgences les moyens d'accueillir l'ensemble des demandes".

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