Incendies : peut-on déterminer quelle part des feux de forêt est d'origine humaine ?

Face à la multiplication des incendies depuis le début de l'été, on entend souvent des responsables politiques affirmer que les feux sont majoritairement d'origine humaine, sans plus de précisions, ou avec des estimations variables." 80% des départs de feu sont d'origine humaine " disait en juillet la Première ministre Elisabeth Borne. Sur Twitter, le ministre de l'Ecologie indique : "Je souhaite rappeler que 95% des incendies sont d’origine humaine. Collectivement, adoptons les bons gestes et faisons preuve de vigilance pour protéger notre patrimoine naturel."

Des causes d'incendies pas toujours établies

Pendant de longues années , les causes de incendies n’étaient que peu connues, rappelle le guide de la délégation à la protection de la forêt méditerranéenne consacré à la recherche des causes des incendies. En moyenne et jusqu’en 1996, seules 30% des origines des feux faisaient l’objet d’une information dans la base de données statistiques PROMETHEE. De plus en plus et notamment depuis la canicule de 2003, ce travail de recherche des causes est documenté, à partir du travail d'équipes pluridisciplinaires, comme le rappelle le pôle judiciaire de la gendarmerie nationale.

Pour identifier les causes d’un feu de forêt, les enquêteurs sont aidés par des forestiers, des pompiers et des scientifiques. C’est ensemble qu’ils identifient la cause du sinistre. Pour cela ils observent les départs de feu, scrutent le terrain, recueillent des témoignages, repèrent les éventuelles odeurs d’hydrocarbures ou de gaz, les odeurs de décomposition, de caoutchouc ou de plastique. Ce travail vise à localiser l'origine d'un feu, en déterminer la cause et expliquer comment il s'est propagé.

Neuf feux sur dix d'origine humaine

C'est sur la base de toutes les données compilées année après année qu'on arrive à estimer qu'en moyenne neuf feux sur dix sont en France d'origine humaine. Un rapport du Sénat, rendu public le 3 août, précise qu' "à la différence de l'Amérique du Nord, où quatre feux sur dix sont d'origine naturelle (impacts de foudre sur l'humus), le facteur anthropique est prépondérant en Europe dans le déclenchement des incendies : en France, 9 feux sur 10 sont d'origine humaine, et 7 sur 10 à l'imprudence humaine ".

Les causes peuvent être liées à l'activité économique (chantiers de BTP, activités agricoles, dilatation de cables électriques) ou à des activités du quotidien (mégots de cigarette, barbecue et feux de camps, incendies de véhicules ou de poubelle), ainsi que le détaille le ministère de l'Ecologie. 

Des actions de prévention existantes mais à renforcer

S'il existe déjà des actions de prévention et campagnes de sensibilisation, le récent rapport du Sénat intitulé "Feux de forêt et de végétation: prévenir l'embrasement" recommande de " renforcer très largement les moyens affectés à la communication ", à hauteur de ce qui est fait par exemple pour la sécurité routière. Il conseille de le faire en plusieurs langues afin de toucher également les touristes et de le faire également en dehors de la période estivale. 

Il pourrait par exemple être intéressant, écrivent les sénateurs, de montrer " concrètement en quoi consiste un débroussaillement dans les normes. Cela devrait se faire en présence des élus, qui doivent être sensibilisés et formés, y compris dans les zones aujourd'hui peu exposées, et qui pourraient ensuite être le relais de ces bonnes pratiques ".

Le rapport suggère aussi de sensibiliser les particuliers aux conséquences des jets de mégots, par exemple sur les aires d'autoroute, de mettre en place une sensibilisation dès l'école, degénéraliser la formation de jeunes du Service national universel afin de sensibiliser les promeneurs en forêt et aider à surveiller les massifs. Il recommande enfin de rendre les sanctions plus claires et dissuasives et d'étendre l'interdiction de fumer à toutes les forêts particulièrement exposées aux risques d'incendies.