Le vrai du fake. Un passeport européen acheté à Chypre et la rumeur d'un macaron pour les seniors qui conduisent
Vrai ou fake ? Marie Colmant et Antoine Krempf passent au crible deux infos repérées sur le web et les réseaux sociaux.
Le vrai : on peut s’acheter un passeport européen
La transaction discrète mais florissante a été révélée, il y a 48 heures, par de nouvelles fuites de câbles diplomatiques. On apprend que la République de Chypre, membre de l’Union Européenne, négocie depuis 2013 des passeports de l’Union européenne contre argent comptant. Une sorte de "golden passeport", qui va bien au-delà du "golden visa", une pratique déjà bien ancrée au Royaume-Uni ou au Portugal, et qui garantit à l’investisseur étranger, ou à un individu, un droit de résidence dans le pays, et à terme la citoyenneté. Le golden visa portugais est très demandé au Brésil ces derniers jours, en particulier par les big boss des sociétés pétrolières mouillés jusqu’aux yeux dans les scandales de la corruption liés à Petrobras. Très prévoyants, une demi-douzaine de grands patrons s’étaient offerts, depuis deux ans, des maisons de campagne au Portugal. Ce qui se passe à Chypre est d’une autre nature, parce qu’il offre le passeport, c’est à dire directement la citoyenneté.
Qui en a bénéficié ?
Les mêmes câbles ont révélé quelques noms parmi lesquels on retiendra une quantité d’hommes d'affaires russes, un entrepreneur qui aurait fait construire une maison pour Poutine à 350 millions de dollars, les fondateurs d’une banque russe en Ukraine qui seraient un peu partis avec la caisse, soit 4,2 milliards de dollars. Un homme d’affaires syrien, ami du régime, qui serait l’image même de la corruption, Rami Makhlouf, le cousin de Bachar al-Assad, en a bénéficié aussi avant de la perdre, et j’en passe.
Tout cela est parfaitement légal, mais tout de même très planqué
À l’exception de Malte qui vend le passeport maltais 500 000 dollars, mais qui publie annuellement la liste des heureux élus, ni le Portugal, ni le Royaume Uni, ni aucun des pays concernés n’ont accepté de fournir cette liste qu’on découvre aujourd’hui. C'est un business très rentable, en tout cas pour le pays, et notamment pour Chypre qui a beaucoup de mal à se relever des conséquences de la crise de 2008. Depuis 2013, 400 passeports chypriotes ont été vendus, rapportant à l’île, la partie grecque s’entend, environ 4 milliards de dollars. À Chypre, on se défend évidemment, avançant le fait que cet argent vient d’investisseurs sérieux dont on a vérifié les antécédents, réellement intéressés par l’avenir de Chypre et l’épanouissement de la culture chypriote.
Le fake : pas de macaron pour les seniors au volant
Une rumeur tourne depuis plusieurs mois sur le réseau social Facebook. Elle assure que les conducteurs de plus de 70 ans devront apposer un macaron à l'arrière de leur voiture à partir du mois de septembre 2017. Ce macaron blanc comportera la lettre "S", comme le "A" pour les apprentis conducteurs. Une association aurait lancé cette initiative pour permettre aux conducteurs seniors de se signaler sur la route et l'idée aurait été reprise par la prévention routière. Elle serait désormais sur le bureau du ministre des Transports. "On n'a jamais soutenu un truc pareil", s'amuse Emmanuel Renard, directeur de l'éducation et de la formation à l'Association prévention routière (APR).
Les seniors ne sont pas plus accidentés que les autres, ils sont plutôt sous accidentés donc il n'y a vraiment aucune raison de les stigmatiser
Emmanuel Renard, directeur de l'éducation et de la formation à l'Association prévention routière (APR)à franceinfo
Quant au gouvernement, il n'a aucunement l'intention de mettre un tel dispositif en place. "Il n'y a aucune espèce de réforme dans les tuyaux pour obliger les personnes à apposer un tel macaron sur leur voiture", assure Emmanuel Barbe, le délégué interministériel à la sécurité routière. Il rappelle cependant que ceux qui souhaiteraient coller ce macaron sur leur lunette arrière sont libres de le faire.
La visite médicale obligatoire, une autre rumeur
Le texte qui circule sur Facebook explique aussi que beaucoup de pays en Europe imposent des visites médicales aux conducteurs seniors et que cette réglementation va arriver en France. "Souvent, les autorités de ces pays nous disent que c'est un système dont l'efficacité n'est pas du tout prouvée", répond Emmanuel Barbe. "Comment faites-vous pour faire passer autant de visites médicales de bonne qualité à autant de gens ?", s'interroge-t-il. Il explique que le gouvernement s'oriente plutôt pour l'instant vers une réflexion sur les mobilités. "Par exemple, des préconisations de ne conduire que le jour ou de recourrir le plus possible au covoiturage. Ces méthodes sont plus respectueuses de ce qu'est la vérité, c'est-à-dire que les personnes âgées sont d'abord des victimes sur les routes."
En résumé : pas de macaron, pas de visite médicale imposée pour les seniors, aucune limite d'âge pour rouler, sauf cas exceptionnel. C'est toujours au conducteur de décider de prendre le volant "à condition qu'il puisse exécuter sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent", comme le dit un arrêté d'août 2010.
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