Vrai ou faux
Élections européennes : y a-t-il en moyenne 70 lobbyistes par eurodéputé, comme l'affirme Manon Aubry ?

En campagne pour les élections européennes, la tête de liste La France insoumise Manon Aubry assure qu'il y a "en moyenne 70 lobbyistes par député européen". C'est vrai. Le lobbying est légal et fait partie intégrante du fonctionnement des instances européennes.
Article rédigé par Lise Roos-Weil
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Manon Aubry, eurodéputée et tête de liste LFI aux élections européennes, le 16 avril 2024. (VINCENT MICHEL / OUEST-FRANCE / MAXPPP)

"Bruxelles, c'est lobbyland". En campagne pour les élections européennes, la tête de liste pour La France insoumise, Manon Aubry, assure, mardi 23 avril, qu'il y a "en moyenne 70 lobbyistes par député européen". Vrai ou faux ?

Environ 50 000 lobbyistes pour 705 eurodéputés

C'est vrai. Il y a exactement 12 425 organisations enregistrées comme lobby à Bruxelles, d'après le dernier rapport du "registre de transparence", qui les répertorie. Environ 50 000 lobbyistes travaillent pour ces organisations,  d'après le dernier recensement du Parlement européen. Un chiffre avancé également par l'ONG anti-corruption Transparency International. Si l'on divise 50 000 par le nombre d'eurodéputés (705 eurodéputés sur le mandat en cours), on obtient bien une moyenne de 70 lobbyistes par député européen.

Ces lobbyistes n'échangent pas uniquement avec les membres du Parlement, mais aussi avec la Commission ou le Conseil européen. Ce sont des entreprises (comme Google ou L'Oréal), des syndicats, des associations (comme l'Institut Pasteur) ou encore des universités. Ils cherchent à influencer les décisions prises au sein des institutions européennes.

Une activité légale et encadrée

Cette pratique est légale, elle fait même partie intégrante du fonctionnement des instances européennes. Les représentants politiques écoutent différents points de vue et reçoivent des éclairages particuliers sur certains sujets. Les lobbyistes organisent donc des petits-déjeuners ou des conférences. Ils écrivent des communiqués et rédigent même parfois des propositions d'amendements prêtes à l'emploi.

Le lobbying a Bruxelles est encadré. Il y a notamment un "registre de transparence", commun au Parlement, à la Commission et au Conseil européen depuis 2011. Il s'agit d'une base de données qui recense les lobbies et leurs activités. Les organisations doivent renseigner leurs intérêts, leurs dépenses, leurs sources de revenu. L'objectif est d'informer les citoyens. Les lobbys inscrits sur ce registre s'engagent à respecter un "code de conduite", qui stipule, par exemple, qu'il est interdit de "faire pression" sur les représentants politiques ou d'acheter leurs voix. Des enquêtes et des sanctions sont également prévues pour les lobbies inscrits sur le registre et qui ne respectent pas les règles.

Les limites du contrôle

Après le scandale de corruption du "Qatargate", pour lequel des eurodéputés et leur entourage sont soupçonnés d'avoir reçu de l'argent du Maroc et du Qatar en échange de décisions européennes en leur faveur, l'encadrement des lobbies a été renforcé. Les eurodéputés, par exemple, doivent désormais déclarer leurs rencontres avec les lobbyistes. Certaines activités sont par ailleurs interdites au sein des institutions européennes sans être inscrites sur le "registre de transparence", mais il reste des angles morts : pour obtenir un badge au Parlement ou pour rencontrer des commissaires, il faut être inscrit sur ce registre, mais ce n'est pas obligatoire, par exemple, pour prendre un verre en tête à tête avec un eurodéputé dans un café de Bruxelles. La Cour des comptes européenne vient de rendre un rapport soulignant les limites du "registre de transparence".

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