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La vie des femmes Haredim

En Israël, certains femmes refusent d'être soumises aux extrémistes religieux. Corine Goldberger, de Marie-Claire s'est rendue sur place afin de rencontrer ces femmes de la communauté des Haredim.
Article rédigé par franceinfo
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Haredim signifie  "les craignant-dieux".  Ils représentent
de 7 à 8% de la population du pays. Ils vivent un judaïsme très
rigoriste, parce qu'ils appliquent strictement la "halakha", la loi
juive. On les reconnaît à leurs vêtements : tout en noir pour les hommes,
avec des chapeaux ronds et des papillotes. Les femmes portent des jupes
sombres plissées aux chevilles sur des collants épais même en plein été”, (le
pantalon est interdit), des talons plats et  des chemisiers austères
pour cacher ses bras. Sans oublier la  traditionnelle perruque de la
femme mariée, les cheveux étant considérés comme faisant partie de la nudité,
et montrés uniquement au mari. La tenue doit être  “pudique”,
“modeste”, conforme à la loi religieuse, dans son application la plus
stricte. Ils vivent coupés de la modernité, du monde laïc.

Ils  n'ont pas de télé, ne vont jamais au
cinéma, pas de livres ou de journaux profanes. Ils évitent au maximum le
contact avec le monde laïc. Ils vivent  claquemurés dans
leurs quartiers comme Mea Shéarim, à Jérusalem,
habillés comme les juifs Lituaniens d’il y a trois
siècles, ils  parlent le Yiddish entre eux, comme les juifs d’Europe
centrale au 18 ou 19e siècle. Quand ils rencontrent une femme,
les hommes détournent  la tête, et insultent,
toute passante qui arbore une tenue “impudique” (bras nus, jupe
trop courte…). Les hommes étudient la Bible, à plein temps ou à
mi-temps, et les femmes qui ont beaucoup d'enfants, travaillent pour faire
vivre la famille et permettre à leur mari d'étudier, ce qui est considéré comme
un honneur. Ils sont concentrés dans des quartiers comme Bnei-Brak
ou sud de Tel Aviv, ou Meah Shearim à Jérusalem.

Sous la pression d’une minorité très
agressive, les tentatives d’exclusion des femmes de l’espace public
ne cessent de se multiplier. A Jérusalem, les Haredim  obligent
les femmes à s’asseoir (ou à rester debout) à l’arrière des bus des lignes
qui traversent leurs quartiers, tandis qu’eux, les hommes, s’assoient
confortablement devant,  en vertu de la séparation des sexes
qu’ils entendent imposer. Toujours plus loin dans l’extrémisme,
des femmes juives, ultra-minoritaires mais très voyantes arborent
désormais un voile intégral. Mais ce qui a scandalisé tout Israël, ce
sont les larmes d’une blondinette à lunettes âgée de 8 ans,
Naama Margolis,  une écolière de Beit Shemesh. Dans ce
bastion religieux extrémiste, des hommes en noir lui ont craché
dessus et l’ont insultée sous prétexte qu’elle n’était pas vêtue assez 
"modestement", comme une petite ultra-orthodoxe. 

Cette radicalisation pousse les femmes ultra-orthodoxes à
quitter leur communauté. Certaines veulent faire des études solides, ingénieur par exemple.
Mais le seul avenir possible pour les filles souvent, c’est  éducatrice
de jeunes enfants, ou enseignante dans des écoles qui ne permettant
pas de passer le bac et d'aller à l'université.

L'autre  raison qui les pousse à partir, c'est que les Haredim
se marient jeunes, vierges, avec des garçons que parfois elles ont rencontré
une ou deux fois, et pas forcément en tête à tête. Ce sont des mariages
arrangés par les parents. Elles peuvent refuser un garçon, mais elles ne
peuvent ni choisir elles mêmes, ni sortir avec un garçon. Enfin, autre
raison de partir, il y a la vie avec ce mari qu'elles connaissent à peine,
et avec qui elles se retrouvent au lit un jour.
La vie sexuelle est
très réglementée, et en particulier, les couples respectent les lois très
strictes de la pureté. Pendant les règles et sept jours après, un mari
n'approche pas de sa femme, ne l'effleure même pas. Tout ça est très
lourd, même si paradoxalement, il y a  beaucoup de femmes qui
paraissent épanouies dans ce système, parce qu'elles ont été éduquées à
trouver que c'est bien, c'est la loi religieuse. Et puis, quand
ça se passe bien, c'est parce que les jeunes mariés ont fait leur
apprentissage sexuel et amoureux ensemble. 

Lorsqu'elles décident de partir, elles sont reniées par leur famille qui se
sent déshonorée. Pourtant, elles ne tournent pas forcément le dos à la
religion parce qu'elles ont décidé de vivre leur vie. Souvent, elles ont
des difficultés à refaire leur vie parce que leur mari refuse de
leur donner le guet, qui est l'acte par lequel il reconnait qu'il accepte
le divorce religieux. Quand on sait qu'il n'y a pas de mariage laïc en Israël,
le refus du guet équivaut à leur interdire de se remarier. 

L'association Hillel, qui a un bureau à Jérusalem et Tel
Aviv, compte environ environ 250 volontaires, qui
aident  tous les ans une centaine de religieux à changer de vie, à s’adapter à une société moderne dont ils ne
connaissent pas les codes. On les aide à trouver
un logement, du travail, à  poursuivre des études aussi.
On y donne aussi des conseils juridiques aux femmes pour
leur éviter de faire les frais de la vengeance de leur ex mari.  

 

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