Accord pour sauver Chypre, tout reste à faire
L'optimisme affiché par les marchés financiers asiatiques (la bourse de Tokyo a gagné près de 2%) pourrait ne pas refléter la situation réelle et les prochains jours risquent de le montrer. Certes, l'accord intervenu est important car il sauve le pays de la faillite et Nicosie va recevoir à partir du mois de mai les 10 milliards d'euros promis par l'Europe. Il faudra auparavant faire table rase du système bancaire existant : la deuxième banque du pays (la Laïkii) va être liquidée et scindée en deux : une ''good bank'' (bonne banque) qui accueillera les comptes inférieurs à 100.000 euros garantis par l'Union européenne, et une structure de défaisance (une bad bank) qui récupérera tous les avoirs supérieurs à 100.000 euros non assurés. Pour le reste, l'impôt sur les sociétés va augmenter de 10 à 12%, il y aura des privatisations... il faut en effet trouver 6 milliards d'euros supplémentaires. Or, l'idée d'une taxe sur les dépôts est - pour l'instant - écartée.
La principale préoccupation aujourd'hui pour Chypre est de devoir faire face à une éventuelle fuite de capitaux.
Il faudra observer de très près la réaction des russes qui sont les plus gros clients des banques chypriotes (ils détiennent près de la moitié des 70 milliards de dépôts, et pas uniquement de l'argent très propre). Mais vendredi, le Parlement chypriote a verrouillé le système en votant une loi qui instaure le contrôle des changes. Un précédent en Europe. Cela n'a jamais existé. L'information est passée pratiquement inaperçue mais pour certains observateurs, Chypre orchestre ainsi une sortie virtuelle de la zone euro.
C'est aussi une sacrée leçon pour l'Europe !
Si Bruxelles ne tire pas une fois pour toutes les conclusions de ce qui vient de se passer, c'est à désespérer du sens commun. On sait désormais que les économies casinos délirantes comme Chypre n'ont plus lieu d'être. Qu'est-ce que cela veut dire pour le business modèle de Luxembourg et Monaco ? Affaire à suivre. Pour les prochains entrants dans l'Union, le message est clair : Etats véreux ou peu scrupuleux s'abstenir. Ensuite, l'Europe va devoir rétablir notre confiance dans le système bancaire, notamment sur la garantie des dépôts inférieurs à 100.000 euros. Cette règle présentée comme intangible n'est valable que si l'Etat en question est solvable car c'est lui qui se porte garant de cet engament. Enfin, communication désastreuse... : si le Président de l'Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem gère la zone euro comme il a géré la crise chypriote, ce n'est pas vraiment de bonne augure.
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