La fusion entre les bourses de Francfort, Paris et New York a du plomb dans l'aile
L’affaire peut paraître technique mais il n’en n’est rien. C’est simplement l’histoire d’une fusion entre deux entreprises : la bourse allemande et NYSE-EURONEXT (la structure qui gère les bourses de New-York, Paris et Bruxelles notamment). Le mariage de ces deux opérateurs vise à créer la plus grande plateforme d’échanges financiers au monde. Seulement voilà, le Commissaire européen à la Concurrence, Joaquim ALMUNIA, ne l’entend pas de cette oreille. Il a jusqu’au 9 février pour se prononcer.
Pourquoi est-il hostile à cette opération ?
Il y a à la fois les non dits psychologiques et les raisons officielles discutables. Dans le contexte actuel de crise liée à la sur-financiarisation de l’économie, si elle autorise la naissance de ce mastodonte, Bruxelles a peur de tendre à l’opinion publique de nouvelles verges pour se faire battre. Et puis il y a la raison officielle : le Commissaire européen estime que le nouveau groupe aurait une position dominante en Europe, notamment sur la gestion des produits dérivés.
Ces arguments ne tiennent pas à vos yeux ?
Ils ne sont pas faux sur le fond mais relèvent plus d’une vision politique que stratégique. Je vois trois points critiques. D’abord : le déni de l’enjeu industriel face à la montée des marchés émergents. Le rapprochement des deux opérateurs permettrait de créer une structure solide, capable de résister aux places financières de plus en plus nombreuses qui voient le jour dans les pays émergents. Les bourses de ces pays, peu scrupuleux, représentent aujourd’hui 15% des transactions financières à l’échelle mondiale et le mouvement ne risque pas de s’arrêter à cause de Bruxelles elle-même. En 2007, les européens ont concocté ce que l’on appelle la directive sur les Marchés d’Instruments Financiers (la directive MIF qui est en train d’être révisée). Au nom de la liberté de la concurrence, cette directive a laissé les marchés se fragmenter avec pour conséquence d'opacifier le métier. Le rapprochement DEUTSCHE-BORSE/ NYSE-EURONEXT ferait œuvre de clarification, servirait de garde-fou.
Vous évoquiez un troisième point.
L’occasion manquée pour le financement des entreprises, notamment des ETI, les Entreprises de Taille Intermédiaire, qui, avec les PME, créent l’emploi en France. 600 PME, dont 260 ETI, sont déjà financées via EUROEXT... la fusion augmenterait cette force de frappe. Verdict donc d'ici le 9 février... si Bruxelles dit non à la fusion NYSE/DEUTSCHE BORSE, elle satisferait les banques qui sont concurrentes sur certains métiers, et ne règlerait en rien l'offensive des marchés opaques. Très étrange, à l'heure d'une nécessaire meilleure régulation.
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