Quand le Yuan s'éveillera
Cela sera certainement le phénomène de l'été, très probablement celui de la rentrée, des mois et des années à venir. On en parle peu car le Yuan est loin de nos préoccupations quotidiennes, surtout lorsqu'il s'agit d'aller acheter sa baguette ou faire ses courses au supermarché. Pourtant, le mouvement est bel et bien engagé : le Yuan – que l'on appelle aussi le Renminbi – est désormais la deuxième monnaie internationale derrière le dollar et devant l'euro. Elle se trouve au coude à coude avec le franc suisse !
Flambée
L'histoire le montre, la puissance d'une monnaie est relative au leadership, à l'influence, du pays qui l'émet. Et la Chine s'apprête à devenir la deuxième économie mondiale après les Etats-Unis. Rien ne peut donc freiner cette ascension du Yuan.
La question est de savoir si un jour il y aura une bascule, le Yuan passant devant le dollar. Un universitaire chinois n'hésite pas à parler de "désaméricanisation" de l'économie mondiale. Nous n’y sommes pas encore mais les grandes capitales suivent cela de très près.
Selon un rapport publié jeudi 10 juillet par l'influent Institut de la Finance Internationale (le lobby bancaire mondial), l'utilisation du Yuan sur les marchés de la planète a doublé en un an. Elle représente désormais 12% des flux mondiaux contre à peine 3% en l'an 2000.
Une chambre de compensation
Cette situation crée une vive concurrence entre places financières européennes. Après le Luxembourg, l'Allemagne et la Grande-Bretagne, la France va bientôt accueillir une chambre de compensation, une structure bancaire en quelque sorte, qui permettra de régler les paiements en Yuan de façon sûre et efficace au sein de la zone euro. Paris est déjà un grand pôle bancaire pour les dépôts en monnaie chinoise – on parle de 20 milliards de Yuan – dont une partie provient de transactions entre la Chine et l'Afrique.
Ce mouvement suit, en réalité, deux objectifs. Pour les Européens en général et les Français en particulier, c'est l'occasion d'entretenir des relations et de développer le business avec la future deuxième économie mondiale. Les sociétés d'assurance, banques, sociétés de gestion et fonds d'investissements français pourront ainsi d'autant mieux investir directement sur le marché financier domestique chinois et y développer leurs activités.Pour Pékin, c'est l'occasion de faire travailler à l'étranger ses milliards de réserves de changes et de diversifier les risques, notamment face aux Etats-Unis dont la Chine semble peu apprécier en ce moment la politique de la réserve fédérale.
Risques
Il faut attendre de voir si le Yuan va réellement s'imposer comme une monnaie d'échange sur le long terme, ou plutôt comme une monnaie de réserve, sécurisante, vers laquelle on se tourne face aux soubresauts du dollar et de l'euro.
Autre élément non négligeable : l'environnement juridique chinois est moins rassurant que le dispositif américain. Une chose est certaine : nous n’en avons pas terminé avec la guerre des monnaies que prédisent beaucoup d'économistes.
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