À Cuba, après les manifestations de juillet, des procès en série, y compris pour des mineurs de moins de 18 ans
Des dizaines de manifestants qui ont défié le régime cubain en juillet 2021 sont poursuivis par la justice. De nombreux mineurs figurent parmi les accusés. Leurs conditions de détention sont sources d'inquiétude.
Le procès de 33 manifestants s'est ouvert lundi 31 janvier pour une semaine au tribunal de La Havane (Cuba). Six d’entre eux ont moins de 18 ans. Tous comparaissent pour "sédition", autrement dit pour avoir défié le régime communiste lors des manifestations du 11 juillet 2021. La foule s’était alors réunie aux cris de "Liberté" et "Nous avons faim" dans le quartier du 10-Octobre, dans la capitale cubaine.
Quelques milliers de personnes seulement, cela parait peu dans un pays de 11 millions d’habitants mais c’était sans précédent depuis soixante ans. Quelques incidents avaient alors éclaté avec les forces de l’ordre devant une boulangerie du quartier, le Toyo. Depuis, ces manifestants sont surnommés "le groupe de Toyo".
Jusqu’à la fin janvier, on ignorait le nombre de personnes arrêtées lors des affrontements. Le bureau du procureur a enfin levé le voile : 790 personnes sont en détention provisoire, dont 55 mineurs, et 172 autres personnes ont déjà été condamnées dans la plus grande discrétion. Cette fois-ci, les réseaux sociaux et les mouvements de contestation du régime ont appris la tenue des procès et les ont rendus publics. Des familles des accusés ont donc essayé de se réunir autour du tribunal lundi mais elles ont été dispersées et Internet a été coupé dans tout le quartier.
Une cinquantaine de mineurs poursuivis
Au total, 55 mineurs sont donc poursuivis. Ils sont tous âgés de 16 à 18 ans parce qu’à Cuba la majorité pénale démarre à 16 ans. Mais leurs conditions de détention sont en contradiction avec la Convention de l’ONU relative aux droits de l’enfant que Cuba a signée et ratifiée. Elle prévoit notamment que tout enfant détenu puisse recevoir des visites de sa famille. Selon plusieurs témoignages, ce n’est pas le cas. Nombre de ces mineurs ont été empêchés de voir leurs familles. Certains ont été victimes de torture, comme des ongles arrachés. D’autres, malades, n’ont pas pu voir de médecin. Tous risquent jusqu’à 23 ans de prison.
S’il y a beaucoup de jeunes parmi les personnes arrêtées, c’est parce que le mouvement de contestation a été initié essentiellement par les artistes et les musiciens, notamment les rappeurs. Avec un clip qui depuis près d’un an fait un carton à Cuba : Patria y vida, "la patrie et la vie" en Français, une référence ironique au slogan castriste "La patrie ou la mort". Le clip a été vu 10 millions de fois.
Le castrisme perdure après Castro
Ces procès sont le signe que le régime n’a pas renoncé à la répression. Avec l’arrivée au pouvoir de Miguel Diaz Canal et la fin de la dynastie familiale des Castro, on avait pu penser l’an dernier que le régime allait se libéraliser. Il y a bien eu quelques réformes, mais sur le fond, le régime reste le même : contestation interdite. Cuba connait d’extrêmes difficultés économiques car la pandémie s’est combinée au maintien de l’embargo américain mais le régime tient malgré tout. Le pouvoir accuse évidemment Washington d’orchestrer à distance tous les mouvements de contestation. Fidel et Raul Castro ne sont plus là, mais le castrisme leur a survécu.
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