Bras de fer entre Google et la Chine sur l'hymne de Hong Kong
Il y a deux hymnes de Hong Kong : l'hymne officiel de la Chine, La Marche des Volontaires ; et l'hymne officieux adopté par les militants pro-démocratie, Gloire à Hong Kong. Le gouvernement chinois et son représentant dans la ville John Lee reprochent à Google de favoriser sur son moteur de recherche, l'hymne officieux qui selon Pékin devrait être interdit. La presse officielle chinoise n'y va pas de main morte. Elle dénonce une attitude "malveillante et arrogante" de Google, une "instrumentalisation politique", une "prise en otage" des internautes.
Pour Pékin, c'est une question de droit : Hong Kong est chinoise, donc le seul hymne possible, c'est l'hymne officiel de la Chine. Le géant américain répond algorithme. Nous n'y pouvons rien, dit Google, si le chant officieux pro-démocratie sort systématiquement en tête des recherches. C'est un effet mathématique, on ne peut pas le contrer. Et l'ironie de l'Histoire, c'est que plus le pouvoir chinois alimente la controverse, plus il y a d'articles sur Internet sur l'hymne officieux, plus l'algorithme le favorise. C'est ce qu'on appelle l'effet Streisand.
L'hymne pro-démocratie joué lors de compétitions sportives
Google n'est pas accessible en Chine, mais le demeure à Hong Kong. Donc, dans l'esprit de Pékin, ça peut nourrir le sentiment antichinois dans la ville. Ensuite, le fait est que la chanson, composée par un anonyme pendant les grandes manifestations de 2019, est explicite. Que dit-elle ? "Pourquoi cette Terre est-elle à nouveau envahie de larmes ? Nous surmontons nos peurs par le courage, gardez la tête haute, refusez de rester silencieux, nous espérons que la liberté reviendra…" Inévitablement, ça énerve Pékin.
Google est évidemment accessible dans le reste du monde, et cela a conduit ces derniers mois à des incidents dans des compétitions sportives. Notamment lors de matches internationaux de rugby à 7, où Hong Kong possède une équipe. À plusieurs reprises depuis l'été 2002, c'est l'hymne pro-démocratie qui a été joué au début de la rencontre. Selon toute probabilité, parce que les organisateurs ont utilisé Google pour trouver l'hymne. La dernière fois, c'était fin novembre en Corée du Sud. Si on ajoute qu'en septembre, lors d'un match de football à Hong Kong, l'hymne chinois (l'officiel cette fois) a été hué par les spectateurs, tout ça commence à faire beaucoup vu de Pékin.
La logique de la répression
En Chine, on ne plaisante pas avec l'hymne. D'ailleurs, la législation a été durcie. À Hong Kong, il y a désormais une loi spécifique sur le sujet : toute attitude "irrespectueuse" envers l'hymne national chinois peut vous faire encourir jusqu'à trois ans de prison. Début novembre, une femme de 42 ans a été condamnée, dans ce cadre, à trois mois d'incarcération. Sa faute est d'avoir brandi en public un drapeau de l'époque où Hong Kong était britannique, le tout après la victoire d'un athlète de Hong Kong, aux Jeux olympiques de Tokyo en juillet 2021. C'est à l'image de la répression globale qui s'est abattue sur toute la société civile de Hong Kong : Pékin ne laisse rien passer.
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