Espagne : "la guerre de la tomate" avec la France, relancée par Ségolène Royal

La semaine dernière l'ancienne ministre française a qualifié "d’immangeables", les tomates espagnoles "soi-disant bio". Des propos qui ont suscité la colère unanime des syndicats agricoles en Espagne.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Ségolène Royal, à Mulhouse, le 26 novembre 2023. (DAREK SZUSTER / MAXPPP)

On ne parle que des propos de Ségolène Royal ou presque de l’autre côté des Pyrénées, où l’on accorde visiblement encore beaucoup de crédit à l'ancienne ministre française. Cette dernière a qualifié les tomates ibériques "d'immangeables", sur le plateau de BFMTV, le 30 janvier.

En Espagne ces mots ont provoqué la colère unanime des syndicats agricoles et même réussi l’impensable : mettre d’accord  l’opposition espagnole. Celle-ci évoque "un chauvinisme de la tomate". Le chef du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, lui-même, a réagi à ces propos. "Pour répondre à une critique infondée de l’ancienne ministre Ségolène Royale, qui s’en est pris à la tomate espagnole, elle peut venir goûter n’importe laquelle de nos variétés. Et elle verra que la tomate espagnole est imbattable", a-t-il ironisé.

Si les Espagnols réagissent de façon aussi épidermique, c'est d'abord parce qu'à chaque débat sur la production agricole européenne des torrents de critiques s’abattent sur l’Espagne. Le pays est le premier producteur de fruits et légumes de l’Union européenne. Mais il est le deuxième, seulement, derrière l’Italie pour la culture des tomates. L'Espagne n'obtient que la deuxième place, également, pour la compétitivité du secteur, derrière les Pays-Bas, cette fois.

Pourtant, au cœur de la colère agricole, c’est bien à la frontière avec l’Espagne que des tensions sont apparues. Il y a quelques jours, des camions ont été renversés et leurs cargaisons détruites. Les Espagnols en ont ras le bol d’être stigmatisés. "Une ancienne ministre ne doit pas dévaloriser l’agriculture du pays voisin. Qu’ils règlent les problèmes qu’ils ont avec les agriculteurs français. Cette attaque est une nouvelle agression à notre agriculture. Maintenant, ça suffit, nous allons défendre notre tomate, qui répond aux mêmes normes qu’en France : celles de l’Union européenne", explique un producteur espagnol qui estime que les propos de Ségolène Royale sont déplacés.

Une surtransposition des réglementations

Les normes sont bien les mêmes pour tous les membres de l’Union européenne, mais elles viennent s’ajouter aux exigences de production du pays concerné. Pour les tomates bio espagnoles que Ségolène Royale qualifie "d’immangeables", leurs producteurs n’ont pas les mêmes contraintes qu’en France. C'est le problème de la surtransposition des réglementations, que les agriculteurs français ont beaucoup évoqué pendant leurs manifestations.

Le bio d’Espagne est donc le meilleur bio que l’on peut trouver... en Espagne ! Par exemple, avantagée par une loi nationale moins contraignante, la culture des tomates "issues de serres chauffées en hiver" a toujours été autorisée en Espagne. En France, une loi l’interdisait jusqu’à l’été dernier. Les critères sont donc en train de s’harmoniser pour le meilleur ou pour le pire.

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