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La justice internationale désavoue Londres sur les stratégiques îles Chagos

Tous les jours, dans "Un monde d’avance", un coup de projecteur sur une actualité à l’étranger restée sous les radars. Aujourd’hui, retour sur la décision de la Cour de justice internationale, qui a tranché en faveur du rattachement des îles Chagos à l'île Maurice.

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Les îles Chagos, dans l'océan Indien, ne sont peut-être plus britanniques pour longtemps. (GOOGLE MAPS)

Le lieu est tout petit par la taille mais le symbole géopolitique est énorme. La Cour internationale de justice a estimé lundi 25 février que l’archipel des Chagos est occupé de façon illicite par le Royaume-Uni et doit être restitué à l’île Maurice. Dit comme ça, ça n’a l’air de rien, mais les conséquences potentielles sont importantes. Les îles Chagos, c’est un confetti minuscule : 60 km² - plus petit que Belle-Île-en-Mer - au cœur de l’océan Indien, à peu près à mi-chemin entre l’Inde et l’Afrique.

Sauf que sur l’île principale, Diego Garcia, se trouve une grosse base militaire américaine. Les États-Unis louent l’emplacement au Royaume-Uni, propriétaire des lieux. Au milieu des années 1960, au moment où l’île Maurice voisine acquiert son indépendance, Londres décide de conserver les Chagos. Et, manu militari, les Britanniques en expulsent les 2 500 habitants, les Chagossiens, qui depuis ne cessent de clamer leur droit au retour. Après des années de contentieux, la Cour internationale de justice, la plus haute juridiction de l’ONU, a donc tranché en faveur du rattachement des Chagos à l’île Maurice.  

Un héritage de la colonisation

C’est un vrai revers politique pour Londres, d’autant que la Cour n’y va pas de main morte. Par 13 voix contre une, les juges demandent à Londres de rendre au plus vite l’archipel à l’île Maurice, afin que "s’achève la décolonisation". L’avis de la Cour n’est que consultatif mais il est tellement tranché que les Britanniques vont avoir du mal à se soustraire à la décision. C’est un camouflet pour Londres, a fortiori dans le contexte de la cacophonie du Brexit.

Pour l’île Maurice, c’est à l’inverse une grande victoire attendue depuis des années. Elle ouvre la voie à un retour des Chagossiens sur leur terre : cet exil forcé est vraiment un épisode dont les Britanniques ne sont pas fiers - ils le reconnaissent eux-mêmes.

Une base américaine sur la sellette

L’enjeu est de taille aussi pour Washington. La base américaine de Diego Garcia est idéalement placée sur le plan stratégique. Elle peut abriter des sous-marins, des porte-avions, des bombardiers furtifs. Et les Américains y ont investi trois milliards de dollars. Diego Garcia a servi de base arrière à de multiples opérations, notamment lors de la guerre en Irak. Le gouvernement de l’île Maurice semble disposé à poursuivre la location aux États-Unis mais à la condition préalable, évidemment, que Washington reconnaisse la décision de la justice internationale.

Cet épisode met aussi en lumière que l’avenir de ces grandes bases américaines disséminées dans le monde n’est pas assuré. Coïncidence de l’actualité, la population d’Okinawa, à l’extrême sud du Japon, s’est massivement prononcée dimanche 24 février par référendum contre le déplacement d’une base militaire américaine qui abrite 25 000 soldats. Les habitants d’Okinawa se disent lassés de cette présence militaire étrangère, héritage de la Seconde Guerre mondiale.    

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