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La révolte des Papous en Indonésie

A l'autre bout du monde, la Papouasie Occidentale est secouée par une révolte contre le pouvoir central indonésien. Et cette histoire, qui passe inaperçue en Occident, est fascinante à plusieurs titres.

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four, Édité par Thomas Pontillon
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Une manifestation à Fakfak en Papouasie Occidentale, le 23 août 2019.  (BEAWIHARTA / EPA)

Depuis le 19 août, et ça a recommencé lundi 26 août, toutes les villes de la province indonésienne de Papouasie Occidentale sont le théâtre de manifestations violentes contre les autorités indonésiennes. Cette zone est située à l’extrême est de l’Indonésie, au nord de l’Australie. Il s'agit d'un territoire grand comme la moitié de la France et peuplé pour moitié de Papous, la population autochtone d’origine. Ils sont plus de deux millions. 

Vu d’ici, avec un regard occidental un peu condescendant, on pourrait se dire que c’est vraiment un coin perdu. Il s'agit d'une erreur. Comment croyez-vous que la mobilisation s’est opérée ? Comme partout désormais dans le monde : par les réseaux sociaux. C’est ainsi que des milliers de Papous ont organisé leurs rassemblements quasi non-stop depuis une semaine. Et quelle a été la riposte du pouvoir central indonésien ? Couper Internet, d’abord partiellement puis totalement. Ça rend d’ailleurs très difficile l’accès aux informations sur les manifestations du jour.  

Des étudiants traités de singes et de cochons

Il y a aussi dans cette histoire un arrière-plan de racisme et c’est le deuxième aspect qui rend cette histoire édifiante. On est en présence, un fait assez rare, d’un racisme assumé de la part de certains membres des forces de l’ordre indonésiennes. Ce qui a mis le feu aux poudres, c’est une intervention policière et militaire dans un dortoir d’étudiants papous au cœur de la grande ville de Surabaya, sur l’île principale d’Indonésie, Java. Sur la vidéo, devenue virale, on entend des militaires traiter les étudiants de "singes", de "cochons" et de "chiens".

Pour les Papous, c’est très révélateur d’une politique qui les considère comme des citoyens de seconde zone. C’est pour cette raison que la colère a été immédiate et spontanée dans toutes les régions de Papouasie occidentale. Des bâtiments officiels ont été incendiés, des commerces et des banques ont été saccagés, il y a aussi eu des affrontements sporadiques avec la police. Le président indonésien a d’ailleurs dépêché 1 200 hommes en renfort et envoyé sur place le chef de la police et celui de l’armée.  

Un relent de colonialisme

Cette population papoue demande au minimum d’être mieux considérée, et au maximum d'obtenir l’indépendance. C'est là le troisième aspect intéressant dans cette histoire, il s’agit de colonialisme récent. La Papouasie est une grande île qui a été coupée à la fin des années 60 et au début des années 70. La partie est a obtenu son indépendance : c’est la Papouasie Nouvelle Guinée. La partie ouest, après le départ des Néerlandais, a été annexée par l’Indonésie, en partie parce qu’elle est riche en or, en cuivre, en bois.

La population autochtone a été marginalisée, voire maltraitée, même si le réseau électrique et routier a été développé. Il y a deux ans, plus de 70% des Papous ont signé une pétition pour réclamer un référendum d’indépendance. L’Indonésie a évidemment refusé.  

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