Londres s’inquiète du recrutement par la Chine de pilotes de l’armée de l’air britannique
Le ministre de la Défense britannique vient de lancer une alerte saisissante, sur le recours par la Chine à d’anciens pilotes de la Royal Air Force, pour former ses propres militaires.
La révélation a tout du roman de contre-espionnage et elle est assez estomaquante. Au cours des trois dernières années, la Chine a fait appel à pas moins de 30 anciens pilotes de l’armée de l’air britannique. Pour initier ses propres hommes aux dernières tactiques de combat des Occidentaux. C’est ce qu’affirme un porte-parole du ministère de la Défense à Londres.
Le système passe par une couverture assez simple : les pilotes, généralement de jeunes retraités de l’armée, entre 50 et 60 ans, sont approchés, un par un, par des chasseurs de tête, pour venir donner des cours dans une Académie aérienne en Afrique du Sud, moyennant une rétribution très significative : 275 000 euros par an. Sauf que les élèves de l’Académie sont essentiellement des Chinois. Et les questions posées portent en grande partie sur les techniques de combat et les stratégies d’engagement de l’Otan. Ce système de recrutement a débuté il y a trois ans ; puis il a été suspendu, évidemment, pendant la pandémie de Covid-19, avant de reprendre de façon accélérée au cours des derniers mois.
Le secret défense menacé
Selon le ministère britannique, aucun pilote en exercice n’a accepté la proposition. Pas davantage de pilote possédant la connaissance des F35, les chasseurs de dernière génération. Mais certains ont été approchés. Et surtout ceux qui ont accepté sont quand même des militaires qui maîtrisent les appareils plus anciens, les Typhoon, les Jaguar ou les Tornado. Donc, cela pose évidemment de sacrées questions de sécurité.
Le gouvernement britannique ne possède pas, à ce jour, d’outils légaux pour empêcher des pilotes à la retraite d’accepter des contrats de ce type. Londres assure qu’aucun secret défense n’a été rompu, mais comment en être certain ? Les Britanniques affirment aussi que d’autres pays occidentaux ont été visés par cette méthode, mais là encore, pas de détails, pas de certitude.
Cette révélation c’est une façon pour les autorités britanniques de dissuader toute personne d’accepter désormais ce genre de propositions. Le gouvernement britannique annonce son intention de durcir les clauses de confidentialité afin d’empêcher toute divulgation d’information sensible. Et les rendre passibles de poursuites. La Première ministre Liz Truss semble également décidée à qualifier officiellement la Chine de "menace" pour le Royaume-Uni. Mais comme elle est, politiquement, sur un siège éjectable, il n’est pas dit qu’elle aille au bout de ses intentions.
Londres et Pékin à couteaux tirés
De son côté, la Chine nie catégoriquement avoir eu recours à cette technique de recrutement. "Je ne suis pas au courant de ce dont vous parlez", a répondu le porte-parole de la diplomatie chinoise Wang Wenbin mardi matin lorsqu’un journaliste lui a posé la question lors d’un point presse. Mais cette information est malgré tout cohérente quand on la rapproche de la volonté affichée par le président Xi Jinping de moderniser son armée à marche forcée dans les années qui viennent. Cet épisode, en tout cas, ne va pas arranger les relations entre Londres et Pékin. Des relations déjà très tendues, après l’exclusion du géant Huawei de l’appel d’offres sur le réseau 5G au Royaume-Uni et aussi en raison de la répression chinoise dans l’ancien territoire britannique de Hong Kong.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.