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Mexique : la révolution féministe passe à la vitesse supérieure

Une avancée spectaculaire pour les droits des femmes et un duel historique entre deux candidates pour l’élection présidentielle de 2024. En quelques jours, une révolution a eu lieu au Mexique : les femmes peuvent avorter sur tout le territoire depuis le mercredi 6 septembre, en attendant d’élire vraisemblablement leur première présidente.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Xóchitl Gálvez (à gauche) et Claudia Sheinbaum (à droite), les deux candidates à la présidentielle du Mexique qui aura lieu en juin 2024. (RODRIGO OROPEZA / CLAUDIO CRUZ / AFP)

Claudia Scheinbaum et Xotchitl Galvez, deux femmes héritières de deux courants politiques radicalement opposés. La première, favorite dans les sondages, est une alliée de longue date de l’actuel président de gauche, celui-là même qui a soutenu la bataille juridique ayant conduit la Cour Suprême à dépénaliser l’avortement sur tout le territoire le mercredi 6 septembre.

Claudia Scheinbaum, qui est l’ancienne maire de Mexico, met en avant son bilan en matière de lutte contre la violence : "On me disait 'vous êtes une femme, vous ne pourrez rien faire pour la sécurité dans cette ville', mais voilà aujourd’hui ce que je réponds : nous avons baissé de 58% les actes de grande criminalité depuis que j’ai été élue maire de Mexico"

Mais Mexico n’est pas le Mexique, lui répondra son adversaire Xotchitl Galvez : "Je suis allée à Celaya, à Tijuana. Ce dont me parlent les gens, partout, c’est de violence. C’est un désastre, et je leur ai dit à tous que j’avais les ovaires pour affronter les délinquants et faire respecter l’état droit…" Xotchitl Galvez met en avant ses ovaires pour prouver qu’elle ne manque pas de courage, avec une version féministe du courant machiste et conservateur dont elle est issue. Elle est la candidate du Frente Amplio, la fusion des deux partis historiques de la droite mexicaine : le PAN et le PRI qui se sont partagé le pouvoir pendant 70 ans... sans jamais obtenir le moindre résultat face à la violence des narcotraficants.

Une extrême violence qui s'en prend régulièrement aux politiques

Catte violence s'est généralisée et cible de pus en plus souvent la scène politique. Plus de 120 personnalités politiques ont été assassinées pendant la campagne présidentielle, il y a cinq ans. Parallèlement à ça, on a vu de plus en plus de femmes s’engager localement ou au niveau fédéral.

On n’atteint pas encore la parité imposée par la réforme de 2014, mais 42% des postes de gouverneur d’État sont aujourd’hui occupés par des femmes. Cet engagement peut aussi être forcé par le contexte violent décrit ci-dessus : Carmen Ortiz avait repris la candidature de son mari assassiné en pleine rue. Nous l’avions rencontrée en 2018 : "Les coups de feu de la haine, de la rancœur et de la lâcheté ont pris la vie de mon mari !"

Les femmes endeuillées en première ligne pour trouver des solutions

Les femmes mexicaines sont poussées sur le front pour trouver une solution, car ce sont elles les premières victimes. Celles qui perdent leurs fils, leurs frères, leurs maris, ou qui sont elles-mêmes les cibles de ces crimes : chaque jour dix femmes ont été assassinées l’an dernier. Et dans 97% des cas, les tueurs ne sont jamais retrouvés.

Des associations, des artistes dénoncent depuis des années ces féminicides, comme la chanteuse mexicaine Vivir Quintana qui écrit : "Que l’État, les cieux, les rues tremblent/ Que les juges et les enquêteurs tremblent/ Les femmes ont perdu patience".

Ce titre fait partie des hymnes féministes, dans le monde entier, et c’est sous l’impulsion de ces mouvements féministes que Claudia Scheinbaum et Xotchitl Galvez sont aujourd’hui sur le devant la scène politique.

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