"100 000 morts et il n’y a pas de coupable", une victime de l’amiante témoigne
En France, les victimes de l’amiante se comptent par dizaines de milliers. Brut est parti à la rencontre d’une victime qui se bat depuis 30 ans pour obtenir réparation.
Aujourd’hui encore, l’amiante cause 3000 décès par an. D’ici 2050, ce matériel bon marché autrefois utilisé dans la construction devrait faire 100 000 victimes.
"Il y avait de l’amiante de partout", explique Henri Boumandil, électricien à la retraite. Sous assistance respiratoire, bouteille d’oxygène sur le dos, il dénonce le manque d’information à l’époque. "Si on avait été prévenus qu’on travaillait avec des produits comme l’amiante ou d’autres produits dangereux, on n’aurait pas accepté de travailler", ajoute-t-il.
L’amiante, un vieux problème français
Pourtant, les premières alertes sur les dangers de l’amiante ne datent pas d'hier. Dès 1962, la Commission européenne adresse des recommandations aux États membres pour alerter sur ces risques.
Pour Henri Boumandil, c’est en 1977 que les pouvoirs publics savaient que l’exposition à l’amiante pouvait entrainer de graves complications. "Moi j’arrive à ce moment-là, je déclare une maladie de l’amiante et je demande à être reconnu en maladie professionnelle", déclare l’ancien électricien.
Quelques années plus tard est créé le Comité Permanent Amiante à l’initiative de plusieurs industriels de l’amiante pour préserver leurs intérêts. Il regroupe plusieurs personnalités : des médecins, des industriels, des fonctionnaires et des responsables syndicaux. Un comité dirigé par des "responsables des lobbies", selon Henri Boumandil.
Le comité a finalement été dissous en 1995.
Les victimes de l’amiante peinent à obtenir justice. En 2012, la cour d’appel de Paris a annulé les mises en examen des certains membres du Comité Permanent. Une décision judiciaire incompréhensible pour Henri Boumandil "ça se termine toujours par un non-lieu alors qu’on sait pertinemment où sont les responsables et pourquoi ils sont responsables".
En tant que secrétaire général de l’ADDEVA 93, une association de défense des victimes de l’amiante, Henri Boumandil espère que la justice ouvrira un procès pénal. “Notre lobby à nous, la puissance qu’on a c’est 100 000 morts. [...] 100 000 morts et il n’y a pas de coupable, il n’y a pas de responsable, ce n’est pas normal”.
Selon Le Monde : "le parquet estime impossible de dater le début de l’intoxication des victimes, donc d’établir les responsabilités". Comme l'envisageait Henri Boumandil, un non lieu risque d'être prononcé.
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