La guerre sur l’étiquetage des camemberts
Depuis une quinzaine d’années, les petits producteurs et les géants de l'agro-alimentaire s’affrontent sur l’étiquetage de leur fromage.
Entre « camembert DE Normandie » et celui « fabriqué EN Normandie », la différence ne tient qu’à un mot, et pourtant, elle est de taille. Le premier est une AOP, appellation d’origine protégée. Il s’agit d’un camembert au lait cru, normand, moulé à la louche et affiné au moins douze jours. Ce qui va le différencier du deuxième c’est l'absence du processus de pasteurisation. L’appellation « fabriqué en Normandie » signifie seulement que le fromage a été élaboré dans une usine normande, le lait peut venir d’ailleurs. Il est la plupart du temps pasteurisé, ce qui permet de conserver le fromage plus longtemps et donc de l’exporter plus facilement vers l’étranger. De fait, il coûte moins cher que le camembert AOP.
Une question de pasteurisation
Pour Philippe Mercier, producteur de camembert de Normandie AOP, pasteuriser le lait reviendrait à perdre tout le goût du fromage. Alors depuis 15 ans, les petits producteurs défendent leur façon de produire leur fromage. Ils ont connu une première victoire en 2007 lorsque les géants de l’agro-alimentaire voulaient faire modifier le cahier des charges du camembert AOC pour le pasteuriser. Mais le nerf de la guerre, à savoir faire retirer la mention « fabriqué en Normandie », continue d’animer les deux parties.
Maintenir la production française
Pour Véronique Richez-Lerouge, auteure de Main basse sur les fromages AOP, « C’est une situation purement illégale. Et d’ailleurs, la répression des fraudes devrait s’en saisir. C’est son travail de faire ça et d’exiger que les termes soient supprimés des camemberts. » Si les petits producteurs se battent pour faire retirer l’appellation « fabriqué en Normandie », c’est parce qu’elle entretiendrait le flou sur ses étiquettes. Il est reproché aux industriels de profiter de l’image du « terroir » du label, ce qui nuit à la production des petits producteurs. En effet, le camembert de Normandie AOP coûte plus cher et ne représente que 5% du marché. Donc si les petits producteurs se battent face aux industriels, c’est aussi pour ne pas disparaître.
C’est l’association Fromage de terroirs qui a interpellé la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) pour lui demander de régler cette histoire d’étiquetage du camembert. Une issue à ce conflit pourrait prochainement voir le jour puisqu’une réunion est organisée le 22 novembre et réunira les petits producteurs, des industriels et l’État.
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