200 000 cancers de l'endomètre évités grâce à la pilule
Le cancer de l'endomètre qui touche la paroi interne de la cavité utérine est le cinquième cancer le plus fréquent à travers le monde chez les femmes. En France, environ 5.000 nouveaux cas sont détectés chaque année, l’incidence de ce cancer étant plus élevée dans les pays développés que dans les pays en développement.
27000 femmes étudiées
Dans une vaste étude publiée ce mercredi 05 aout sur le site de la revue The Lancet Oncology, des chercheurs britanniques ont recueillis et étudiés des données concernant 27.000 femmes atteintes d'un cancer de l'endomètre dans 36 pays d'Europe, d'Amérique du nord, d'Asie, d'Australie et d'Afrique du sud.
Ces travaux, menés à l’université d’Oxford (Angleterre), ont permis d’estimer qu'en l'espace de 50 ans, quelques 400.000 cas de cancers de l'endomètre, sur les 3.4 millions recensés dans ces pays industrialisés, avaient pu être évités grâce à l'utilisation de contraceptifs oraux dont 200.000 au cours des dix dernières années.
Effet protecteur de la progestérone
Ce cancer du corps de l'utérus, à ne pas confondre avec le cancer du col de l’utérus, est causé par le développement anormal de cellules de l'endomètre qui se transforment puis se multiplient de façon anarchique jusqu'à former un amas de cellules cancéreuses.
« L’effet bénéfique des pilules contraceptives oestroprogestatives contre le cancer de l’endomètre a déjà fait l’objet de nombreuses études sérieuses et bien documentées qui montrent que cette action protectrice leur est conférée par leur composante progestative, explique le docteur Jean Belaïsch, gynécologue-andrologue à Paris. L’hormone progestérone a en effet pour action de ralentir la division cellulaire de l’endomètre tandis que l’œstrogène l’accélère. Les pilules, dans lesquelles l'effet de la progestérone surpasse celui des estrogènes, sont plutôt protectrices en limitant la division des cellules anormales."
Cette nouvelle analyse rétrospective a permis de constater que la réduction du risque était déjà significatif avec les pilules oestro-progestatives de première génération, pourtant plus fortement dosée en estrogènes que les pilules actuelles.
Un bénéfice 30 ans après l’arrêt de la pilule
"L'effet protecteur important des contraceptifs oraux contre le cancer de l'endomètre persiste des années après l'arrêt de la pilule", précise le Pr Valerie Beral, coordonnatrice de ces travaux, à l’AFP. L’étude constate ainsi une persistance de l’effet protecteur jusqu’à trente ans après l’arrêt de la pilule.
Or, les cancers de l’endomètre se déclarent généralement chez les femmes ménopausées, en moyenne à 63 ans selon la présente étude, c’est-à-dire bien après l’arrêt de la contraception.
La chercheuse ajoute que l'effet bénéfique existe même chez des femmes qui n'ont pris la pilule que pendant quelques années et se prolonge bien au-delà de la cinquantaine.
Les bénéfices augmenteraient toutefois en fonction du nombre d’années passées sous pilule. Ainsi, la prise d'un contraceptif oral pendant cinq ans réduirait d'environ un quart le risque d'avoir un cancer de l'endomètre avant 75 ans. Sa prise pendant dix ans diviserait pratiquement par deux le risque qui passerait ainsi de 2,3 cas pour 100 femmes à 1,3.
L’étude note enfin que la protection induite par la pilule semble varier en fonction du type de tumeur de l’endomètre. Elle s’avère ainsi plus importante contre les carcinomes, qui touchent la première couche de l'endomètre qu’on appelle l'épithélium, que vis-à-vis des sarcomes, plus rares, qui touchent les couches musculaires plus profondes de l’utérus.
Un effet protecteur à mettre en regard de ses effets secondaires
En France, la pilule est la méthode de contraception la plus fréquente : elle est utilisée par une femme sur deux entre 15 en 49 ans selon une étude de l’Ined de 2012. Le débat se poursuit sur les risques accrus de certains cancers qui pourraient être liés à la prise de contraceptifs oraux, note l’AFP. En 2005, Le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) qui dépend de l’OMS estimait que la pilule, doté d'un effet protecteur contre les cancers de l’ovaire et de l’endomètre, était aussi liée à une légère augmentation du risque de cancer du sein, du col de l'utérus et du foie.
Marie-Noelle Delaby avec l'AFP
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