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À Mayotte, plus de 3 000 enfants sont livrés à eux-mêmes dans la rue

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Brut : Mayotte enfants
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Article rédigé par Brut.
France Télévisions

Depuis une dizaine d’années, 3 000 à 6 000 "mineurs isolés" vivraient seuls dans la rue de Mayotte. Ils vivent du racket, du vol et de la manche… 

 

Mamade, Fayçal, Abdelakim… Ils ont entre 10 et 15 ans et, comme eux, 3 000 à 6 000 enfants vivraient aujourd’hui dans la rue, à Mayotte, département français situé à 8 000 kilomètres de Paris. On les appelle les "mineurs isolés". Ils errent dans les rues de l’île depuis une dizaine d’années. Ils "s’élèvent tout seuls en bande dans les rues de Mamoudzou, ils vont faire la manche, ils rackettent les gens ou alors ils volent ce qu’ils peuvent." explique Kalathoumi Abdil-Hadi, une journaliste mahoraise

Elle a pu rencontrer ces mineurs isolés et discuter avec eux. Elle a d’abord été frappée par leur langage, qu’elle n’a pas compris : "Il m’a dit : 'On a développé ça pour les gens ne comprennent pas.'" et par leur effet de groupe : "Quand quelqu’un s’approche d’eux, les autres sont là, ils veillent, ils regardent, ils voient ce qu’il se passe." Même entre eux, poursuit-elle, "ils peuvent être très violents. C’est la loi de la rue." Par exemple, "quand ils font la manche, si vous leur donnez une pièce de deux euros, tout de suite ils vont faire en sorte d’aller faire de la très petite monnaie, 10, 20, 50 centimes. Parce qu’ils sont rackettés par les plus grands."

Des parents expulsés qui laissent leurs enfants livrés à eux-mêmes

Ces enfants viennent essentiellement "de parents étrangers, qui ont été expulsés parce qu’ils étaient en situation de clandestinité." précise Kalathoumi Abdil-Hadi. Quand les mères sont expulsées, explique-t-elle, elles déclarent qu’elles n’ont pas d’enfants, donc elles les "laissent sur le territoire" tout en s’étant déjà arrangées avec "les voisins, les tontons, quelqu’un plus ou moins proche de la famille" pour qu’ils s’occupent d’eux. Si elles n’amènent pas leurs enfants avec elles, c’est parce que leur objectif est "revenir des Comores ans la foulée" indique la journaliste.

Mayotte connaît un afflux de migrants, souvent venus des Comores. La moitié d’entre eux sont en situation irrégulière et 20 000 d’entre eux ont été refoulés en 2017, l’équivalent de 10% de la population de l’île. L'immigration clandestine est pour beaucoup de Mahorais à l’origine de toutes les tensions et de tous les maux sur l’île. Depuis près de trois semaines, ils se mobilisent contre l’insécurité et pour l’amélioration des conditions de vie dans ce département français d'outre-mer qu’ils estiment délaissé par l’État français. Un avis que partage Kalathoumi Abdil-Hadi : "Je ne pense pas que dans un autre département on aurait laissé 3 000 à 6 000 mineurs isolés comme ça. Les Mahorais ont le sentiment d’être vraiment les derniers des derniers de la France."

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