Covid-19 : le recours systématique aux écrans complique le quotidien des aveugles et des malvoyants
Un an après le début de l’épidémie, franceinfo a rencontré plusieurs personnes en situation de handicap visuel dans l'agglomération lilloise.
Derrière ses grandes lunettes beiges, Annie force sur ses yeux clairs depuis un an. Cette retraitée malvoyante vit seule et doit tout gérer à distance. Mais certaines tâches, comme faire les courses en ligne, sont devenues infernales : "On peut risquer de cliquer où il ne faut pas. Ça m'est déjà arrivé de cliquer trop fort et de commander trois fois la même chose. Je me suis retrouvée avec 18 litres de lait." Attestations en ligne, click and collect, réunions sur zoom... Avec l'épidémie de Covid-19, nous n’avons jamais eu autant besoin d’Internet. Mais pour les aveugles et les malvoyants, qui représentent plus de 1,5 million de Français, ce recours systématique aux écrans complique tout.
Un équipement très cher
Pour aider les personnes comme Annie à s'adapter à la crise sanitaire. Certaines associations organisent une formations numériques à distance. À l'Union des aveugles et déficients visuels (Unadev), Philippe donne des cours gratuitement : "On a maintenant des outils comme les ordinateurs et les téléphones qui contiennent des options qui permettent d'agrandir ou d'épaissir le texte. On a aussi, surtout, des outils de lecture d'écran qui permettent de produire une information vocale à partir d'un écran."
Chez elle, Sabine est équipée dans sa chambre d'un écran d'ordinateur trois fois plus grand que la moyenne. Dans le salon, il y a une télé géante, et dans la cuisine, un télé-agrandisseur. Une machine qui grossit le texte à l'infini. Mais tout cet équipement revient très cher. Le télé-agrandisseur coûte à lui seul 4 200 euros, et son achat peut être subventionné. "Mais après, il faut monter un dossier de dix pages, indique Sabine. Il faut qu'on nous aide à le remplir parce que ce n'est pas fait pour les personnes malvoyantes non plus. Ce sont des dossiers écrits en tout petit. Mais ce n'est pas pris en charge en totalité. Le reste est de votre poche, il faut pouvoir les sortir les 2 100 euros."
"Tant qu'on a du texte, on écoute tout"
Pour rendre le numérique plus accessible, Mathieu Froidure a fondé la société Urbilog. Aveugle depuis ses 40 ans, il teste les sites internet et repère ce qui doit être amélioré. C'est une voie très rapide qui le guide pendant qu'il tapote sur son écran. "Là, j'ai compris que c'était des champignons mais je ne vois pas la partie ajouter au panier", explique-t-il alors qu'il surfe sur un site de supermarché. Pour Mathieu Froidure, cette synthèse vocale est comme un fauteuil roulant : "Tant que c'est plat, le fauteuil passe partout. C'est exactement la même chose pour une synthèse vocale : tant qu'on a du texte, on écoute tout."
"Pour le fauteuil roulant, si vous avez une marche, ça devient un obstacle. Sur un site, si vous avez une image qui n'est pas textualisée, vous avez un obstacle."
Mathieu Froidureà franceinfo
Pour l'instant, plus de 70% des sites publics sont encore inaccessibles aux déficients visuels.
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