Hôpital Saint-Louis à Paris : le service d'immunologie clinique est "menacé à très court terme de fermeture", alerte une médecin
Malgré les augmentations de salaires prévues par le Ségur de la santé, le service peine à recruter des infirmières en raison des conditions de travail. Un rassemblement est organisé ce mardi devant le service.
Le service d'immunologie clinique de l'Hôpital Saint Louis, situé dans le 10e arrondissement de Paris, "est menacé à très court terme de fermeture en raison d'une pénurie qu'on n'a jamais vue d'infirmières de nuit spécialisées", alerte la médecin et adjointe au chef du service Claire Fieschi, mardi 19 avril sur franceinfo. Un rassemblement est organisé devant l'hôpital parisien ce mardi d'après-midi.
franceinfo : Pourquoi organisez-vous ce rassemblement ?
Claire Fieschi : C'est un rassemblement pour les patients et le personnel. Le service est menacé à très court terme de fermeture en raison d'une pénurie qu'on n'a jamais vue d'infirmières de nuit spécialisées pour prendre en charge nos patients qui sont hospitalisés. Leur effectif s'est réduit au cours des dernières années. On a 12 postes budgétés et il n'y a plus que deux infirmières dont une devrait partir dans le courant de l'été. Ce n'est plus tenable parce qu'il faut qu'il y ait au moins deux infirmières la nuit pour s'occuper de nos patients puisqu'on a déjà fermé un certain nombre de lits à cause de ces problèmes.
Les infirmières de jour ont beaucoup aidé en passant de nuit alors que leurs contrats sont des contrats de jour, elles ont une rémunération absolument dérisoire d'un peu plus de neuf euros par nuit pour faire ce travail.
Claire Fieschi, médecin à l'hôpital Saint-Louisà franceinfo
Elles sont épuisées par cette situation et surtout on ne voit pas tellement, à moyen terme, comment on va pouvoir continuer à assurer la qualité des soins qu'on assurait jusque-là. C'est ce qui nous menace de fermeture en dépit des efforts de tous et en particulier des directions.
L'AP-HP pense que la situation s'améliorera à l'automne. Est-ce trop tard ?
C'est très loin, l'automne. Et "on pense", ce n'est pas un "ça s'améliore". Pour l'instant, on essaie de faire des contrats un peu plus attractifs pour que les infirmières de jour veuillent bien continuer jusqu'à l'automne à faire des nuits, à faire des contrats d'intérim, à utiliser les heures supplémentaires, mais on n'a pas de contrat signé pour l'automne aujourd'hui. On a beaucoup d'espoir sur les sorties d'écoles d'infirmières mais aujourd'hui ce n'est pas fait. Personne n'a envie que notre service ferme, ni la direction de l'hôpital, ni la direction de l'AP-HP évidemment. Malheureusement, même si personne n'a envie de le faire, s'il n'y a pas le personnel requis en termes de spécialisation des soins, on ne pourra pas le maintenir ouvert.
Le Ségur de la Santé n'a pas permis d'améliorer le recrutement des infirmières de nuit ?
Le travail de nuit n'a pas été beaucoup discuté au Ségur de la Santé malheureusement. Je crois que ça ne suffit pas. Ça met aussi en lumière les difficultés que garde l'hôpital malgré les augmentations de salaire qui ont été consenties. Je crois que ça met aussi en lumière le mode de financement de l'hôpital aujourd'hui. On arrive aux limites de ce qu'on peut faire. Ça fait 20 ans que c'est mis en place et je pense qu'on est au bout de l'histoire, il va falloir se remettre à la table et discuter pour savoir comment on peut améliorer ces choses pour que notre hôpital public puisse rester aussi excellent qu'il était et aussi ouvert à tous, en particulier aux patients évidemment.
Comment recruter de nouvelles infirmières dans votre service ?
On a une équipe qui est formidablement impliquée, qui a fait beaucoup d'efforts, qui est allée dans les écoles d'infirmières pour essayer de faire venir les jeunes infirmières dans les services. C'est du démarchage. C'est pour dire aussi qu'elles sont heureuses de travailler là où elles sont et qu'elles pensent qu'il faut faire venir les jeunes parce que c'est un service de pointe, c'est un service qui permet d'apprendre son métier, parce que c'est un service où les relations avec les patients sont très fortes et donc c'est un service qui a énormément d'atouts. Si elles ne viennent pas, bien qu'on vienne les chercher, je pense qu'il faut aussi trouver la solution dans le fonctionnement de cet hôpital.
Il y a beaucoup de jeunes infirmières qui sortent de l'école et qui veulent faire de l'intérim, choisir leur planning, ne pas travailler le weekend, ne pas venir les jours fériés, prendre 15 jours de vacances quand elles le veulent…
Claire Fieschià franceinfo
C'est sûr que quand on est dans une équipe on doit faire corps et donc il faut s'arranger entre nous pour que tout puisse être organisé et que la continuité des soins soit assurée. Je pense que tout le monde peut se mettre à la table et discuter des vacances et ça peut s'arranger. C'est ce qui a été fait depuis 30 ans donc ça doit être possible de continuer à le faire. Je pense qu'il faut valoriser le travail de nuit de façon prioritaire et expliquer que c'est un travail qui est valorisant.
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