Crise sanitaire : les demandes d'hospitalisation en psychiatrie en forte augmentation pour les adolescents
C’est l’une des conséquences de la crise sanitaire : les demandes d’hospitalisation en psychiatrie ont fortement augmenté, notamment chez les adolescents. Certains services sont saturés et les listes d'attente n'en finissent plus de s'allonger.
La crise sanitaire du Covid-19 a eu un effet dévastateur sur la santé mentale des Français, notamment chez les jeunes. Confinement, couvre-feu, port du masque, distanciation physique, toutes ces mesures ont un impact plus ou moins fort sur des jeunes déjà en souffrance et isolés. À l'hôpital Charles Perrens de Bordeaux, Adeline Tchamgoué, la responsable de l’unité de pédopsychiatrie, n'avait jamais vu cela. Les demandes de prises en charge ont augmenté de 40% depuis le début de la crise sanitaire.
"Depuis le deuxième confinement, on a eu une inflation très importante des adolescents qui vont mal et une difficulté de récupération pour ces adolescents. Cela donne des hospitalisations qui durent ou des adolescents qui vont revenir très rapidement après une première hospitalisation."
Adeline Tchamgoué, responsable de l'unité de pédopsychiatrieà franceinfo
Résultat, les 20 lits sont constamment occupés avec 40 patients sont sur liste d'attente depuis six mois, et l’hôpital de jour est lui aussi saturé. Ces structures sont pourtant essentielles pour certains adolescents, comme Enola. Elle a 15 ans et une scolarité perturbé par la dépression. "J'ai subi du harcèlement depuis toute petite, du CE2 jusqu'à la quatrième ou la troisième. Des moqueries qui affirmaient que j'étais grosse, que j'étais moche." L'adolescente a eu des pensées noires, s'est scarifiée : "J'ai dû faire plusieurs hospitalisations, dont une qui a duré deux semaines et une autre de plus d'un mois." Aujourd'hui, elle va mieux, mais elle reste suivie par les psychiatres de Bordeaux, avec un emploi du temps aménagé pour les cours.
De nombreux appels à l'aide lancés par des adolescentes
Le taux de tentatives de suicide en France a principalement bondi chez les jeunes filles. Des chercheurs l'ont observé en analysant les appels reçus par les centres anti-poison. De 5 000 signalements pour tentative de suicide début 2020, on est passé à plus de 8 000 signalements chez les 12-24 ans. Au centre anti-poison de Paris, le Dr Dominique Vodovar constate en effet une surreprésentation des jeunes filles.
"Il y a un sexe ratio en 2021 qui est de l'ordre de 4,28 : c'est-à-dire que pour cinq jeunes filles qui vont faire une tentative de suicide, il y aura un jeune garçon qui tentera de se suicider."
Dominique Vodovar, du centre anti-poison de Parisà franceinfo
Un sexe ratio est plus élevé que les années précédentes : "Avant, il était à peu près de 3,1, c'est-à-dire trois filles pour un garçon", évalue-t-il.
Cela se vérifie à l'hôpital psychiatrique de Bordeaux, où une large majorité des patients hospitalisés sont des adolescentes, comme l'a constaté Mathieu Thomas, cadre de santé à Bordeaux. "C'est vrai qu'il y a eu une forte augmentation des difficultés que vivent les jeunes filles. Nous émettons comme hypothèse au sein de notre équipe que le fait d'être confinées, de perdre le contact avec leurs amis peut aggraver les troubles. Donc elles vont moins bien et on peut observer des passages à l'acte auto-agressifs type tentative de suicide par exemple."
Pour répondre à la demande, les soignants doivent s'adapter. Les durées d'hospitalisation peuvent être réduites pour laisser de la place aux autres. Une unité de visite à domicile à également été mise en place pour assurer le suivi des adolescents.
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