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À Madagascar, le président conseille un remède miracle contre le coronavirus

Le président Rajoelina recommande une tisane et un sirop contre le Covid-19. Cette "potion magique" est distribuée le mercredi 22 avril à tous les élèves de 3e et de terminale qui font leur rentrée à Madagascar.

Article rédigé par franceinfo - Sarah Tétaud, édité par Camille Laurent
Radio France
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Temps de lecture : 4min
Le président de Madagascar Andry Rajoelina à la cérémonie de lancement de "Covid Organics", une tisane présentée comme un remède contre le coronavirus, lundi 20 avril à Antananarivo. (RIJASOLO / AFP)

À Madagascar, pays relativement épargné par le coronavirus, avec 121 cas et 0 décès, son président Andry Rajoelina continue de faire parler de lui. Début avril, il affirmait connaître un remède à base de plantes contre le Covid-19. Lundi 20 avril lors d’une cérémonie en grande pompe, il dévoile deux traitements : une décoction et une tisane, à base de plantes médicinales. "C’est grâce à ce médicament que notre déconfinement peut commencer", annonce fièrement le président.

Des remèdes aux ingrédients secrets

Les compositions de ces potions vantées par le président malgache sont confidentielles, pour des questions de protection de la propriété intellectuelle du laboratoire qui les a conçues. Ce que l'on sait, c'est que ces deux remèdes contiennent de l’artémisia et du ravintsara, deux plantes médicinales. La première est réputée pour ses vertus antipaludiques, la seconde pour soigner les infections respiratoires.

Des plantes connues pour renforcer le système immunitaire, présentées comme guérisseuses

Ces remèdes agiraient comme des boosters du système immunitaire. Mais le Président Andry Rajoelina va plus loin en affirmant que cette tisane biologique, appelée "Tambavy CVO", peut guérir les malades du virus : "Aujourd’hui, il y a déjà deux cas qui ont été guéris grâce au Tambavy CVO [la tisane]. Ce que nous voulons faire, aujourd'hui, c’est vulgariser le Tambavy CVO pour protéger notre population. Après, on a déjà eu beaucoup de demandes de partout dans le monde, au Canada, aux États-Unis, en Europe, afin qu’on puisse leur fournir nos produits."

Un "antidote" qui manque de données scientifiques

Le président malgache annonce deux cas de guérison mais sans préciser le nombre de personnes testées ni le protocole établi. Ces informations sont elles aussi tenues secrètes. Malgré cette opacité, Andry Rajoelina décide de rendre obligatoire la prise de la décoction par tous les élèves malgaches. Ainsi mercredi 22 avril, pour leur rentrée après plus d’un mois d’interruption, les élèves de 3e et de terminale se font distribuer cette boisson et sont censés être obligés de la boire.

Pour la première fois, mardi 21 avril, des scientifiques malgaches expriment ouvertement leur désapprobation. L’académie malgache de médecine annonce que "faute de preuves scientifiques apportées, le médicament risque de porter préjudice à la santé de la population." Sur son compte LinkedIn, le doyen de la faculté de Médecine de Tamatave, le professeur Stéphane Ralandison, encourage chacun à rester rationnel en cette période si mouvementée : "Il y a des règles universelles à suivre si on veut valider une démarche. Et avec la précipitation et les pressions de tous horizons, je trouve que nous brûlons un peu trop rapidement les étapes et c’est dans ce chaos qu’on a besoin de la science menée par des scientifiques".  

Du moment qu’on veut prouver son efficacité ou imposer à un grand nombre d’individus différents, la médecine - conventionnelle ou traditionnelle - doit suivre des règles scientifiques et avoir une validité scientifique. Et parmi ces règles, il y a un dogme même qui est le 'primum non nocere' qui veut dire 'd’abord ne pas nuire' à la santé de son patient.

Professeur Stéphane Ralandison

à franceinfo

La population malgache divisée sur les propos du président

Beaucoup de Malgaches sont convaincus de l’efficacité de ce remède quasi miraculeux et se sentent élus de Dieu. Pour d’autres, c’est une revanche sur l’Occident et sur les grands laboratoires pharmaceutiques. Enfin, il y a ceux qui pointent du doigt la machine à propagande du président et son populisme. Ils voient dans cette démarche des enjeux davantage économiques que de santé publique. À la clé, il y a un marché juteux qui profitera à une poignée de personnes dans l’entourage du chef de l’État.

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