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Au Brésil, en pleine épidémie de coronavirus, Bolsonaro débarque son ministre de la Santé

Planète Coronavirus. Tous les jours, des nouvelles du monde à l’heure de la pandémie. Ce vendredi 17 avril, nous sommes au Brésil, où le président Bolsonaro vient de limoger son ministre de la Santé.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le président du Brésil Jair Bolsonaro (gauche) et son ministre de la Santé Luiz Henrique Mandetta (droite), le 18 mars 2020. Avant le limogeage de ce dernier le 16 avril. (JOEDSON ALVES / EFE)

Un président qui en pleine épidémie de Covid-19 limoge son ministre de la Santé, c’est un coup de tonnerre... Même si au Brésil, l’annonce ne surprend personne. Car depuis deux mois, ils n’étaient d’accord sur rien.

D’un côté, le ministre : Luiz Henrique Mandetta. Un scientifique, ancien médecin, partisan d’un confinement strict, quinquagénaire volontaire à la voix posée, qui ne craint pas d’annoncer aux 210 millions de Brésiliens que les temps qui s’annoncent seront "extrêmement durs". Son objectif : sauver des vies.

De l’autre, le président : Jair Bolsonaro, coronasceptique assumé, pour qui le Covid-19 est une "petite grippe" qui passera grâce une journée de jeûne religieux national. Un homme politique d’extrême droite aux déclarations caricaturales, qui se met en scène à la rencontre des Brésiliens, et qui, lors d’un bain de foule, s’essuie le nez avec la main avant de serrer celles de ses admirateurs. Un président qui veut surtout remettre tout le monde au travail, le plus vite possible, pour préserver l’économie. "Un cas extrême de négation du problème", disent les analystes politiques brésiliens.

Élimination d’un rival politique

Malgré les désaveux multiples depuis le début de la crise, le ministre n’a jamais voulu lâcher... Répétant qu' "un médecin n’abandonne pas son patient". C’est donc le président qui a fini par le remercier. Mais en se débarrassant de son ministre de la santé, Jair Bolsonoro élimine surtout un rival politique, un rebelle qui lui faisait un peu trop d’ombre. Car avec 76% d’opinions favorables selon l’institut Datafohla, le ministre était devenu deux fois plus populaire que son président. Jamais les Brésiliens n’ont autant désapprouvé l’action de Jair Bolsonaro depuis son arrivée au pouvoir en janvier 2019.

Ce jeudi 16 avril, après l’annonce de ce limogeage, de multiples concerts de casseroles ont spontanément résonné dans les grandes villes du pays en signe de protestation.

Un limogeage qui arrive au pire moment

Le plus grand pays d'Amérique latine, le plus touché aussi par le coronavirus, voit arriver une vague alarmante de contaminations, au moment où les hôpitaux sont déjà quasiment saturés.

D’après un collectif de chercheurs, le groupe Covid-19 Brasil, le nombre de cas de coronavirus serait en effet quinze fois plus élevé que les chiffres officiels. 300 000 personnes seraient infectées, et pas 20 000 comme le disent les autorités.

Le successeur du ministre débarqué, l'oncologue Nelson Teich, soutenu par l'Association Médicale du Brésil, est à la fois un fidèle de Bolsonaro et un professionnel de santé reconnu qui plaide lui aussi pour un confinement des plus stricts. Il va devoir réussir, dans les semaines qui viennent, un difficile numéro d’équilibre.

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