Coronavirus : "Des gens décèdent malheureusement seuls, sans leur famille", explique un médecin réanimateur
À l'hôpital Avicenne de Bobigny, toutes les visites ont été suspendues explique Stéphane Gaudry, professeur de médecine intensive et réanimation, sur France Inter.
À situation exceptionnelle, décisions exceptionnelles. Face à l'afflux de malades causé par la pandémie de coronavirus, à l'hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis) "on a dû annuler toutes les visites parce que la situation sur place ne permet pas d’accueillir les familles dans de bonnes conditions", explique Stéphane Gaudry, professeur de médecine intensive et réanimation, invité de France Inter, lundi 30 mars. Conséquence, "des gens décèdent malheureusement seuls, sans leur famille". Cette décision a été prise sur des recommandations de l’Assistance publique – hôpitaux de Paris (AP-HP).
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Pour faire face à "ces situations parfois dramatiques", les équipes tentent de mettre en place d’autres dispositifs, "en appelant les personnes de la famille, en leur expliquant ce qui se passe". Par ailleurs, certaines initiatives s’organisent : "Des gens sont en train d'essayer de nous fournir des iPad pour avoir un contact entre les personnes qui sont dans l'hôpital, en particulier en réanimation, et leurs familles via des écrans." Si ce type de dispositif est "relativement compliqué" à mettre en place, selon Stéphane Gaudry, la volonté est là : "On devrait y arriver."
"Vous n'en sortez pas indemne"
Par ailleurs, les admissions en réanimation ne sont plus aussi nombreuses qu’avant pour les personnes âgées, car c'est un traitement très lourd, d'autant plus dans le cas du Covid-19, selon son expérience. "Ça donne lieu à deux à trois semaines d'hospitalisation en réanimation, avec des machines pour respirer, des machines de dialyse, etc." Ces conditions d’hospitalisation ne peuvent pas être appliquées à tous : "Toutes les personnes ne peuvent pas supporter ce genre de séjour très long et très invasif." En particulier, d’après lui, les personnes âgées et les personnes qui ont d’autres pathologies : "Certains ne supportent pas ce genre de séjour."
Quand vous rentrez dans un service de réanimation, c’est loin d’être une partie de plaisir. C’est quelque chose de très lourd, quelle que soit la pathologie pour laquelle vous êtes admis et vous n’en sortez pas indemne.
Stéphane Gaudryà France Inter
Il tient à rassurer : "Pour l'instant, les décisions qui sont prises de limiter l'accès et les entrées en réanimation en Île-de-France ne le sont pas du fait d'un manque de places mais parce qu'on connaît mieux la maladie." Cette décision se fait "au cas par cas". Ainsi, pour un patient âgé ou qui a d’autres maladies, "ça n’a quelquefois pas de sens d’aller jusqu’en réanimation".
Sur la chloroquine, l'incertitude persiste
Stéphane Gaudry est également revenu sur l'utilisation de la chloroquine pour soigner le Covid-19. Une utilisation qui divise fortement le milieu médical. Et pour Stéphane Gaudry, il faut se montrer très prudent. "En l'état actuel des choses, ce qu'on peut dire, c'est que la chloroquine est peut être efficace ; elle est peut être inefficace et elle est peut être dangereuse. Ce sont les trois possibilités", a-t-il expliqué. Nous, on a des malades qui sont arrivés malheureusement avec de la chloroquine et qui avaient des effets secondaires extrêmement graves", a détaillé Stéphane Gaudry.
Quand on ne connaît pas le sujet, on va avoir l'impression que c'est pas grave : on va donner un peu de chloroquine. Et puis, si ça marche, tant mieux. Si ça ne marche pas, tant pis. Mais ce n'est pas comme ça que ça marche.
Stéphane Gaudry
Selon lui, "c'est un médicament qui est cardio toxique quand on le prend pendant un certain temps. On a eu des malades qui ont eu des effets cardiaques, des troubles liés au rythme du cœur qui peuvent, occasionner des dysfonctions du cœur très, très grave. Donc il faut se méfier. Ce n'est pas la première fois dans l'histoire des médicaments et la santé publique qu'il y a un emballement autour d'un médicament".
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