Coronavirus : "désarmés" face à l'épidémie, 264 musiciens indépendants interpellent Emmanuel Macron dans une tribune
Les signataires de la tribune craignent d'être oubliés dans les mesures d'aides économiques mises en place par le gouvernement.
264 musiciens indépendants ont décidé d'interpeller, dans une tribune dévoilée par nos confrères de France Musique ce lundi 04 mai, le président de la République Emmanuel Macron, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire et le ministre de la Culture Franck Riester. Inquiets pour leur avenir, ils y expliquent jouer leur survie face au coronavirus, et craignent d'être oubliés par l'État dans la crise qui les touche.
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"Nous n’avons pas l’habitude de nous exprimer par des mots. Notre langage est celui des notes, phrasés, articulations, coups d’archets... Il nous faut pourtant décrire et nommer une situation qui nous laisse sans voix. Puisque nous sommes désarmés. Comme tout le monde, face à cette pandémie, à ses deuils, à cette mystérieuse et redoutée deuxième vague", écrivent ces musiciens indépendants, solistes, chambristes et instrumentistes, dans cette tribune à l’initiative du pianiste David Fray, des Quatuors Modigliani, Ebène et Diotima. Et où l'on retrouve notamment parmi les signataires les frères Capuçon : Renaud le violoniste et Gautier le violoncelliste.
Il serait trompeur de nous imaginer protégés par les fonds publics dont bénéficient nombre de maisons qui nous accueillent, ou par la diversité des pays dans lesquels nous nous produisons. Les circonstances exceptionnelles auxquelles nous sommes confrontés, avec un risque de fermeture prolongé des salles de concert, mettent en péril l’ensemble de notre profession.
les signataires de la tribune
Ces artistes se disent "démunis, au sens premier, c’est-à-dire sans les ressources matérielles qui nous permettaient jusqu’alors d’assurer notre quotidien".
Des artistes qui réclament un soutien de l'État
Ces musiciens indépendants jugent "la situation inacceptable. Le décret signé le 24 avril ne prend en compte aucune de nos spécificités et sonne comme une véritable injustice. La musique classique est-elle à ce point accessoire dans notre société pour laisser ses représentants ainsi à la marge ?"
Et alors que l'État "prend des mesures fortes et salutaires pour les salariés et relance l’industrie française", les signataires de la tribune se sentent "exclus de ces priorités nationales". "Pourtant nous n’avons pas démérité en vous apportant sans contrepartie toute notre musique dans ces moments difficiles." Et de rappeler que la culture "représente 2,3% du PIB et emploie environ 630 000 personnes", des chiffres "supérieurs à ceux du secteur automobile. N’oublions pas non plus que dans spectacle vivant, il y a 'vivant'. Nous sommes porteurs de vie".
S'ils disent saluer la mise en place du dispositif d’activité partielle pour les intermittents du spectacle, ils souscrivent néanmoins à la tribune que ces derniers ont publié sous la plume des collectifs Année Noire et Culture en danger, "réclamant une 'année blanche' pour la prolongation des droits et la comptabilisation des heures des salariés des annexes 8 et 10 relevant du régime de l’intermittence".
Un problème plus large que les intermittents
"Tous n’appartiennent pas à ce régime de l’intermittence et beaucoup restent sans statut. La disposition prise fragilise considérablement de nombreux artistes et condamne nombre d’entre nous, dont le revenu s’effondre bien en-dessous des 70% du revenu brut que touchent les employés au régime général pendant le confinement", indiquent les signataires.
Des musiciens indépendants qui disent contribuer "au rayonnement" de la France "hors de ses frontières" avec de nombreux concerts à l’étranger "tout en payant nos impôts en France". Mais dont les revenus "se sont totalement évaporés".
Malgré les recommandations faites par les tutelles d’honorer les contrats signés, de nombreux théâtres et salles de concerts subventionnés proposent au mieux des reports, au pire des annulations.
les signataires de la tribune
Une situation "grave" pour les signataires de la tribune : "Les structures les moins subventionnées sont particulièrement vulnérables et ne disposent pas, en l’absence de billetterie, de la trésorerie nécessaire pour faire face aux annulations. Certaines, malgré tout, se distinguent par leur courage et leur solidarité, en trouvant des solutions pour nous indemniser. La filière musicale est une chaîne où chaque maillon est essentiel et dépendant des autres."
"Nous sommes prêts à nous réinventer, nous adapter à des conditions nouvelles dans l’exercice de notre métier. Pas à sa disparition. Faut-il doubler les concerts pour un public masqué dans des petites jauges ? Réfléchissons. Nous sommes convaincus qu’il existe encore un possible", concluent les musiciens indépendants.
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