Coronavirus et obsèques : c'est "un manque terrible pour les familles de ne pouvoir rendre hommage à une personne aimée", alerte le grand rabbin de France
Le responsable religieux propose de "mettre en place un numéro où les gens pourraient parler. Ils pourraient être suivis, partager leur chagrin".
"On a tous alerté sur ce manque terrible pour les familles de pouvoir rendre hommage à une personne aimée", a expliqué sur franceinfo lundi 23 mars Haïm Korsia, grand rabbin de France, après la réunion téléphonique entre Emmanuel Macron et les représentants des cultes en lien avec l'épidémie de coronavirus. "Ces cérémonies [d’obsèques] manquent aux familles", a indiqué le responsable religieux, évoquant l’interdiction des cérémonies d’enterrement en période de confinement.
Franceinfo : Pouvez-vous nous confirmer que le chef de l'Etat vous a dit qu'il n'était pas pour le confinement total ?
Haïm Korsia : Pas en tout cas pour un durcissement dont les maux – selon ses termes exacts – sont pires que la guérison. De ce qu’on a compris, il est donc important de respecter les règles actuelles de confinement mais avec la possibilité de travailler pour ceux dont les activités sont nécessaires. Je pense évidemment aux services médicaux, aux services de sécurité, aux livreurs, tous celles et tous ceux qui permettent à la société de tenir encore debout. Il faut que ces secteurs d'activité puissent travailler. On n’est donc pas dans un modèle de confinement absolu où la vie s'arrête.
Êtes-vous en accord avec cette volonté ?
Je pense que ça correspond à l'esprit français. Il faut qu'on se protège - il nous l'a dit et redit - et en même temps, si l'on ose dire, il faut que le pays puisse rester debout. Ce serait terrifiant de se dire qu'on a guéri d'une pandémie longue en étant économiquement mort.
Est-ce que ça veut dire que la vie religieuse aussi doit se poursuive ? Et si oui, comment faire ?
On a beaucoup parlé des obsèques. Le président a eu des mots très justes sur l'âme et la volonté de nos sociétés d’éclipser la mort. Pourtant, ces cérémonies manquent aux familles. On a tous alerté sur ce manque terrible pour les familles de ne pouvoir rendre hommage à une personne aimée. […]
D’où notre proposition, justement, de mettre en place un numéro où les gens pourraient parler. Ils pourraient être suivis, partager leur chagrin.
Haïm Korsia, grand rabbin de Franceà franceinfo
J'ai appelé tout à l’heure des gens qui avaient besoin de pleurer au téléphone. C’est essentiel. Nous avons compris que nous devons faire des sacrifices et je vous assure que le fait de fermer les synagogues, les temples, les mosquées, les églises est un véritable défi pour les personnes de foi que nous sommes. Mais on l’a fait parce que c’est la nécessité du moment. Il nous faut donc maintenant réinventer une nouvelle façon d'être en lien, ce qui est le sens étymologique du mot religion. Il faut qu'on soit capables de nous relier les uns les autres par des chaînes de solidarité qui fassent que, même si les gens sont confinés seuls, ils ne se sentent pas abandonnés.
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