Coronavirus : quatre questions sur le Care, le nouveau comité d'experts sur l'épidémie créé par Emmanuel Macron
Présidé par la prix Nobel de médecine Françoise Barré-Sinoussi, le Comité analyse, recherche et expertise réunit douze chercheurs et médecins. Il doit être plus "opérationnel" que le Conseil scientifique, mis en place le 11 mars.
Et de deux. Le chef de l'Etat, Emmanuel Macron, a créé, mardi 24 mars, un nouveau comité d'experts sur l'épidémie de coronavirus. Formé de 12 chercheurs et médecins, le Comité analyse, recherche et expertise (Care) est chargé de conseiller le gouvernement sur les traitements, les tests et "l'opportunité d'une stratégie numérique" de suivi, via la géolocalisation, des personnes infectées.
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Qui en fait partie ? A quoi sert-il ? En quoi se distingue-t-il du Conseil scientifique, mis en place le 11 mars, qui lui est chargé "d'éclairer" l'exécutif ? Eléments de réponse.
A quoi sert le Care ?
Son objectif est de "conseiller le gouvernement pour ce qui concerne les programmes et la doctrine relatifs aux traitements, aux tests et aux pratiques de 'backtracking' qui permettent d'identifier les personnes en contact avec celles infectées par le virus du Covid-19", selon l'Elysée.
Le comité "assurera notamment le suivi des études thérapeutiques autorisées en France et les essais engagés sur des traitements à l'étranger". Il accompagnera aussi "la réflexion des autorités sur la doctrine et la capacité à réaliser des tests ainsi que sur l'opportunité de la mise en place d'une stratégie numérique d'identification des personnes ayant été au contact de personnes infectées", poursuit la présidence.
Quelle est la différence avec l'autre comité d'experts mis en place par l'Elysée ?
"Ce comité, qui devra pouvoir se prononcer en quarante-huit heures, est plus technique, et plus directement opérationnel que le Conseil scientifique", selon Les Echos. "Le Care est un organisme d'expertise rapide, qui rend des avis d'opportunité sur des questions précises" au ministère de la Santé, précise le journal économique, tandis que le premier comité scientifique mis en place conseille directement le président et le Premier ministre.
Le Care devra se prononcer sur les tests, les vaccins et les traitements avec toute la rigueur scientifique nécessaire. S'agit-il d'un discret désaveu du tonitruant professeur Raoult, qui prône l'usage à tout-va de la chloroquine contre le virus et fait partie du premier comité ? Dans un entretien au Monde, Françoise Barré-Sinoussi appelle à la prudence sur l'usage de la chloroquine, "dont l'efficacité n'a pas été prouvée de façon rigoureuse".
Françoise Barré-Sinoussi, cheffe du Care, a également estimé que "la communication devrait être mieux coordonnée, de façon globale, pour être la plus fiable possible. Tout est amplifié par les réseaux sociaux, avec de trop nombreuses fausses informations, ce qui crée des angoisses".
Qui sont ses participants ?
Le Care est présidé par Françoise Barré-Sinoussi, une chercheuse à la réputation mondiale. Cette virologiste de 72 ans a obtenu, en 2008, le prix Nobel de médecine qui récompense ses travaux sur le sida. "En 1983, elle co-découvre, chez un patient atteint du sida, un rétrovirus qui sera appelé le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), explique le site de l'Inserm. En 1988, à la tête d’une équipe à l’Institut Pasteur, elle met en place un programme de recherche sur le rôle des déterminants viraux et de l’hôte dans la pathogénie du sida. Elle s’implique également dans des programmes collaboratifs de recherche sur le vaccin du VIH utilisant le modèle des primates."
Le reste du Care est composé en grande majorité de médecins et de spécialistes des infections :
. Jean-Philippe Spano est cancérologue et chef de service du département d'oncologie médicale à l'hôpital de la Pitié-Salpétrière (Paris).
. Yazdan Yazdanpanah est infectiologue. Gastro-entérologue et hépatologue, ce professeur est spécialiste des maladies infectieuses, parasitaires et tropicales à l'hôpital Bichat à Paris. Il a rédigé une thèse sur le sida et a dirigé des thèses sur l'hépatite C et les stratégies vaccinales. Il est également directeur du consortium REACting de réponse aux maladies infectieuses émergentes mis en place par l'Inserm. A noter : il fait aussi partie du Conseil scientifique, le premier comité d'experts mis en place par l'exécutif le 11 mars.
. Dominique Valeyre est professeur de pneumologie à l'hôpital Avicenne à Bobigny (Seine-Saint-Denis) et ancien chef du service de pneumologie.
. Sylviane Muller est chercheuse au CNRS. Cette immunologiste et ancienne directrice adjointe scientifique du CNRS a découvert un traitement du lupus. Pour cela, elle a été récompensée par la médaille de l'Innovation du CNRS. Elle a dirigé le laboratoire d’excellence Centre de recherche du médicament Medalis, qui fait partie de l'action "Initiatives d'excellence" de l'université de Strasbourg.
. Marie-Paule Kieny est directrice de recherche à l'Inserm. Cette spécialiste de la virologie a effectué la majeure partie de sa carrière à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dont elle est l'ancienne directrice adjointe. Elle y est devenue stratège en politique de santé publique, selon le site de l'Inserm.
. Muriel Vayssier est directrice du département Santé animale de l'Inra (Institut national de la recherche agronomique). Elle est spécialiste de la maladie de Lyme.
. Marc Lecuit est professeur d'infectiologie. Il est directeur adjoint du département des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Necker, à Paris, et directeur de l'unité de biologie des infections à l'Institut Pasteur.
Y a-t-il des profils plus singuliers ?
Oui. Trois d'entre eux allient recherche médicale et innovation technologique pointues. Il y a également une anthropologue.
• Franck Molina est chercheur au CNRS. Spécialiste des technologies de diagnostic et des anticorps monoclaux, il dirige l'UMR Sys2Diag à Montpellier. Ce laboratoire public-privé "est une alliance entre le CNRS et Alcediag, une filiale du groupe Alcen", spécialisé dans la défense, puis diversifié dans le médical.
• Bertrand Thirion est chercheur à l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria). Ses recherches "s'articulent autour de la modélisation statistique et de l'apprentissage automatique appliqué aux données d'imagerie cérébrale". Il dirige "l'institut de convergence DataIA", un organisme "porté par l’université Paris-Saclay et dirigé par le centre de recherche Inria Saclay- Île-de-France" spécialisé en sciences des données, intelligence artificielle et société.
. Christophe Junot est ingénieur-chercheur. Il est chef du département médicaments et technologies pour la santé du Commissariat à l'énergie atomique (CEA). Le projet de l’unité est centré sur l’innovation moléculaire et technologique dans le domaine du médicament pour le diagnostic et la thérapeutique.
. Laetitia Atlani-Duault est anthropologue. Elle est directrice de recherche au Ceped (Centre population et développement) à l'université Paris 5 et directrice scientifique de la Fondation maison des sciences de l'homme (FMSH). "Ses recherches se concentrent sur l'analyse critique de la politique et des pratiques de l'aide humanitaire aux niveaux local et international", selon sa fiche sur le site de la FMSH. Elle a reçu en 2008 la médaille de bronze du CNRS en anthropologie et a été nommée en 2018 chevalier de l'ordre des palmes académiques. "Ce sont ses publications sur les médias sociaux en période d'épidémie qui ont dû attirer l'attention du gouvernement", estime La Croix.
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