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Coronavirus : une trentaine de multinationales et de riches actionnaires ont réalisé des bénéfices exceptionnels pendant la crise

Le patron d'Amazon Jeff Bezos aurait pu verser par exemple, une prime de 105 000 dollars à ses 876 000 employés avec ses bénéfices, dénonce l'ONG Oxfam dans un rapport.

Article rédigé par franceinfo
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Jeff Bezos, le patron d'Amazon, le 19 September 2019 à Washington. (MICHAEL REYNOLDS / EPA / MAXPPP)

Une poignée d'entreprises mondiales et de riches actionnaires ont réalisé des bénéfices exceptionnels pendant la crise du Covid-19. C'est ce que dénonce jeudi 10 septembre l'ONG Oxfam dans un rapport sur le partage des richesses au sein des grandes entreprises mondiales pendant la crise.

Intitulé "Covid-19 : les profits de la crise", le rapport révèle une économie à deux vitesses. Selon l'organisation, 32 entreprises, parmi les plus grandes multinationales de la planète, devraient enregistrer cette année une hausse spectaculaire de leurs bénéfices. En 2020, ces bénéfices moyens seront supérieurs de 109 milliards de dollars aux quatre années précédentes.

255 milliards de plus pour les 25 milliardaires les plus riches 

Oxfam note qu'une partie de ces bénéfices, reversés à leurs actionnaires, a permis aux 25 milliardaires les plus riches du monde de voir leur richesse augmenter de 255 milliards de dollars entre la mi-mars et la fin mai seulement, soit une augmentation moyenne de 10 milliards de dollars.

Oxfam souligne par ailleurs que Jeff Bezos, le patron d'Amazon, aurait pu, avec ses bénéfices, verser une prime 105 000 dollars aux 876 000 personnes employées par l'entreprise dans le monde, y compris les quelques 10 000 salariés en France.

Les actionnaires plutôt que la revalorisation des salaires

"Plutôt que d’investir dans l’emploi, les revalorisations de salaires et l’investissement dans la transition écologique", l'ONG souligne que de nombreuses entreprises en Europe, mais aussi en Inde, au Brésil ou en Afrique "continuent de verser coûte que coûte des dividendes à leurs actionnaires, malgré des résultats en berne."

Ainsi, Toyota a distribué aux actionnaires plus de 200% des bénéfices que le constructeur automobile a réalisé depuis janvier, alors que ses ventes sont en baisse depuis le début de la pandémie. BASF, le géant allemand de la chimie, a versé plus de 400% de ses bénéfices aux actionnaires au cours des six derniers mois.

Le phénomène est également repéré en France. 23 entreprises du CAC 40 ont décidé de verser "coûte que coûte" des dividendes cette année, constate Oxfam. Le CAC 40 aura versé au moins 37 milliards de dividendes pendant la crise.

Une démarche "au détriment de l'investissement"

L'organisation met en lumière le patrimoine cumulé des 500 plus grandes fortunes de France qui a battu un nouveau record malgré la crise. Il a progressé de 3% en 2020.
"Si beaucoup des entreprises, y compris les plus grandes, sont en situation de fragilité c’est précisément parce qu’elles ont accordé une part de plus en plus grande à la rémunération de leurs actionnaires ces dix dernières années", explique dans ce rapport Quentin Parrinello, le porte-parole d’Oxfam France.

Il précise que son organisation "n’est plus la seule à pointer du doigt ce problème structurel. La Commission européenne a récemment publié un rapport montrant qu’au cours des 25 dernières années, la part des revenus des entreprises européennes dédiés aux actionnaires a été multipliée par quatre, au détriment de l'investissement."

Combattre une "économie à deux vitesses"

Contre ce qu'elle estime être "une économie à deux vitesses", Oxfam demande ainsi au gouvernement et aux parlementaires de conditionner l’octroi de l’ensemble des crédits du plan de relance à la mise en place d’objectifs socio-écologiques pour les grandes entreprises.

Pour l'ONG, il faut refuser "la baisse aveugle" des impôts de production. Elle souhaite que les sociétés publient un plan de transformation de l’entreprise détaillant son empreinte carbone directe et indirecte et un plan d'investissement permettant de réduire cette empreinte pour respecter l'Accord de Paris. Elle plaide pour l'interdiction du versement de dividendes et de bonus pour les PDG pour le prochain exercice budgétaire.

Enfin, Oxfam milite pour que le financement du plan de relance ne pèse pas sur les plus pauvres, mais mette "à contribution celles et ceux qui ont le moins pâti de la crise."

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