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Covid-19 : le psychanalyste Serge Hefez ne voit pas "de colère", "ni d'angoisse" chez les Français mais "de la résilience"

"Pour la plupart des gens, il y a un mécanisme d'adaptation très profond qui se met en place", a assuré le responsable de l'unité de thérapie familiale dans le service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris.

Article rédigé par franceinfo
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Le psychanalyste Serge Hefez ne voit pas "de colère", "ni d'angoisse" chez les Français mais "de la résilience". Illustration (VANESSA MEYER / MAXPPP)

Il y a un "mécanisme d'adaptation très profond qui se met en place" chez la plupart des Français, a affirmé vendredi 31 décembre sur franceinfo Serge Hefez psychanalyste, responsable de l'unité de thérapie familiale dans le service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière de Paris, après deux ans de crise sanitaire au rythme des chiffres des contaminations du Covid-19. Même s'il sent "une usure émotionnelle", il ne voit pas "de colère", "ni d'angoisse", mais "de la résilience".

franceinfo : Sentez-vous les Français fatigués, usés ?

Serge Hefez : Il y a une usure émotionnelle. Il y a une fatigue chez tout le monde, mais jusque-là, j'ai l'impression qu'on courait du sprint, c'est-à-dire qu'on essayait de lutter le plus possible avec le plus d'énergie, contre ce qui nous arrivait, avec l'idée que ça allait s'arrêter et que tout allait recommencer et qu'on allait pouvoir reprendre le souffle. On ne reprend pas le souffle parce que chaque fois qu'on s'arrête, il y a quelque chose qui repart. On est peut-être maintenant davantage dans un marathon. On est dans des mécanismes d'adaptation sur le long terme et c'est ce que j'entends de plus en plus autour de moi. Cette idée que vraiment on est rentrés dans un changement maintenant. On est rentrés dans un changement de mentalité, dans un changement de la mobilisation de l'énergie. On est dans des phénomènes d'adaptation à une nouvelle ère qui est le fait qu'on vit en permanence avec une maladie, avec des restrictions, avec des empêchements et que donc on s'adapte le mieux possible à cela. C'est ce que j'entends beaucoup. On va faire pour le mieux. Tant pis, on ne sera pas douze à table, on ne sera que quatre. Tant pis, on ne va pas pouvoir faire tel ou tel projet. On va faire un projet plus modeste. On mobilise l'énergie a minima.

Vous ne voyez pas de colère chez les Français ?

Il n'y a pas de colère. Il y a très peu de colère. Il n'y a pas beaucoup d'angoisse non plus. Il y a vraiment cette adaptation, qu'on pourrait voir comme de la résignation, mais que je verrais plus comme de la résilience. On est justement passé peut-être à cette nouvelle étape psychologique qui est qu'on a à affronter quand même quelque chose qui est important, qui est sur du long terme, qui transforme totalement nos vies depuis deux ans. On va donc arrêter de râler, arrêter d'être en colère, cela ne sert à rien et on va donc s'adapter le mieux possible à cette situation. Les seules colères qu'on entend aujourd'hui, c'est au tour effectivement des anti-vaccins, anti-pass vaccinales. La colère  s'exprime de cette façon-là. Mais sinon, pour la plupart des gens, il y a ce mécanisme d'adaptation très profond qui se met en place.

Peuvent-ils espérer voir le bout d'un tunnel bien long ?

On va y arriver et on sait qu'on va y arriver. Et d'ailleurs, qu'est-ce qui se passe aujourd'hui? Tout le monde, plus ou moins, a contracté le Covid-19 aujourd'hui. C'est difficile autour de vous, autour de nous, autour de nous tous. Il y a des dizaines et des dizaines et des dizaines de personnes qui sont contaminées. Tout le monde fait une grippe et cela dure trois, quatre jours. On s'en remet, mais ce n'est pas la fin du monde. Ce que je veux dire, c'est que le Covid-19, il apparaît moins dangereux. Si on se dit qu'on va l'attraper au coin de la rue, ça provoque beaucoup moins de terreur que cela provoquait il y a deux ans. Et avec raison parce qu'effectivement, la plupart des gens sont vaccinés et des gens vaccinés ne développent pas de maladie très importante. Donc, il y a moins quand même cette angoisse. Et donc, on peut mobiliser l'énergie différemment parce qu'on a moins peur.

Comment voyez-vous l'année 2022 ?

C'est une année particulière pour nous parce que c'est une année électorale. Et on entend bien et on sent bien que tout ça amène à une démobilisation autour de ce que pourrait être le sentiment qu'on peut être actif par rapport à la société dans laquelle on vit, qu'on peut prendre une part, à un certain nombre de décisions, pas seulement une échéance électorale, mais aussi se mobiliser dans la société pour participer à des processus décisionnels. Et là, il y a quelque chose qui s'est quand même très fortement émoussé, quelque chose qui s'est beaucoup replié sur soi pour mobiliser le plus possible son énergie sur soi-même, sur son entourage, sur sa famille proche, sur son travail. Donc, ce que j'espère, c'est que peut-être cette échéance va quand même permettre de galvaniser de l'énergie vers l'extérieur et vers l'action.

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