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Covid-19 : pourquoi le port du masque FFP2 n'est pas généralisé en France

Contrairement aux masques en tissu et chirurgicaux, destinés à éviter la projection et l'aérosolisation de particules potentiellement contaminées, les masques FFP2 protègent leur porteur contre l'inhalation d'agents infectieux.

Article rédigé par franceinfo
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Deux personnes portent un masque FFP2 dans une épicerie de Munich (Allemagne), le 19 janvier 2021. (FRANK HOERMANN / SVEN SIMON / AFP)

Les Autrichiens et les Allemands risquent bien de devoir s'y faire. Face à la crainte d'une propagation de nouveaux variants plus contagieux, Vienne et Berlin ont, ou sont sur le point de durcir les restrictions liées à l'épidémie de Covid-19.

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L'Autriche a ainsi décidé de rendre obligatoire, à partir du 25 janvier, le port des masques FFP2, plus efficaces que les masques chirurgicaux traditionnels, dans les magasins et les transports en commun. Ces masques en forme de bec de canard, qui filtrent au moins 94% des aérosols, vont être vendus à prix coûtant en supermarché. Une mesure similaire est à l'étude en Allemagne, et est déjà appliquée dans certaines zones de Bavière. A ce jour, une telle obligation n'est pourtant pas envisagée en France. Franceinfo vous explique pourquoi.

Le gouvernement pas favorable "à ce stade"

Dans un avis transmis dimanche à la direction générale de la santé (DGS), le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) recommande désormais l'utilisation de modèles chirurgicaux ou en tissu de catégorie 1 selon la norme Afnor. Face aux variants du virus plus contagieux, les masques de catégorie 2 et ceux fabriqués de façon artisanale ne sont ainsi officiellement plus conseillés.

"Tous les masques dont le pouvoir filtrant est filtrant à 90% restent valides", a indiqué mardi 19 janvier, sur France Inter, Olivier Véran. "La quasi-totalité des masques industriels grand public ont des capacités filtrantes supérieures à 90% (…) En revanche, le masque artisanal qu'on fabrique chez soi en respectant les normes Afnor, avec les meilleures intentions, n'offre pas nécessairement toutes les garanties nécessaires pour le Haut Conseil de santé publique", a ajouté le ministre de la Santé.

Interrogé sur les pays qui exigent désormais le port de masques FFP2, Olivier Véran a estimé qu'à "ce stade", il n'était pas question de changer les recommandations. "Ce que nous disent les scientifiques et le Haut Conseil de la santé publique, c'est que si deux personnes portent un masque filtrant à 90%, l'efficacité est la même que si une personne porte un masque FFP2 et l'autre, un masque classique", a détaillé le ministre.

Bien plus chers que les masques chirurgicaux

Contrairement aux masques en tissu et chirurgicaux, destinés à éviter la projection et l'aérosolisation de particules potentiellement contaminées, les masques FFP2 protègent leur porteur contre l'inhalation d'agents infectieux. C'est à ce titre que leur vente en pharmacie était réservée aux seuls soignants lors de la première vague de l'épidémie, au printemps 2020.

Ce n'est désormais plus le cas : le grand public peut acquérir des masques FFP2, à condition d'y mettre le prix. Ces protections sophistiquées sont en effet beaucoup plus chères que les masques chirurgicaux traditionnels. Sur le site de vente en ligne Amazon, la boîte de 50 masques "bec de canard" FFP2 la plus vendue coûte près de 90 euros, contre 14 euros pour la boîte de 50 masques chirurgicaux.

Et gare aux offres trop alléchantes. Comme le note BFMTV, des normes strictes encadrent la production de tels masques. L'emballage doit préciser que les masques sont conformes à la norme européenne EN149:2001, ou aux normes américaine N95 ou chinoise KN95. "Difficile de se fier à certains produits vendus sur les marketplaces d'Amazon ou par exemple AliExpress : les photos du produit peuvent afficher ces signes de qualité, mais pas le produit que vous allez effectivement recevoir dans votre boîte aux lettres..." précise BFMTV.

Plus contraignant et peu adapté au grand public

Généraliser le port du masque FFP2 ne signifierait pas que les Français seraient instantanément mieux protégés. "Le FFP2 peut être nécessaire pour le personnel médical pratiquant un geste qui génère de l'aérosol, comme une intubation. Mais il pourrait être trop contraignant et trop technique pour le grand public", estime ainsi Didier Lepelletier, chef du service de bactériologie et hygiène hospitalière du CHU de Nantes, dans les colonnes de La Croix.

Car porter un masque FFP2 est autrement plus astreignant que d'enfiler un masque chirurgical. "Théoriquement il protège mieux, mais encore faut-il l'utiliser correctement et supporter son adhérence bien plus forte au visage", confirme au quotidien Alexandre Bleibtreu, infectiologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. 

"Pour ceux qui trouvent déjà gênant le masque chirurgical, le FFP2 sera un enfer. C'est un matériel de protection, pas un gadget."

Alexandre Bleibtreu, infectiologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris

à "La Croix"

Pour vérifier qu'un masque FFP2 est bien porté, le site de la Répression des fraudes recommande d'effectuer "un contrôle d'étanchéité" : "Couvrir la surface filtrante du masque en utilisant une feuille plastique maintenue en place avec les deux mains. Inspirer : le masque doit s'écraser légèrement sur le visage. Si le masque ne se plaque pas, c'est qu'il n'est pas étanche et il faut le réajuster." Au printemps dernier, les pompiers d'Inde-et-Loire ont à ce titre été sommés de raser barbes et moustaches pour optimiser l'adhérence des masques FFP2 sur leur visage, relatait à l'époque France 3.

Comme si cela ne suffisait pas, les masques FFP2 ne sont pas adaptés à toutes les morphologies. Une étude réalisée sur des soignants de plusieurs pays, et parue en septembre dans la revue médicale Anaesthesia, révélait ainsi que les masques FFP2 et FFP3 pouvaient correctement être appliqués par 95% des hommes, mais seulement 85% des femmes. En outre, les masques allaient à 90% des personnes d'origine caucasienne, contre 84% des personnes d'origine asiatique. La proportion était particulièrement basse, 60% en moyenne, pour les femmes asiatiques.

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