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Covid-19 : pourquoi le nombre de contaminations ne baisse plus en France

L'épidémie marque le pas, voire repart légèrement à la hausse, depuis la fin novembre. Le froid et un relâchement des comportements sont en cause.

Article rédigé par franceinfo
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Une infirmière pratique un test antigénique pour dépister le Covid-19, à Paris, le 18 novembre 2020.  (VOISIN / PHANIE / AFP)

Sur les courbes, le plateau se dessine nettement. Après "quatre semaines de forte décroissance de l'épidémie" de Covid-19, la diminution du nombre de nouvelles contaminations marque le pas depuis la fin novembre en France. Plus de 13 400 nouveaux cas positifs ont été enregistrés en 24 heures, selon les chiffres officiels publiés vendredi 11 décembre par Santé publique France (SPF). L'agence sanitaire alerte sur un "risque élevé" de voir la circulation du virus repartir à la hausse. A trois jours du déconfinement prévu mardi 15 décembre, le pays est toujours très loin des 5 000 cas par jour visés par le gouvernement.

Comment expliquer ce ralentissement ? Trois pistes ont été évoquées.

Parce que les températures ont chuté

C'est le premier argument avancé par les autorités et les épidémiologistes. "L'hiver est la saison idéale pour la propagation des virus à transmission respiratoire", a rappelé Jérôme Salomon, le directeur général de la santé, lors d'une conférence de presse, lundi 7 décembre. Le ralentissement de la baisse de l'épidémie coïncide avec une chute des températures autour du 20 novembre. Un phénomène qui avait déjà été observé à la fin septembre. Il y a eu "quatre jours de froid entre le 24 et le 27 septembre", rappelait en octobre sur France 5 Arnaud Fontanet, épidémiologiste à l'institut Pasteur et membre du Conseil scientifique. Une semaine plus tard, "le nombre de cas a augmenté de façon très, très brutale."

Le créateur du site Météo Covid, Guillaume Saint-Quentin, a publié sur Twitter un graphique permettant de visualiser la concordance entre météo et hausse du nombre de cas à cette période.

Un lien confirmé par le ministre de la Santé, Olivier Véran, lors d'une conférence de presse, jeudi 19 novembre : "Nous avons constaté au mois d'octobre une accélération épidémique quand il a commencé à faire froid."

"On a de bonnes raisons de penser que les facteurs climatiques jouent sur la dynamique épidémique, ne serait-ce que par la synchronicité des reprises épidémiques dans différents pays qui ont des politiques différentes de gestion du risque lorsque le thermomètre chute ou augmente", appuie auprès de l'AFP le responsable de l'unité infections respiratoires et vaccination de SPF, Daniel Levy-Bruhl.

Toutefois, "on ne sait pas très bien faire la part entre l'effet direct de la météo sur le virus, sa virulence, sa persistance dans les voies aériennes et l'effet indirect qu'a le froid et le mauvais temps en général sur les comportements humains", notamment une moins bonne aération des pièces, souligne le spécialiste. Jonathan Roux, épidémiologiste à l'Ecole des hautes études en santé publique de Rennes (Ille-et-Vilaine), met en avant des facteurs liés au froid, plutôt que le froid lui-même : "Premièrement avec le froid, nos défenses immunitaires sont plus faibles. Deuxièmement, quand il fait plus froid, les gens restent plus à l'intérieur, aèrent moins", résume-t-il dans Ouest-France.

Parce que l'allègement du confinement a favorisé les déplacements

Pour les épidémiologistes de SPF, il est trop tôt pour attribuer cette évolution à la réouverture des commerces dits non-essentiels, le 28 novembre. L'assouplissement des restrictions a tout de même envoyé un signal pouvant favoriser une reprise des déplacements et des contacts sociaux. Quand il a listé les facteurs pouvant expliquer la stagnation du nombre de contaminations, Olivier Véran a cité "cet allègement du confinement", qui a également élargi le périmètre et la durée des sorties autorisées à trois heures, dans un rayon de 20 kilomètres, contre une heure dans un rayon d'un kilomètre.

Dans cette perspective, les déplacements ont commencé à augmenter avant la date du 28 novembre. L'ingénieur en informatique Guillaume Rozier, créateur du site CovidTracker, dressait ce constat auprès de franceinfo. "Selon les données de Google du déplacement des Français, on remarque qu'à partir du 15, 16 novembre, les Français ont commencé à davantage se déplacer. Ils sont moins restés confinés chez eux."

Parce que les comportements se sont relâchés

Lors de la dernière conférence de presse du gouvernement, jeudi 10 décembre, le ministre de la Santé a également mentionné le "relâchement collectif, sans doute" parmi les facteurs ayant favorisé une reprise de l'épidémie. Pour Gilles Pialoux, patron de l'infectiologie à l'hôpital parisien Tenon, c'est même le coupable principal : "On parle de confinement, mais quel confinement ? Il n'y a qu'à se balader dans les rues de Paris pour constater que la plupart des gens ne le respectent pas", déplore-t-il dans Le Parisien. Un avis partagé par Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux français : "L'ambiance des fêtes est en train de gagner et c'est vrai que les Français, aujourd'hui, ont besoin de respirer un peu. Ils se relâchent", observe-t-il, très inquiet, sur franceinfo.

Pour Eric Caumes, chef du service des maladies infectieuses à la Pitié-Salpêtrière, la stagnation du nombre de cas ne s'expliquerait toutefois pas seulement par le relâchement. Selon le médecin, interrogé sur France Inter mardi 8 décembre, elle s'explique aussi "par le fait qu'il y a toujours des contaminations en milieu scolaire, et après, ça se transmet dans les familles".

Les vacances scolaires vont-elles permettre de freiner cette circulation du virus ? Les autorités sanitaires craignent au contraire que les rassemblements à Noël provoquent une flambée des contaminations, comme cela a pu être observé après Thanksgiving au Canada et aux Etats-Unis. C'est pourquoi le médecin Jean-Paul Ortiz juge que la préconisation de six personnes à table pendant les fêtes est "frappée du bon sens. (...) Il faut comprendre que le virus continue de circuler. Et si nous ne faisons pas attention, surtout en hiver, où il circule beaucoup plus facilement, nous allons avoir une troisième vague qui va être très dure."

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