Des dizaines de milliers de prisonniers ont-ils été libérés de prison pendant la crise sanitaire, comme l'affirme Nicolas Bay ?
Invité ce dimanche 14 juin sur France Inter, le député du Rassemblement national Nicolas Bay a parlé de “dizaines de milliers de prisonniers” libérés pendant le confinement. C’est faux.
Nicolas Bay était l’invité de l’émission “Questions Politiques” sur France Inter, dimanche 14 juin. Le député du Rassemblement National a notamment critiqué la politique et le bilan sécuritaire du gouvernement : "Il y a urgence (...) à faire en sorte que ceux qui commettent des délits ou des crimes soient interpellés, condamnés et qu'ils purgent leur peine. Aujourd'hui, on l'a vu pendant le confinement, il y a des dizaines de milliers de prisionniers qui ont été sortis des prisons françaises."
Le gouvernement lâche les policiers par connivence militante et idéologique avec la gauche. Il faut sortir de ce schéma et rétablir l'ensemble de la chaîne de la sanction ! #QuestionsPol pic.twitter.com/IBxnnArWCc
— Nicolas Bay (@NicolasBay_) June 14, 2020
Si la population carcérale a effectivement baissé pendant la crise sanitaire, l'eurodéputé RN se trompe dans son analyse. La Cellule Vrai du Faux vous explique pourquoi.
Moins d'entrées dans les prisons
Les mesures prises pour lutter contre la propagation de l’épidémie de coronavirus dans les prisons a fait chuter de façon historique le nombre de détenus en France. Stéphane Bredin, directeur de l’Administration pénitentiaire, annonçait le 18 mai sur franceinfo "13 500 détenus en moins” depuis le début du confinement “par rapport aux 72 500 détenus d'avant crise".
La première moitié de cette baisse s’explique d’abord par la diminution des entrées en détention pendant le confinement, indique le député Patrick Hetzel (LR) dans son rapport concernant la gestion budget de la Justice, sans donner de chiffres. En effet, dès le 14 mars, la Chancellerie publiait une circulaire pour demander, entre autres, aux magistrats "de différer la mise à exécution des courtes peines d’emprisonnement lorsque cela est possible" afin de "limiter et de réduire le nombre des personnes détenues".
Par ailleurs, cette baisse s'explique aussi par le fait que pendant le confinement, "il n'y avait pas de délinquance sur la voie publique, donc il y a eu moins d'entrées”, expliquait la ministre de la Justice à franceinfo, le 12 juin.
Des détenus libérés mais sur des critères précis
La seconde moitié de cette baisse s'explique par des libérations prévues par une ordonnance et une circulaire publiées fin mars par le gouvernement. Ces textes prévoient que les détenus à qui il reste deux mois à purger peuvent terminer leur peine en étant assignés à domicile. Il propose également des réductions de peines exceptionnelles de deux mois pour les détenus. Au total, “plus de 5 500 détenus ont bénéficié d’une sortie anticipée dont 3 800 détenus ont bénéficié de l’octroi d’une réduction supplémentaire de peine exceptionnelle”, précise le rapport du député Patrick Hetzel.
Mais ces dispositifs ne concernent pas n'importe quel détenu. Il faut d'abord avoir été condamné à une peine de prison de moins de cinq ans et pas pour des affaires criminelles, en lien avec une activité terroriste, de violence sur mineur ou violence conjugale. Enfin, ces mesures sont également réservées aux détenus qui ont eu un "bon comportement" pendant leur détention.
“C’est important que le taux de population carcérale ait diminué”
Mercredi dernier, plusieurs professionnels de la justice ainsi que des personnalités ont exhorté Emmanuel Macron à “en finir avec la surpopulation carcérale”, dans une lettre ouverte publiée sur le site de l’Observatoire international des prisons (OIP).
Invitée sur franceinfo lundi 12 juin, la ministre de la Justice a déclaré "important que le taux de population carcérale ait diminué puisque la surpopulation entraîne un certain nombre de difficultés pour les personnels pénitentiaires et les détenus". Nicole Belloubet a ajouté que "les courtes peines de prisons doivent être remplacées par d'autres remplacées par d'autres modalités de sanctions, comme le placement sous bracelet ou le travail d'intérêt général".
Le gouvernement prévoit 15 000 nouvelles places de prison. "7 000 livrées en 2022 et 8 000 ensuite. Je ne suis pas encore en capacité de dire que nous n'en avons plus besoin", avait conclu la ministre de la Justice sur franceinfo.
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