Le brief éco. À quoi ressemblerait une souveraineté européenne de la santé ?
Angela Merkel et Emmanuel Macron ont appelé, lundi, à la création d'une Europe de la santé.
Peut-on créer une industrie européenne du médicament ? La question se pose après la déclaration d’Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse commune, lundi 18 mai, avec la Chancelière allemande, Angela Merkel. "La création d’une Europe de la santé doit devenir notre priorité", a déclaré le président de la République. Voilà pour les mots, mais passer de la parole aux actes est une autre affaire.
La situation est très simple : la santé, n’est pas – n’a jamais été – une compétence européenne. Lorsqu’Emmanuel Macron parle de nous doter de compétences très concrètes avec des stocks communs de masques et de tests, d’achats communs de traitements et vaccins, de plans de préventions partagés des épidémies, il met le doigt sur un point qui fait mal. Aujourd’hui, chaque pays européen fait tout pour défendre sa propre industrie. En Allemagne, au Danemark, en Suède, un peu partout, il y a des champions nationaux du médicament mais aucun moyen de vente ou d’achat n’est mutualisé dans un objectif commun. C’est chacun pour soi.
L’Europe prise en défaut
La récente "affaire" Sanofi est la parfaite illustration de ce problème européen. La semaine dernière, le directeur général du groupe pharmaceutique français, Paul Hudson, a déclaré que les américains seraient les premiers à bénéficier d’un vaccin contre le coronavirus car ils ont aidé le groupe à hauteur de 400 millions de dollars dans la recherche. Et ce n’est pas le seul Crédit impôt recherche ou les différentes aides publiques versés par l’Etat français qui règle le problème. Si l’Europe s’était plus investie, la polémique n’existerait pas et le patron de Sanofi ne se serait pas prêté à ce coup d’éclat bien calculé.
Loin des polémiques, comment créer une souveraineté européenne en matière de santé ? Nous pourrions renforcer l'Agence européenne du médicament avec de vrais pouvoirs décisionnels sur le plan commercial mutualisé. Surtout, il faudrait accepter une collaboration rapprochée entre les États et les industriels pharmaceutiques. Il faut que les États aident les groupes privés à prendre des risques (les résultats des recherches ne sont jamais garantis, cela coûte très cher, une entreprise n’est pas certaine de trouver avant ses concurrents… elle ne peut pas prendre seule ce risque). En revanche si la recherche aboutit, les États se rémunèrent en vaccins à prix faibles. C’est ce que font les États-Unis.
C’est toute l’architecture du système européen qui est à créer. La France n’est pas la seule concernée. La cause commune de la santé européenne reste à inventer. Éspérons que la violente crise du Covid-19 nous y engage pour de bon.
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