"Le poumon économique de la zone s'est arrêté" : la fermeture de Disneyland Paris fragilise toute l'économie locale
Covid-19 oblige, le parc d'attractions de Marne-la-Vallée garde ses portes fermées. Cette fermeture est coûteuse pour le parc, mais aussi pour le territoire alentour, dont l'économie dépend largement du tourisme généré par Disney.
Il était une fois, il y a bien longtemps, dans les années 1990, une publicité qui annonçait, féérique, l'ouverture de Disneyland Paris, à Marne-la-Vallée. Le temps d'avant, en somme : le royaume de Mickey est maintenant fermé, faute d'avoir pu résister à la pandémie de coronavirus Covid-19, plus forte que la magie. La première destination touristique d'Europe est à l'arrêt, en témoignent les barrières installées à l'entrée. Le parc devait rouvrir vendredi 2 avril, mais finalement, non.
Disneyland Paris en temps normal, cela représente 15 millions de visiteurs par an. Depuis fin octobre la fermeture est coûteuse pour le parc en lui-même évidemment, mais aussi pour tout un territoire, cette partie de la Seine-et-Marne dont l'économie dépend largement de Disney et du tourisme de masse. Ce sont notamment des dizaines millions d'euros en taxe de séjour qui s'envolent.
Derrière les palissades colorées, on aperçoit les engins de chantier. Là, nous rencontrons Larbi, l'un des 17 000 salariés de Disneyland Paris. 86% d'entre eux sont en CDI, c'est le premier employeur mono-site de France. Larbi est vendeur dans une boutique, il a 25 ans d'ancienneté. "Moi, ça va, témoigne-t-il. Mais je connais plusieurs collègues qui ne sont pas très bien, qui en ont marre."
"Quand il y a eu la tempête en 1999, on avait fermé une journée et c'était la première fois que le parc fermait. Alors maintenant, forcément, c'est tout tristounet."
Larbià franceinfo
À deux kilomètres du parc, le grand hôtel Explorers est fermé lui aussi. Avec ses 400 chambres, l'hôtel est habituellement rempli à 90% sur l'année, mais depuis plusieurs mois, le bateau pirate qui trône dans le hall prend la poussière et l'air est glacé.
Cela fait maintenant longtemps que le chauffage n'a pas été rallumé. "Tout cela, c'est vide, explique le directeur général Guy Richaudeau. Pour cet établissement, la fermeture se traduit par plusieurs centaines de milliers d'euros de pertes à l'année. Le poumon économique et le dynamisme de la zone s'est arrêté."
"Imaginez qu'on raye la tour Eiffel de la carte. C'est le même effet ici, économiquement, c'est d'une tristesse absolue."
Guy Richaudeauà franceinfo
Disneyland Paris revendique au total 56 000 emplois directs, indirects, ou induits. Le parc fait vivre tout un écosystème, actuellement figé. Les sous-traitants souffrent et l'effet domino se vérifie à la mission locale de Lagny-sur-Marne. "Disney n'a pas une seule offre, soupire Maria Ferreira, la directrice. Pour nous, cela représente des centaines d'emplois et stages qui ne sont pas disponibles. Nous sommes un bassin d'emploi où le tourisme est notre lumière."
Un peu plus loin, à Serris, ville nouvelle de près de 10 000 habitants, avec ses immeubles blancs alignés, ses larges rues, presque désertées, la commune s'est développée grâce au voisinage immédiat de Mickey. Les commerces ici, vont mal, et les chiffres d'affaires en berne. "On se retrouve à 30% de chiffre d'affaires en moins", indique le boulanger. À côté, la brasserie accuse une baisse de 60%.
Dans les rues de Serris, nous rencontrons Anaëlle, serveuse et Alphonse, artiste-interprète, eux aussi salariés à Disneyland. Ils sont aujourd'hui au chômage partiel et n'ont pas travaillé depuis un an. "Il y avait les heures supplémentaires, les jours supplémentaires, etc., détaille Anaëlle. Et maintenant il n'y a plus. Notre emploi est garanti : il y a eu des propositions de ruptures conventionnelles, mais pas de perte d'emploi." "Normalement, c'est blindé ici, et il y a énormément de monde, complète Alphonse. Mais là, il n'y a personne, c'est fantomatique. On est en pleine campagne et on a l'impression que la première pierre de Disney n'a pas encore été posée..."
"Disney génère un montant de taxes important sur le secteur, surtout la taxe de séjour, qui représente un montant extrêmement important, souligne Philippe Descrouet, maire de Serris et président de Val d'Europe Agglomération. Depuis le 15 mars 2020, si on ajoute 2021, on a une estimation d'à peu près 25 millions d'euros de pertes de recettes pour le territoire. L'économie locale vacille complètement."
"Si jamais le tourisme de masse ne revenait pas sur notre secteur d'ici trois ou quatre ans, ce serait une catastrophe économique, bien sûr."
Philippe Descrouet, maire de Serrisà franceinfo
Et à court terme, l'horizon est bouché. Disneyland Paris a évité cette fois d'annoncer une date de réouverture. Actuellement la seule activité importante sur le site est la mise en place, prochainement, d'un vaccinodrome dans l'un des hôtels du parc.
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