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Témoignages Covid-19 : des malades racontent comment ils ont été contaminés lors de leur séjour dans un établissement de santé

Depuis le début de l'épidémie, plus de 26 000 cas nosocomiaux de Covid-19 ont été signalés en France chez des patients venus se faire soigner pour tout autre chose. Quelque 186 de ces patients sont morts.

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Un soignant près d'un malade sous assistance respiratoire infecté par le Covid-19, à l'hôpital Ambroise Paré à Boulogne Billancourt, le 8 mars 2021. (ALAIN JOCARD / AFP)

"J'ai reçu le résultat positif vingt minutes avant mon départ", se souvient Paul*, 36 ans. Courant novembre 2020, il a été hospitalisé pour une greffe rénale prévue de longue date. En arrivant dans l'établissement de santé, situé dans le Grand Est, il a été testé négatif, comme le demande le protocole. Mais quelques jours plus tard, la donne change et Paul est positif au Covid-19.

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Depuis l'arrivée du virus en France, 44 401 cas de Covid-19 nosocomiaux ont été signalés entre le 1er janvier 2020 et le 14 février 2021. Parmi ceux-ci, 26 839 concernent des patients – dont 186 ont trouvé la mort ; 17 552 autres sont des professionnels de santé et 10 des visiteurs. Des patients ou enfants de patients ont répondu à l'appel à témoignages de franceinfo.fr.

Paul est "absolument" certain d'avoir été contaminé lors de son séjour à l'hôpital. "Mais par qui ?" s'interroge-t-il. "Est-ce la faute du personnel soignant ou des visiteurs venus voir mon voisin de chambre ? Je ne le saurai jamais." Sur treize jours d'hospitalisation, seuls ses parents sont venus le voir. Devenus cas contact de leur fils, "ils ont été testés négatifs", lance comme ultime preuve Paul. 

"Un coup de pas de bol"

L'annonce du résultat du test de Fabrice*, 34 ans, l'a marqué également. Sa sortie était prévue deux jours après son opération du cerveau qui a eu lieu le 23 février dans un hôpital parisien. "Il y a eu un test PCR pour tout le service, patients et personnel, puis j'ai entendu mon nom dans le couloir comme quoi mon test était positif", détaille-t-il.

"Le personnel soignant a fermé la porte de ma chambre sans possibilité de l'ouvrir durant trois heures le temps que l'on me transfère dans une chambre confinée."

Fabrice

à franceinfo

Même si c'est "un coup de pas de bol", Fabrice pense lui aussi que sa contamination a eu lieu à l'hôpital : "La seule personne que j'ai vue est mon frère qui a été testé positif quatre jours après sa visite."

"La fracture de ma mère n'a pas été opérée"

Cette contamination complique le retour des patients à la maison. Paul est rentré chez lui armé d'un oxymètre pour mesurer sa saturation en oxygène. "L'hôpital m'a appelé toutes les semaines pour suivre mon état de santé", assure-t-il. En plus du suivi lié à sa greffe, il a aussi eu des examens pour suivre l'état de ses poumons qui ont été "légèrement" atteints par le Covid-19. Quant à Fabrice, il a été inscrit sur Covidom, une application où l'on renseigne deux fois par jour ses constantes. Mais lui n'a pas eu droit à l'oxymètre fourni par l'hôpital.

Pour d'autres, le retour à la maison a été douloureux. C'est le cas de Catherine*, 22 ans, hospitalisée en urgence dans un service psychiatrique de l'hôpital de Suresnes le 17 février. Elle est alors testée toutes les semaines. Mais le lundi 9 mars au matin, elle apprend qu'elle a le coronavirus. "La psy m'a dit : 'Vous êtes positive au Covid vous avez 30 minutes pour rassembler vos affaires et partir'", lâche Catherine encore sous le choc de cette annonce. Depuis, elle angoisse, ayant encore eu des idées suicidaires la veille de son départ de l'hôpital. "On ne m'a donné aucun conseil, aucune explication sur combien de temps je dois m'isoler par rapport à mon conjoint et ma fille qui est encore bébé", se désole la jeune femme, qui se sent "abandonnée".

Jacqueline, âgée de 93 ans, a été testée positive lors de son séjour à l'hôpital de Marseillle pour une facture du bras. Son fils Yves dénonce les "choix délétères" imposés par cette contamination. "La fracture du bras de ma mère n'a pas été opérée car elle a été testée positive cinq jours après son arrivée", raconte-t-il. Si elle s'est bien remise du Covid-19, son fils estime que sa fracture non soignée l'a beaucoup affectée. "Elle a toujours son bras droit en contention qui la fait souffrir et l'empêche d'être autonome."

"J'ai perdu 80% de ma mobilité"

De son côté, Danielle, 67 ans, a l'impression qu'on a délaissé l'AVC qui l'a amené aux urgences dans un état critique le 5 novembre 2020. Cinq jours plus tard, elle a été testée positive et transférée dans un service Covid d'une clinique durant trois semaines. "J’ai perdu 80% de ma mobilité depuis cette date-là. Je ne sais pas si c'est mon AVC ou le Covid-19 qui me rend si malade", témoigne-t-elle. Sa rééducation, après son AVC, n'a pu réellement débuter qu'en fin de séjour "et je pense que cela a joué sur mon état de santé", constate la sexagénaire, résidant dans l'Allier.

Agé de 77 ans, le père de Marc a été admis dans un hôpital parisien pour un check-up ordonné par son médecin traitant il y a environ un mois et demi. Depuis, il est entre la vie et la mort.

Les médecins m'ont dit qu'il avait peu de chance de s'en sortir, que c'était une question de semaines voire de jours.

Marc

à franceinfo

Le bilan du père de Marc a révélé un emphysème au poumon, aggravé par le Covid-19. "Je suis sûr à 100% que mon père l'a attrapé à la clinique où il est allé quinze jours après sa semaine à l'hôpital"affirme Marc, 50 ans. "Il était négatif en partant de l'hôpital", assure-t-il, remonté contre cette clinique dans laquelle les aides-soignantes portaient le masque "sous le nez".

Pire encore, la santé défaillante de la mère de Joël, âgée de 91 ans, l'avait amené en novembre 2020 à rejoindre une maison de repos dans le Jura, avant d'intégrer un Ehpad. Mais une dizaine de jours après son arrivée, le médecin a informé Joël que sa mère était positive au Covid-19. Elle est morte le 29 décembre.

* Les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés.

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