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Témoignages Des célibataires racontent comment la pandémie a bouleversé leur quête de l'amour : "Un vide sentimental s'est installé"

La crise du Covid-19 et les mesures sanitaires qui en découlent sont un frein aux rencontres amoureuses et à la séduction. L'incertitude du contexte, elle, pèse sur la capacité à se projeter à deux.

Article rédigé par franceinfo, Alice Galopin
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
La crise du Covid-19 et les mesures sanitaires qui en découlent sont un frein aux rencontres amoureuses et à la séduction. (JESSICA KOMGUEN / FRANCEINFO)

"C'est le temps de l'amour, le temps des copains et de l'aventure", chantait Françoise Hardy dans les années 1960. Difficile d'en dire autant, en 2021, pour les célibataires en quête de rencontres sentimentales. Depuis un an, la crise sanitaire bouleverse nos vies, jusque dans leurs aspects les plus intimes. Alors comment cherche-t-on l'amour, comment drague-t-on en période de pandémie ? La séduction se conjugue-t-elle avec couvre-feu, confinement et gestes barrières ?

A l'occasion de la Saint-Valentin, nous vous avons posé toutes ces questions dans un appel à témoignages. Nous en avons reçu plus de 200, et nous les avons tous lus. Si certains célibataires n'ont fait aucune rencontre depuis plusieurs mois, d'autres débutent une relation, avec souvent la difficulté d'imaginer un avenir à deux, dans ce contexte si incertain. Voici sept témoignages qui représentent la diversité des histoires que vous nous avez confiées.

Isabelle, 39 ans, se sent freinée pour reconstruire sa vie sentimentale

"Il y a quatre ans, j'ai divorcé. L'année 2020 devait être celle du renouveau. Je me sentais prête à refaire ma vie et à rencontrer quelqu'un. J'ai mis en place la garde alternée de ma fille. Je voulais souffler, sortir, aller au cinéma, au restaurant... Je me suis inscrite sur des plateformes de rencontre. Malheureusement, avec le Covid-19, tout ne s'est pas passé comme je l'imaginais. La peur du virus a pris le pas sur l'envie de faire des rencontres. J'ai eu des conversations avec plusieurs hommes, je devais même en voir un, mais j'y ai renoncé au dernier moment. Je suis tellement scrupuleuse sur le respect des gestes barrières, j'avais peur de le faire fuir. Cette crainte d'être contaminée et/ou de contaminer l'autre m'a freinée. Je n'ai rencontré personne. Moralement, ça m'a minée.

"Aujourd'hui, la crise sanitaire s'installe dans le temps, et j'ai besoin d'avancer."

Isabelle

à franceinfo

J'ai eu une prise de conscience récemment. J'ai l'impression que la situation épidémique va se maintenir au niveau actuel et que le couvre-feu va perdurer. Alors, je me dis qu'il faut que je fasse avec et que j'avance. Je me sens prête à avoir des rendez-vous. Quitte à prendre des risques mesurés, en ne respectant pas le couvre-feu ou en transgressant un peu les gestes barrières. Je veux vivre."

Martin, 26 ans, se rabat sur les applications de rencontre

"Je n'ai jamais vraiment aimé les plateformes de rencontre. Je les trouve déshumanisantes, j'ai l'impression de consulter un catalogue et d'y faire mon marché. Mais avec la fermeture des bars et restaurants, j'y suis quand même retourné. Le problème, c'est que ces applications ajoutent du virtuel à une vie qui l'est déjà trop. Avec la crise sanitaire, on baigne dans le virtuel pour n'importe quelle relation, qu'elle soit amicale, professionnelle, familiale ou amoureuse.

Depuis le déconfinement, en décembre, j'ai rencontré trois personnes via ces applications. Avant, se voir d'abord dans un bar, c'était une sorte d'antichambre sécuritaire, pour avoir un premier aperçu de l'autre en public. Aujourd'hui, on est obligé de se voir à domicile dès la première rencontre. Je donne généralement d'abord rendez-vous à une station de métro ou dans un parc, à un endroit où je sais qu'on pourra être vus. Ça me rassure.

"On brûle des étapes, on prend moins le temps de se découvrir."

Martin

à franceinfo

En temps normal, je discuterais plus longtemps avant d'aller chez quelqu'un. Là, il y a comme l'ombre d'un troisième confinement qui plane. On se dit que si on ne se voit pas cette semaine, ce sera peut-être impossible la suivante. D'habitude, je suis aussi plus exigeant sur les sites de rencontre. Mais la solitude et la déprime guettent. C'est déjà dur de voir d'autres personnes en ce moment. Alors, même quand les profils ne nous correspondent pas vraiment, on accepte une rencontre."

Sarah, 34 ans, a changé son regard sur les relations

"La crise sanitaire m'a fait réfléchir. Le premier confinement a créé un nouveau rapport au temps, comme un moment d'introspection. J'ai fait le point sur ce que je voulais et ce que je ne voulais plus. Le côté consommable des relations, c'est terminé. Je veux prendre le temps de bâtir quelque chose avec quelqu'un, de voir si on est vraiment compatibles. Même si je vais avoir 35 ans dans un mois, que l'horloge tourne et que j'ai envie d'avoir des enfants. Dans le meilleur des cas, je ne serai certainement pas maman avant trois ou quatre ans. Mais ce n'est pas grave. On traverse un moment qui est de l'ordre de l'extraordinaire. Il faut apprendre à faire autrement.

"Je ne me force plus à aller à un rendez-vous s'il n'y a pas de feeling."

Sarah

à franceinfo

Avant le premier rendez-vous, je prends beaucoup plus le temps de discuter. Je veux être sûre de mon coup, pour ne pas prendre un risque inutile. Et quand j'accepte une rencontre, j'ai tendance à surveiller l'apparition d'éventuels symptômes dans les jours suivants… Peut-être que mon petit bonheur intime et personnel passe après le fait de rester en bonne santé. Pour l'instant, c'est ce qui me permet de tenir le coup."

Reynald, 54 ans, estime que la séduction s'efface

"Un peu avant le début de l'épidémie, j'ai développé des sentiments pour une femme. Mais le premier confinement a rapidement eu raison de nous. L'impossibilité de se voir, de partager nos regards… Il ne nous restait plus que la communication virtuelle, qui brouille les émotions amoureuses. Et puis, on ne pouvait pas se projeter, on ne savait pas quand on serait déconfinés. La flamme s'est éteinte. On s'est séparés peu après le début du confinement. Avoir des sentiments pour quelqu'un, c'est une chose, mais l'amour, ça se construit d'une manière différente.

"Le romantisme est blessé par les mesures sanitaires."

Reynald

à franceinfo

Je continue à faire des rencontres via des sites, même si le Covid-19 a mis un gros coup de massue sur les rapports de séduction. C'est beaucoup plus dur d'organiser une rencontre. Le couvre-feu est une épée de Damoclès. A 17 heures, on commence déjà à paniquer, à imaginer des bouchons sur la route et la crainte d'une amende. C'est un frein au désir. On ne peut plus non plus se voir au restaurant, le soir, dans une certaine ambiance. Il n'y a plus le parfum, les beaux costumes, les robes ou les coupes de champagne. Le côté sexy a complètement disparu. Le jeu de la séduction est devenu très réduit."

Marie, 25 ans, vit mal la solitude

"J'ai vécu une rupture amoureuse en novembre. Durant la crise sanitaire, cette relation m'avait permis de garder le cap. J'avais quelqu'un à qui parler quotidiennement. Aujourd'hui, un vide sentimental s'est installé. Depuis janvier, je suis inscrite sur des applications de rencontre. J'ai toujours aimé les rendez-vous dans les bars, les cinémas ou les musées. Mais la perspective de devoir aller chez l'autre dès le premier rendez-vous ne me rassure pas.

"Si je ne vais pas au-delà des messages, c'est aussi parce que je n'ai plus l'envie et le moral pour essayer d'avancer sentimentalement dans ce contexte."

Marie

à franceinfo

Je n'ai donc fait aucune nouvelle rencontre et aujourd'hui, ça me pèse. Le couvre-feu est presque plus difficile que le confinement, parce qu'à 18 heures, on est tous chez soi. Le soir, seule, c'est pesant. C'est angoissant de ne pas savoir encore combien de temps on va être socialement touché. J'ai 25 ans, et j'ai l'impression de perdre du temps. Pourtant, je suis à un âge où j'ai envie de construire des choses."

David, 31 ans, teste de nouveaux lieux de rendez-vous

"Les premiers messages sur les plateformes de rencontre tournent souvent autour de la pandémie. C'est le moment de jauger si la personne est prête à braver le confinement pour une rencontre ou non. Au début, je choisissais des lieux de rendez-vous publics. J'ai même déjà vu quelqu'un dans un supermarché. On a fini dans le rayon bio, parce qu'il y avait moins de monde. Ça n'a pas donné grand-chose… J'ai aussi essayé la balade dans le parc. C'était la fausse bonne idée. En hiver, en plus d'être masqués, on est emmitouflés dans nos manteaux. Il fait froid, on n'a pas envie de flâner, alors on marche vite pour se réchauffer, sans vraiment regarder l'autre. Il n'y a aucun charme.

"Ça peut paraître surprenant, mais j'ai proposé plusieurs rencontres en voiture."

David

à franceinfo

Il y a souvent beaucoup d'interrogations, mais quand j'explique la démarche, et que j'arrive à convaincre l'autre, ça se passe bien. On enlève le masque, on peut mettre le chauffage et créer une ambiance musicale. Surtout, on peut vraiment échanger nos regards. Ma connaissance des places de parking gratuites, situées dans des coins sympas, m'a bien aidé (rires) ! Pour moi, c'est une meilleure solution que d'aller chez l'autre. Je trouve ça trop intrusif et un peu anxiogène pour un premier rendez-vous."

Sophie*, 23 ans, débute une relation sans réussir à se projeter

"En octobre, j'ai fait la connaissance d'un garçon via une application. On s'est vus plusieurs fois. Avec le deuxième confinement, ça n'a pas duré. Chacun a eu des problèmes personnels à gérer. Moi, j'étais très stressée par la situation. Quant à lui, ses parents ont attrapé le Covid. Il était très anxieux. On s'est perdus de vue. J'ai quitté les applications de rencontre, pour finalement les réinstaller en janvier. Inconsciemment, je pense que c'est lui que je cherchais. Je suis retombée sur son profil, et on a commencé à se revoir.

"Il y a encore beaucoup de doutes sur l'avenir de notre relation."

Sophie*

à franceinfo

On se donne rendez-vous chez l'un ou chez l'autre. Mais c'est compliqué, parce qu'on vit tous les deux dans des colocations. Quand on se voit, on discute de la vie, on regarde des films, on partage des moments intimes. En termes d'activités, pour apprendre à se découvrir, ça reste limité. Je pense que lorsque les lieux de sortie rouvriront, ça permettra de consolider notre relation. De mon côté, je considère qu'on est en couple, mais en fait, je n'ai pas vraiment abordé la question avec lui. Le sujet fait peur, l'avenir est tellement flou. Je vais essayer de profiter des jours avec cette personne, de vivre dans l'instant, sans trop me projeter. C'est déjà une chance d'avoir un début de relation en cette période."

* Le prénom a été modifié à la demande de l'intéressée.

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