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Covid-19 : quatre questions sur le vaccin développé par Sanofi et GSK, qui pourrait être mis sur le marché à la fin de l'année

Le laboratoire français a publié des résultats, qu'il juge "excellents", de la phase 2 des essais cliniques menés sur son candidat-vaccin développé avec le britannique GSK. Ce vaccin pourrait être mis sur le marché à la fin de l'année.

Article rédigé par franceinfo, Louisa Benchabane
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le vaccin développé par Sanofi, allié à son concurrent britannique GSK, s’appuie sur la technologie des "protéines recombinantes".  (HAKAN NURAL / ANADOLU AGENCY)

Après un départ raté, le laboratoire français Sanofi est-il sur le point de faire son entrée dans la course au vaccin ? Lundi 17 mai, le groupe pharmaceutique a publié les conclusions des essais cliniques menés pendant plusieurs mois sur 722 volontaires de plus de 18 ans aux États-Unis, au Honduras et au Panama, concernant son candidat-vaccin à protéine recombinante contre le Covid-19, développé avec le britannique GSK. Franceinfo répond aux questions qui se posent sur ce vaccin.

1Comment fonctionne le candidat-vaccin Sanofi-GSK ?

Le vaccin développé par Sanofi, allié à son concurrent britannique GSK, s’appuie sur la technologie des "protéines recombinantes", également appelée "sous-unitaires". Cette technologie est déjà utilisée pour l’un des vaccins contre la grippe saisonnière développé par le groupe français. Dans ce procédé, la protéine de la grippe est remplacée par une protéine présente sur la surface du Sars-CoV-2 : la protéine S (Spike). Cette dernière fonctionne comme une "clé" et permet au virus de débloquer la serrure des récepteurs puis de traverser la membrane cellulaire. Les vaccins "sous-unitaires", comme celui de Sanofi ou encore de Novavax, ont donc pour principe de créer une protéine S semblable à celle du virus puis à l'injecter dans l'organisme, ce qui déclenche la production d'anticorps capables, ensuite, d'engluer et de neutraliser la protéine S du véritable virus. Sans cette protéine, le virus ne peut plus pénétrer dans les cellules et ne peut donc pas se répliquer.

Pour que le vaccin puisse être efficace une fois administré au patient, le laboratoire français mise sur l’association adjuvant-antigène. Elle consiste à introduire dans l’organisme l’antigène et à l’associer "avec un adjuvant qui donnera le signal d’alerte au système immunitaire, explique Bruno Pitard, directeur de recherche, dans CNRS Le journal. Car une protéine seule, même s’il s’agit d’une protéine virale, ne sera pas considérée comme dangereuse par le corps qui en produit lui-même des milliards." Il faut donc la signaler au système immunitaire. 

>>"Piratage" d'un autre virus, utilisation de l'ARN... Quelles sont les différentes technologies utilisées pour les projets de vaccins contre le Covid-19 ?

Les protéines étant des molécules relativement stables, un vaccin fabriqué à partir de protéines Spike purifiées peut donc être conservé à une température comprise entre 2 °C et 8 °C. Ces conditions permettent de transporter et de conserver le vaccin plus facilement.

2Quelles sont les résultats obtenus lors des essais cliniques ?

Les résultats intermédiaires, de phase 2, de cet essai sur l’homme montrent que l’administration de ce vaccin a "induit la production de concentrations élevées d’anticorps neutralisants chez les adultes, toutes tranches d’âge confondues, à des niveaux comparables à ceux observés chez des personnes qui s’étaient rétablies d’une infection [Covid]", détaille le laboratoire dans un communiqué, lundi. Une étude de phase 3, la toute dernière sur l’homme avant la potentielle autorisation de ce vaccin à base de protéines recombinantes, devrait démarrer dans les prochaines semaines, précise Sanofi, qui lancera la production en parallèle. La mise sur le marché pourrait intervenir à la fin 2021.

Dans le détail, les résultats intermédiaires montrent une séroconversion (la production d’anticorps) dans 95 à 100% des cas, après l’administration d’une deuxième dose, dans toutes les tranches d’âge (18 à 95 ans) et pour toutes les doses étudiées.

Par ailleurs, chez les participants ayant déjà été infectés par le Covid-19, une seule dose du vaccin a généré la production de concentrations élevées d’anticorps neutralisants, "ce qui souligne le solide intérêt potentiel que représente son développement pour la vaccination de rappel", affirme Sanofi.

3Ce vaccin développé par Sanofi sera-t-il efficace contre les nouvelles souches du virus ?

"C'est une de ses limites", pointe Frédéric Bizard, économiste de la santé, président-fondateur de l'Institut santé, interrogé par franceinfo. Ce vaccin a en effet été testé contre la souche d'origine et contre le variant identifié en Afrique du Sud, et non contre la souche dominante identifiée en Angleterre ou encore celle apparue en Inde. "Là, on a un vaccin qui est un vaccin de première génération et qui va vraiment arriver avec un rôle complémentaire, qui risque d'avoir quand même un rôle assez secondaire sur le plan de la protection réelle des populations", poursuit Frédéric Bizard. 

4Pourquoi le vaccin a-t-il autant de retard sur ses concurrents ?

L’entreprise pharmaceutique Sanofi a été largement décriée depuis le début de la crise sanitaire, et particulièrement à cause de l’incapacité du groupe français à produire un vaccin dans les mêmes délais que ses concurrents. En cause, une première étude des effets de son vaccin sur l’homme avait conclu, fin 2020, à une réponse immunitaire insuffisante : elle n'était pas assez élevée chez les adultes de plus de 50 ans. Dans la foulée, le laboratoire avait dû repousser un lancement potentiel au quatrième trimestre 2021, alors qu’il tablait initialement sur le milieu de l’année.

Dans une interview publiée le 11 décembre 2020 dans le Wall Street Journal (article en anglais), Thomas Triomphe, vice-président de la branche Vaccins du groupe français, rejetait la faute sur les deux réactifs utilisés par les chercheurs pour mesurer les volumes d’antigènes. "Ces réactifs n’étaient pas d’une qualité ou d’une pureté suffisante", déclarait-il.

Le Conseil d’analyse économique a souligné dans une note très sévère, publiée le 26 janvier, le "retard important" de la France dans l’innovation pharmaceutique. Pour y remédier, il a préconisé d'"augmenter les fonds publics alloués à la recherche fondamentale." Et de relever les salaires des chercheurs, inférieurs de 63% à la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en début de carrière.

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