: Vidéo "On n’arrive pas à estimer certains paramètres cruciaux" : les mathématiciens s'engagent à leur tour dans la lutte contre le coronavirus
Un peu plus de deux mois après l’arrivée du Covid-19 en France, on ne sait toujours pas estimer le nombre de porteurs sains. Une donnée qui serait très utile à la communauté scientifique. Pourtant il existe une méthode simple pour calculer ce nombre.
"On pourrait donner des prévisions beaucoup plus fines sur le développement du virus. Mais on ne connaît pas le nombre de porteurs asymptomatiques… Une donnée essentielle." Josselin Garnier est mathématicien et actuellement professeur à l’École polytechnique. Il est probabiliste et étudie les phénomènes aléatoires. Comme beaucoup de ses collègues, il a décidé de mettre ses compétences au service de la communauté scientifique, afin de trouver des réponses face au coronavirus : "L'idée, c’est de voir quelles sont les données disponibles aujourd’hui et quantifier leur impact sur les prises de décisions auprès des politiques, car ce sont eux, in fine, qui prendront les décisions."
Des "modèles" incomplets
Bio-mathématiciens et épidémiologistes ont pour mission d'établir des "modèles", sortes de "boîtes noires mathématiques" comportant les données concernant le coronavirus, afin d'en extraire des informations sur le comportement du virus. C’est à partir de ces informations qu’on obtient par exemple le taux de transmission. Mais ces données peuvent aussi servir à faire des prédictions : "C’est un travail important, car c’est ce qui permet d’évaluer l’impact des mesures et donc de comparer les décisions entre elles. Faut-il faire un confinement strict ? Quelle durée pour ce confinement ? À partir de quand peut-on dire aux gens qu’ils peuvent recommencer à circuler ? »
Le travail de Josselin Garnier est de valider ces modèles, de les mettre à l’épreuve, afin de voir s’ils sont "robustes". Seulement, actuellement, "il y a certains paramètres cruciaux qu’on n’arrive pas à estimer à partir des données qu’on a" selon Josselin Garnier. L’un de ces paramètres est l’estimation du nombre de porteurs asymptomatiques.
L’échantillonnage aléatoire, comme pour les sondages
Comment déterminer le nombre de porteurs sains, alors que la France manque de tests et n’arrive pas, pour l’instant, à procéder à un dépistage massif de sa population ? Josselin Garnier propose une méthode connue, celle qui est utilisée pour réaliser des sondages : "Au lieu de tester massivement toute la population, on prend un échantillon représentatif, en termes de sexe, d’âge, etc. On prend 1 000 à 2 000 personnes dans trois zones géographiques différentes et avec ces sondages, on a une idée assez fine du nombre de porteurs sains." Une information nécessaire à la validation des "modèles" développés par les épidémiologistes et bio-mathématiciens qui pourront ainsi mieux voir l’évolution du comportement de l’épidémie à l’échelle de toute la population.
Pour l’instant, cette méthode est expérimentée à petite échelle dans le comté de Seattle (Washington) sur la côte ouest des État-Unis, mais Josselin Garnier, comme beaucoup de ses collègues, espèrent la voir appliquer en France.
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