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Médicament contre la calvitie : des hommes saisissent la justice pour dénoncer des effets secondaires indésirables graves

L'avocat de consommateurs du médicament a expliqué sur franceinfo qu'il souhaitait que ses clients soient indemnisés. "Comme tous médicaments, le Propecia peut entraîner des effets indésirables", a expliqué l'ANSM (l'agence nationale de sécurité du médicament).

Article rédigé par franceinfo
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Trois procédures judiciaires seront bientôt lancées, d'autres pourraient suivre. (illustration) (CAROL AMAR / MAXPPP)

"Nous allons lancer trois procédures judiciaires individuelles pour trois victimes du finastéride", a déclaré lundi 11 mars à franceinfo Charles-Joseph Oudin, avocat des victimes dans le dossier du Propecia (aussi appelé finastéride), confirmant une information de nos confrères d'Europe 1. Le Propecia est un médicament exploité par le laboratoire MSD et prescrit à environ 30 000 Français par an pour lutter contre la calvitie. Selon les victimes présumées, ce médicament possède des effets secondaires graves.

Au moins une soixantaine de victimes

"Mon cabinet a été sollicité par une soixantaine de victimes, explique-t-il, qui toutes décrivent des situations extrêmement préoccupantes d'effets indésirables liés à la prise de ce médicament contre la calvitie, avec une spécificité des effets indésirables qui sont de deux ordres : d'abord mécaniques, liés à l'absence d'érection et d'éjaculation, mais aussi psychologiques et psychiatriques de dépression, voire de suicide", poursuit l'avocat. "Mes clients décrivent aujourd'hui une situation où les effets indésirables demeurent, même après l'arrêt des traitements. C'est le caractère irrémédiable des effets indésirables qui représentent une spécificité." Les autres victimes qui ont sollicité son cabinet feront l'objet de procédures ultérieures.

"Ces effets indésirables sont connus notamment par les autorités de santé qui ont récemment alerté sur ces dangers, précise Charles-Joseph Oudin. Nous allons donc saisir le tribunal de grande instance de Nanterre en référé, c'est-à-dire une procédure civile, d'indemnisation, dont l'objectif premier est de faire nommer un expert judiciaire qui devra pour chaque dossier confirmer et établir le lien de causalité entre les effets indésirables et la prise du médicament". "Nous attendons que le tribunal fixe une date d'audience pour plaider ces dossiers, ça va se faire dans les semaines qui viennent."

Nous considérons que mes clients n'ont pas été correctement informés sur les effets indésirables mais surtout sur le caractère irrémédiable de ces effets alors que le laboratoire avait à sa disposition suffisamment d'informations.

Charles-Joseph Oudin

à franceinfo

Obtenir une indemnisation

"Depuis peu, depuis la fin de l'année 2018, la notice contient effectivement une information à peu près adéquate notamment sur le caractère irréversible des effets indésirables. Mais la situation individuelle de mes clients est beaucoup plus ancienne. Ils ont consommé le médicament en 2008, en 2007, à une époque où l'information n'était pas correctement donnée", déplore l'avocat.

Les procédures individuelles n'ont pas vocation à demander le retrait du médicament mais d'engager des procédures civiles d'indemnisation.

Charles-Joseph Oudin

à franceinfo

En revanche, précise Charles-Joseph Oudin, "parallèlement l'association des victimes du finastéride oeuvre pour obtenir la suspension de la commercialisation (la suspension de l'AMM : autorisation de mise sur le marché) et que ce médicament soit retiré du marché. Nous considérons que le rapport bénéfices-risques est défavorable."

Le Propecia "peut entraîner des effets indésirables", répond l'ANSM

"Comme tous médicaments, le Propecia peut entraîner des effets indésirables", a répondu à franceinfo l'ANSM (l'agence nationale de sécurité du médicament) via un communiqué. "Du fait de son mode d’action, des effets indésirables sexuels (baisse de la libido, troubles de l’érection et troubles de l’éjaculation) ont été identifiés par des études cliniques avant même la commercialisation du produit en 1999", poursuit l'ANSM. "Et comme pour tous les médicaments après leur mise sur le marché, les effets indésirables rapportés avec le Propecia et ses génériques sont surveillés."

"Ainsi, des cas de troubles de l’érection persistant après l’arrêt du traitement et de cancer du sein chez l’homme ont été rapportés depuis la commercialisation du Propecia sans qu’un lien de cause à effet ait pu être établi à ce jour", se défend l'agence nationale. "Ses effets indésirables potentiels ont été ajoutés au résumé des caractéristiques du produit (RCP) et à la notice en 2009 et en 2010. L’ANSM a rappelé en 2012 l’importance de consulter un médecin en cas de survenue d’effets indésirables pour réévaluer la pertinence du traitement."

L'autorisation de mise sur le marché de la spécialité Propecia est réévaluée par [l'agence européenne des médicaments] chaque année. Au vu des données disponibles, l'Europe juge que le rapport bénéfice/risque demeure positif.

ANSM

dans un communiqué

Enfin, concernant les effets indésirables psychologiques et les risques de dépression voire de suicide dénoncés par les victimes présumées, l'ANSM répond : "Bien que le lien entre le Propecia et le risque de dépression et d’idées suicidaires ne soit pas formellement établi, l’ANSM a fait part aux autres états membres de l’EMA [l'agence européenne des médicaments] de sa volonté d’informer sur ce potentiel risque en introduisant dans le RCP et la notice une 'mise en garde'. L’AMM a été modifiée en juin 2017 afin d’informer les prescripteurs et les patients sur ces risques."  

Me Oudin, avocat de victimes du Propecia

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